Chapitre 3 : Popularité

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Suite à notre petit accrochage in english, Jules et moi avions écopé de deux heures de colle ce vendredi, de 17 à 19h. Nous avions ensuite enchaîné, avec Dylan et Layla, toutes les autres heures de la matinée, n'écoutant que la moitié les cours et discutant tranquillement.
Mon plan pour rapprocher mes deux âmes soeurs était en marche, mais je devait me nourrir avant de pouvoir le mettre à exécution avec Jules.
L'heure du déjeuner arriva enfin et je me dirigeai vers le self avec Layla, Jules, et Dylan. Nous doublâmes tout le monde et nous installâmes à notre table habituelle, la plus grande et la mieux placée, où Laure, Ben, Aurélien et Baptiste nous rejoignirent quelques minutes plus tard.
Ce dernier ignora totalement Layla, comme je m'y attendais, et celle ci me jeta un regard du coin de l'oeil lorsqu'il s'assit le plus loin possible d'elle à table. Quand à Ben, il avait l'air totalement détaché, comme si rien ne s'était passé.
Aurélien engagea la conversation :
-Alors les amis, comment s'est passée la matinée ?
Nous étions séparés en deux classes ; Baptiste, Aurélien, Laure et Ben en 1ère 3, et moi, Jules, Dylan et Layla en 1ère 7. Tous en ES.
J'aurais aimé faire L, avant. Mais j'avais perdu toute envie depuis.
Toutes sauf une, celle de faire le mal, de détruire les autres, de les voir souffrir, les faire payer.
Ce qui me ramena à l'affaire romantique à vomir que j'avais sur les bras. Au boulot !
Pendant que Layla, Dylan et Jules racontait à Aurélien et aux autres notre passionnant cours d'anglais, je murmurai à l'oreille de Ben, assis près de moi :
-Qu'est-ce qui s'est passé avec Layla ?
-Je l'ai juste réconfortée. Elle avait pas le moral, elle savait pas comment s'y prendre avec Baptiste alors elle m'en a parlé un peu, et je l'ai prise dans mes bras. Maintenant ce con croit qu'il y a un truc, m'expliqua-t-il.
-Va lui dire à lui, repliquai-je.
-Tu crois ?
-Explique lui ou je le fais moi même, et ce ne sera pas à ton avantage.
-Tout de suite ? hésita-t-il.
-Non dans trois ans Ben !
Il me fit un sourire gêné, et je le regardai partir avec Baptiste après lui avoir chuchoté un mot à l'oreille. Quel empoté !
-Où est-ce qu'ils vont ?
C'était Layla, et je mentis, prétendant que je n'en avais aucune idée.
Quelques minutes plus tard, les deux garçons revinrent, et Baptiste semblait assez serein. J'interrogeai Ben du regard. Il me fit oui de la tête, alors j'observai le futur couple. Mais il ne se passa rien.
Agis putain Baptiste ! Mais non. Cet idiot ne faisait rien !
Je lançai un regard à Jules, et il sourit en m'apercevant. Il avait compris. Le plan B démarrait. Nous étions séparés en histoire, mais côte à côte en maths, le but était de préparer chacun de notre côté, et de se mettre d'accord durant les deux heures de calvaire logique.
Aurélien et Laure sortirent de table avant nous tous, très certainement pour se bécoter derrière la cabane aux graffitis, voire même peut-être s'envoyer en l'air dans les toilettes. Oui oui, ce ne serait pas la première fois.
Et moi je juge mais bon...
Je partis quelques minutes après avec Layla, laissant un regard lourd de sens à mon "Juju".
"N'oublie surtout pas.", le pressai-je des yeux.
Nous posâmes nos plateaux et nous dirigeâmes vers le mur des graffitis, le coin favori des populaires, pour fumer une petite clope.
