Un lycée pas comme les autres

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Rebecca n'arrivait pas encore à croire que sa mère ait pu lui faire ça, un aussi mauvais coup, malgré tous les arguments que celle-ci avait pu lui opposer durant toutes ces semaines où elle avait lutté pour avoir le droit de rester vivre chez elle, dans son propre appartement, comme la plupart des jeunes personnes de son âge le faisaient. Cette école avait beau être la plus belle, la meilleure et la plus réputée de toute la Normandie, les deux régions confondues, ainsi que d'une grande partie de la France, elle n'avait strictement aucune valeur aux yeux de la jeune femme, ni pour le meilleur, ni pour le pire. Rien ne pouvait être mieux que le lycée public dans lequel elle avait passé sa seconde, avec les personnes qu'elle connaissait depuis sa plus petite enfance, depuis qu'elle allait à l'école, en fait! Elle avait envie de rester proche de ses meilleurs amis. Elle s'y était toujours sentie à l'aise, comme dans son propre appartement, parce qu'elle y avait des amis précieux et des professeurs d'un excellent niveau qui avaient su s'occuper d'elle comme il le fallait, qui savait quel type de femmes elle était.

Comment allait-elle faire pour apprécier le lycée si elle n'avait pas ses deux meilleurs amis: Nuria et Sacha, pour l'aider à affronter chaque journée qui passait, si elle ne pouvait pas rentrer chaque soir chez elle pour échanger des silences, qui avaient appris à ne plus être pesants avec les années, avec sa mère? Comment cette dernière pouvait-elle croire qu'elle faisait la meilleure chose pour sa fille et pour son avenir, qu'elle était en train de lui venir en aide en agissant de la sorte? Cette dernière ne comprenait pas, elle. Pourtant, sa mère savait parfaitement les difficultés qui se présentaient à sa fille, à chaque fois qu'elle arrivait dans un nouvel établissement, dans un lieu qu'elle ne connaissait pas, entourée de personnes qu'elle ne connaissait pas non-plus. Rebecca n'était pas le genre de jeunes femmes à s'intégrer, tout de suite, dans le système d'une école ou d'un quartier, à rentrer facilement en contact avec les autres. Elle avait du mal à se faire des amis, de simples connaissances. Elle avait du mal à parler avec des inconnus, jusqu'à ce qu'ils soient vraiment des gens qu'elle connaissait bien. Il lui avait fallu plusieurs années pour devenir amie avec Lola et Sacha, par exemple. Et, c'était, à peu près, les deux seules personnes avec qui elle parlait dans son lycée.

Pourtant, elle savait parfaitement qu'elle attirait l'attention des gens sur son passage. Combien de fois en avait-elle vu se retourner pour regarder la courbe fine de ses hanches rondes et de sa taille marquée? Combien de fois avait-elle vu des hommes regarder le bombement de ses fesses et la rondeur de ses petites seins? Combien de fois avait-elle senti le regard des femmes épouser la forme de son visage pâle et la longueur de ses cheveux plus noirs que la nuit qui tombaient dans le creux de ses reins avec délicatesse? D'ailleurs, elle pensait bien que ses longs cheveux noirs ondulés qui tombaient en rafale sur sa taille, telles des cascades noires, tellement épais et ondulés qu'elle avait parfois beaucoup de mal à les coiffer correctement, était une des choses qu'elle préférait sur son corps de jeune femme. Elle pensait parfois que c'était le seul vrai atout qu'elle avait dans son corps de jeune femme.

Tout comme la couleur très claire de ses yeux bleus, qui lui rappelait la douceur de l'eau d'une mer sous le soleil, mais qui viraient souvent au gris des orages, des océans tellement déchaînés lorsqu'elle était irritée ou qu'elle se mettait en colère, comme c'était si bien le cas en cette journée de rentrée!

Mais, mis à part ces deux infimes détails, elle ne se trouvait ni mieux ni pire que les autres jeunes femmes de son âge qui se battaient pour être plus jolies les unes que les autres, avec de plus en plus subterfuges. D'ailleurs, elle se sentait souvent pire qu'elles, au niveau de son physique qu'elle n'arrivait pas à accepter totalement, malgré ses efforts pour se dire qu'elle était normale, qu'elle n'avait rien de plus laid que les autres femmes qu'elle voyait. Elle ne comprenait pas que des personnes puissent avoir autant d'intérêt pour elle. Et, ça lui faisait peur, à vrai dire. Elle ne s'aimait pas vraiment.

DéchusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant