Chapitre 1

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Angie n'avait pas encore vingt ans lorsqu'un matin, débarqua Thomas, un vampire âgé de plusieurs siècles et engendré par Gabriel à la fin du Moyen Âge. Julien et lui étaient donc frères d'ichor, mais, alors que le cadet débordait de vie, l'aîné était plus taciturne. Tout les différenciait : Julien était un charmant jeune homme ténébreux. Angelyne aimait se perdre dans le regard noir de son amant, enfouir ses doigts dans les longues boucles de jais, parcourir sa peau d'albâtre. Il avait toute l'apparence de ce à quoi on s'attend en parlant de « vampire » : beau, jeune et nimbé d'une aura de mystère, alors que Thomas était son total opposé. Transformé alors qu'il était déjà adulte et proche de la trentaine, le frère aîné possédait une épaisse chevelure courte blond cendré, ses prunelles bleu acier se posaient avec distance et froideur sur les gens, ses traits fermes et sévères lui conféraient un aspect austère.

Dès le premier jour, Thomas l'avait terrifiée. Le regard trop appuyé sur ses formes quand ils se rencontrèrent pour la première fois, la manière dont ses yeux l'avaient dénudée pendant qu'ils remontaient le long de ses jambes gainées de bas noirs et juchées sur de hauts talons, la façon dont ils s'étaient attardés sur les courbes de ses hanches et de sa poitrine enserrée dans un bustier de brocard, jusqu'à sa bouche légèrement pulpeuse. Elle aurait voulu retirer sa main quand, pour la saluer, il avait retourné son poignet pour y déposer un baiser sur les veines palpitantes. Percevant ses crocs sur sa peau fine, elle avait tressailli et s'était serrée contre Julien, irrité par l'attitude concupiscente de son aîné.

Puis, le vieux vampire avait saisi son jeune frère dans ses bras :

— Alors ! On ne salue pas son grand frère ?

Lorsqu'Angie rencontrait son regard, elle ne pouvait s'empêcher de frissonner et de ressentir un profond malaise. Quelque chose lui criait de fuir cet individu. Angelyne faisait dès lors tout pour l'éviter. Hélas, le manoir n'était pas suffisamment spacieux pour qu'elle ne le croise jamais quand elle était seule.

Thomas ne lui cachait pas qu'elle lui plaisait. Que du contraire, même. À de nombreuses reprises, il avait eu recours à un langage lourd de sous-entendus à peine voilés. Julien n'appréciait pas, mais son frère le terrorisait, et le jeune homme n'osait défier son aîné pour le remettre à sa place.

Cela faisait des mois que ce petit jeu durait quand la jeune fille, malgré sa peur, repoussa violemment d'une gifle magistrale, les avances de l'immortel qui tentait de la coincer dans le chai. Le regard noir qu'il lui adressa alors la pétrifia, mais ce qu'il fit la terrorisa. L'empoignant par les cheveux, Thomas amena son visage vers le sien. À quelques centimètres de sa bouche, il lui affirma, les dents serrées par la rage :

— Ne recommence jamais ! Ou tu payeras cher ton audace...

Il la bloqua contre le mur, la tête immobilisée par une poigne de fer, une jambe entre ses cuisses et son autre main la bâillonna tandis qu'il plongeait ses crocs dans son cou. Angie rugit de douleur et de révolte contre la main qui l'empêchait de crier. Elle tenta de se débattre, de le repousser, de le frapper, mais le vampire semblait un roc. Il ne bougea pas d'un pouce et but tout son soûl. Elle sentit son sexe dur au travers de l'étoffe de son pantalon alors qu'il se pressait sans aucune gêne contre elle de manière à ce qu'elle n'ignorât rien de l'urgence de son désir. Thomas retira ses canines de sa chair, lécha la petite plaie et fit couler quelques gouttes de son ichor afin qu'elle cicatrise. Il la maintint contre le mur pendant qu'il lui murmurait à l'oreille tout ce qu'il fantasmait de lui faire.

— Crois-moi, un jour, tu jouiras dans mes bras. Je te ferai rugir, Angie ! Tu seras à moi, rien qu'à moi ! Cette jolie bouche, je la prendrai, je la mordrai et m'en abreuverai jusqu'à l'ivresse. Je te marquerai, tu seras mienne à jamais.

Sang d'Ombre Où les histoires vivent. Découvrez maintenant