La cabane aux graffitis se trouvait au fond de la cour, près du terrain de sport. C'était un simple petit muret, une ancienne cabane de gardien, grisâtre et décrépie. Seuls les populaires y avaient accès. Et bien sûr, comme son nom l'indiquait, les murs de cette petite pièce était couverts d'oeuvres d'arts plus ou moins artistiques. Passant du plus petit "bite" marqué à la craie blanche par le premier con s'ennuyant là, au magnifique dessin rouge et noir noté "MURDER".
On racontait beaucoup de "légendes lycéennes" sur le cabanon. Il paraîtrait que plus de 200 couples auraient baisé là dedans depuis la création du lycée il y a 7 ans. On disait aussi qu'un meurtre y avait eu lieu, d'où le graffiti "MURDER", et qu'une sorte de fantôme avait effrayé les ouvriers quand le proviseur avait enfin eu l'idée de le détruire.
Moi, je n'y croyais pas.
Que des couples se soient sautés, c'était évident, mais 200, peu probable. Quant aux fantômes, j'y avais cru avant, mais plus maintenant.
La preuve : il n'était plus là, et il n'était pas revenu. Il m'avait laissé tomber.
Tous les autres non plus n'étaient pas revenus me hanter.
Selon moi, la plus plausible ces trois théories était donc le meurtre. Après tout, il se passait des meurtres tous les jours...
Une fois près du mur, je jetai un regard à l'intérieur par la fenêtre à la vitre cassé, et n'y vis pas Aurélien, ni Laure.
-Nous pouvons donc facilement en conclure que nos amis chéris sont aux toilettes, rit Layla, ayant suivi mon mouvement.
-Pour quoi faire, on se le demande, repliquai-je.
Et dans un éclat de rire, nous allâmes nous installer derrière la cabane, avant de fumer quelques cigarettes en toute tranquillité, Layla racontant encore et toujours sa vie inintéressante, et moi faisant encore et toujours semblant de la trouver intéressante.
Le cours d'histoire se déroula assez rapidement, sans embûches, j'étais concentrée sur ma tâche et je sentais sur moi le regard de Jules, près du bureau.
Je le retrouvai en mathématiques, nous étions tous deux du côté de la fenêtre, tandis que Layla et Dylan étaient placés sur la rangée du milieu. Plutôt pratique.
Il me sortit sa feuille, moi la mienne, et nous nous mîmes à lire chacun celle de l'autre.
"Layla, je suis désolé d'avoir cru à une mauvaise chose par rapport à ce que j'ai vu avec Ben.
Il m'a expliqué que vous ne faisiez rien, j'ai mal réagi et je m'en veux.
S'il te plaît retrouves moi dans la cabane aux graffitis ce soir à 18 heures, je dois absolument te parler, c'est important.
Baptiste"
-Pas mal, chuchotai-je à Jules.
-Le tien aussi.
Le mien ressemblait approximativement au sien, quoiqu'un peu plus étoffé.
Durant le cours, plutôt long et ennuyeux, nous nous efforçâmes de créer ensemble LE mot parfaitement crédible, et au bout des deux heures, cela donnait ça :
"Layla,
J'ai absolument besoin de te parler !
Premièrement je voudrais m'excuser, j'ai réagi trop vite et mal quand je t'ai vu avec Ben. J'ai vraiment cru qu'il y avait un truc et c'était bête, je m'en veux.
Si tu me pardonne, retrouves moi dans la cabane aux graffitis ce soir à 18 heures.
S'il te plaît viens, j'ai beaucoup de choses à te dire.
Baptiste"
-Parfait...
J'empêchai le petit sourire machiavélique qui pointait sur mes lèvres d'apparaître. Jules pensait que je voulais réunir deux amoureux en toute innocence. Quel naïf !
Comme tous les autres...
À la fin du cours, en sortant, contente de finir les cours à 17h et d'être enfin tranquille, je me retournai, arrêtée par la question de Jules.
-Demain ?
-Demain, confirmai-je le sourire aux lèvres, tout en lui arrachant la feuille des mains.

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