Après ce que je viens d'apprendre je ne bouge plus depuis cinq minutes. Cela ne peut pas être vrai. On ne peut pas m'enlever toute ma vie d'un seul claquement de doigts. Jusque là je suis dans le déni total mais à présent je ne peux pas rester naïve. Tous mes souvenirs ne seraient qu'une pure invention. J'ai beau me dire que j'aurais vécu dans un rêve, je n'arrive pas à m'en persuader. Je ne peux pas oublier la perle de ma vie : Gaël, mon petit frère. Il a six ans. Ses petites bouclettes me font craquer. Il sourit tout le temps. Ses éclats de rire sont contagieux. Je crois bien que c'est ça qui me manque le plus. Je regrette toute les fois où j'ai refusé de jouer avec lui. Le jour où il est né, est le plus beau jour de ma vie. Je sautais partout, dans tous les sens, j'étais si heureuse. Je n'ai pas pu le voir ce jour là mais une semaine plus tard je l'ai enfin vu de mes propres yeux et non sur une photo. Il était tout petit. Ses yeux d'un bleu-gris presque translucide me regardaient avec tendresse. Je l'ai porté dans mes bras et il a souri. Je me souviendrai toujours du premier sourire qu'il m'a adressé.
Tous mes souvenirs avec lui remontent un par un. Son premier fou-rire, ses premiers mots, la fois où il a eu la varicelle, ses premiers pas, son premier jour à l'école, quand il a appris à lire et à écrire. La main d'Éden passe devant mes yeux de nombreuses fois avant que je daigne sortir de mes rêves. Il me faut quelques secondes pour remonter à la surface. J'ai presque oublié ce nouveau monde. Après tout, les souvenirs que je viens de me remémorer ne sont pas réels.
Je regarde autour de moi. Éden et Loïc me regardent d'un air inquiet. Je leur souris pour leur signifier que je vais bien. En réalité je ne vais pas bien. Mais je ne veux pas les inquiéter plus qu'ils ne le sont déjà. Ils m'expliquent que pour l'instant nous sommes en sécurité chez Loïc mais que l'on ne pourra pas rester longtemps, ce serait trop dangereux. Ils sont déjà à notre poursuite et cette maison est sur la liste noire. Ils vont sûrement jeter un coup d'œil dans les prochains jours. Je me lève et leur dis que j'ai besoin de me reposer. Ces derniers jours ont été durs pour moi.
Je me dirige vers la chambre au papier à fleurs comme je la surnomme. Je m'allonge et m'endors comme une masse sur le lit.
Éden me réveille brusquement. Je ne sais pas combien de temps j'ai dormi mais j'ai le sentiment que cela ne fait que cinq minutes. Le garçon ne sourit pas. Il a même l'air paniqué. Il me tire hors du lit.
- Nous devons partir ! Ils sont là ! dépêche toi !
Je panique moi aussi. Où allons nous maintenant ? Nous sortons par la porte de derrière. Avant de passer la porte je croise le regard de Loïc. Il a l'air tout aussi paniqué que nous. J'espère que nous pourrons nous revoir. Il me fait un signe de la main. Je lui renvois son signe.
Éden commence à courir me tenant toujours la main. Je le suis pour éviter qu'il ne me tire encore une fois. Sa main me sert de toute ses forces. Je le sens tendu. Sait il où il va? Il prend une petite rue sombre derrière de grands immeubles. Je n'ai pas eu l'occasion de remarquer plus tôt que tout les gratte-ciel sont en verre. On peut voir des tas de bureaux, tous alignés, symétrie parfaite. J'aime cette symétrie.
Je me colle au mur. Éden pose sa main sur ma bouche de peur que je nous fasse repérer. Nous n'entendons plus que le bruit des voitures dans la rue d'à côté. Je me concentre sur ma respiration et tente de calmer ma fréquence cardiaque. Je serre fort sa main dans la mienne. Il a peur. Bien que j'aie tout aussi peur que lui, je le rassure du mieux que je peux. Sa main se desserre un peu et sa respiration se fait plus lente. Son état m'aide à calmer le mien. Mais cela ne dure pas longtemps. Une porte s'ouvre au fond de l'impasse illuminant l'intégralité de la ruelle. Je cache mes yeux éblouis. Je distingue des cheveux rouges voguer au vent. Une petite fille d'à peine 10 ans nous observe les yeux grands ouverts. Elle nous indique la porte. La main d'Éden se resserre sur la mienne. Néanmoins il suit - certes méfiant - la fille aux cheveux de flamme.
La porte mène à des escaliers qui descendent dans une cave. On ne peut distinguer que de petits yeux grand ouverts nous fixant. La petite nous emmène dans un autre pièce à l'ombre des regards. La lumière me permet de voir un bureau. Un homme d'une trentaine d'année nous regarde. Cela doit être leur chef.
- Bienvenue chez les Rebelles.
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Les As
Science FictionImagine que tout ton Univers n'existe pas. Que toute ta vie n'a été qu'une simulation. Tu te réveilles dans un autre monde,emmené dans une maison inconnue. Tu deviens l'esclave de cette maison.