Chapitre 5

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Après le départ de Kyle, Maman m'a servi mon chocolat chaud. Elle a bien vu que ça n'allait pas trop ; quand elle est entrée dans la pièce, j'étais assise sur le canapé, figée, ne sachant que penser. Elle m'a prise dans ses bras en me disant que ça irait. Que les gens ne me pérsécuteraient pas éternellement, qu'ils finiront par oublier les quatres longs mois qu'avait duré mon absence. Elle ne savait pas que j'étais dans cet état à cause de Kyle. Je ne lui ai pas dit, parce que je ne voulais pas qu'elle sache que j'ai tout raconté à Kyle. Et qu'il est maintenant au courant que je suis morte. Quand j'y repense, je trouve ça stupide. Je ne comprends pas comment il a fait pour savoir que je disais la vérité. Elle est tellement absurde cette histoire! Les gens ne réssucitent pas d'habitude. J'ai fait des recherches sur internet pour essayer de trouver des cas similaires au mien ; sans succès. J'ai vu quelques histoires de bébés noyés qui reprenaient conscience quelques heures plus tard avant de mourir à nouveau, mais rien d'approchant ce que j'avais vécu. Ce que je ne comprenais pas, c'était ma capacité à entendre, sentir, apercevoir des formes, alors que mon cerveau était censé être privé de toute activité quelconque. C'était inexplicable.

Les jours suivants sont passé à une vitesse incontrôlable. Mes amis ont été adorables, ils m'ont soutenue à chaque instant, je ne pensait pas qu'ils seraient si heureux de me revoir. Je ne me remet toujours pas de la toute nouvelle relation Layla-Sam, même si je me réjouis du bonheur de mes camarades. Kyle ne m'a pas reparlé de notre conversation de ce soir là. Il fait comme s'il ne s'était rien passé, même si quelques fois je le sens me fixer. Ça me met mal à l'aise mais je ne dis jamais rien, je ne veux pas relancer le sujet. Être active, rire, travailler, discuter, marcher, simplement bouger, tout cela me change tellement de mes quatres mois d'immobilité que j'ai l'impression de vivre à deux cents à l'heure. Être maîtresse de moi-même après des heures passées à tenter d'ordonner à mon cerveau de bouger ne serait-ce que mon orteil, ça n'as pas de prix. Mais j'ai gardé des séquelles de ce calvaire. Je pense que c'était inévitable. Parfois lorsque l'on me parle, je ne réponds pas. Pas parce que je suis dans la lune, mais parce que je n'arrive pas encore à réassimiler que des gens puissent s'adresser à moi, et que je je puissent leur répondre. J'ai quelques défaillances aussi, une jambe qui se dérobe, une main qui se relâche. Ce n'est pas systématique, mais tout de même assez fréquent pour être légèrement handicapant. Personne ne se moque de moi, tout le monde semble respecter ce que j'ai vecu ( même si aucun deux n'en connaît la réelle portée).
Pour ce qu'il en est de mes parents, on fait tous les trois comme si rien n'était jamais arrivé. Je sait qu'ils ont eu beaucoup de mal, qu'ils ont énormément souffert, et même si parfois j'aimerais en parler, je sais qu'ils n'y tiennent pas et qu'ils font tout pour oublier qu'ils ont failli perdre leur fille unique.
Moi dans tout cela, je me sens un peu égarée. J'ai l'impression que ce monde est différent de celui que j'ai laissé et je me sens comme une étrangère. Je ne me sens plus vraiment à ma place dans tout cela, trop de chose se sont déroulées en trop peu de temps et c'est assez dur à assimiler.
Je fais des cauchemars aussi. Je ne me rapelle jamais ce qui s'y déroule, mais je me réveille chaque matin complètement terrifiée. Je suis perdue et personne ne m'aide à surmonter ça. Les vacances sont arivées vites, j'ai décidé de prendre mon courage à deux mains et d'aller parler à Kyle. Le Samedi, à quinze heures, je suis prête. Je descend l'escalier et je m'éclipse par la porte d'entrée après avoir échangé un signe de salut avec mon père. Kyle n'habite qu'à quelques rues. Je lui ai envoyé un message la veille pour le prévenir que je passerai. Il a répondu qu'il comptait justement m'inviter et qu'il avait aussi besoin de me parler. Ça m'a soulagée ; j'avais peur qu'il fasse la sourde oreille.
J'arpente les rues de mon village d'un pas rapide. Il est neuf heures et quart et j'ai l'impression que je m'apprête à avoir l'une des conversations les plus importantes de ma vie...

Amber Où les histoires vivent. Découvrez maintenant