L'araignée tissait sa toile, silencieuse, attentive, affamée. A l'ombre de la pierre où poussait l'ancolie elle attendait l'abeille, le bourdon ou la mouche qui viendrait s'égarer près du piège mortel.
Le fil avait ce charme, délicat et suave, des dentelles qui parent le corsage des femmes. Il s'étoilait d'opales, d'émeraudes, de rubis, suivant que le Soleil, l'effleurant au passage, égrenait les heures, de l'aube jusqu'au soir.
La nuit il scintillait de mille éclats d'argent, s'ornait de pierres de lune, laiteuses et transparentes, où le syrphe leurré par tant d'évanescence venait s'abandonner dans les rets meurtriers.
L'araignée attendait. Elle connaissait le prix de la persévérance, qui fait défaut aux hommes, ces géants impatients qui n'ont pas d'espérance et embrasent leurs vies...
A l'ombre de la pierre, elle tissait le destin, de mille petits êtres semblables à ces humains qui s'offrent au Soleil sans offrir en retour l'hommage qu'il attend.
Tels l'abeille, le bourdon ou la mouche, attirés par l'écarlate robe de la belle alanguie, les hommes se retrouvent prisonniers de l'envie, de la faim, des désirs, qui rongent leurs âmes folles et égarent leur esprit.