19 Septembre

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Cela fait longtemps que je n'ai pas écrit dans mon journal. A vrai dire ma vie est devenue monotone. Elle est faite de tristesse et de solitude. Je suis seule dans la cour comme à la cantine, une vraie asociale. Mais je m'y fais. Je ne pleure plus. Je ne dis pas que je préfère cette vie à l'autre mais je suis obligée de la vivre. A vrai dire, je n'ai plus aucun sentiment. Comme si mon cœur avait été glacé. Ce matin, il n'y avait pas cours. Je ne savais pas trop comment m'occuper puisque je n'avais plus d'amis. Pas de sortie, juste des devoirs à faire. J'ai les ai fait en trainant le plus possible. Mais j'ai été arrêtée en plein élan par mon portable qui se mit à vibrer. Ce devait être Papa qui me souhaitait une bonne journée ou je ne sais quoi d'autre. Je m'étais trompée. Louis. Il a toujours cette capacité d'arriver aux moments les plus inattendus. Cela me redonna le sourire. Je déverrouillais mon téléphone, ouvris l'application message, cliquais sur la conversation et lus

- Coucou ça va ?

Question type quand on veut lancer une conversation. Je n'allais pas lui répondre « oui » quand je vais mal. J'ai fait bref.

- Non.

Il a répondu illico.

- Pourquoi ?

Je ne pouvais pas lui déballer toute mon histoire par message. C'était trop banal. Je lui ai proposé un McDonald et il a accepté sans hésiter. Il m'a vite rejoint. Nous y sommes arrivés en cinq minutes. J'ai vite commandé un menu comme lui et nous nous sommes empressés de nous installer sur une table pour deux. Il était en face de moi. J'allais entamer un long récit quand en balayant la salle d'un coup d'œil je distinguais un couple assis sur un canapé en train de s'échangeait un bisou langoureux. Mais ce n'était pas qu'un simple couple. Je les connaissais. Bien. Très bien. Ingrid et Paul. En apercevant cette scène je me suis pincée en croyant que j'étais toujours dans cette abominable cauchemar mais en vain. Je suis d'abord resté bouche-bée puis j'ai éclaté en sanglots. Cette sensation que j'avais connue quelques jours plus tôt. Louis a d'abord cru que quelqu'un m'avait tapé. Mais il remarqua bien vite que personne ne m'avait touchée. Il tournait la tête dans tous les sens à la recherche d'un coupable.

- Quoi, quoi, a-t-il jacassé, qu'est-ce qu'il se passe ?

Je voyais bien qu'il était stressé. Je lui montrais en hoquetant et couinant en même temps ce fameux couple tout en bafouillant

- Paul.

Il ne se le dit pas deux fois. Il avait compris, c'était mon petit ami que je lui montrais. Je sentis la colère monter en lui.

- Avec une autre fille ! Moi je vais lui apprendre la vie à celui-là.

Il se leva avant que je le retienne.

- Non, ai-je miaulé, laisse-moi t'expliquer.

Je lui contais toute l'histoire depuis le début. Ingrid, la dispute, Paul et ma solitude. Il semblait à bout de nerfs. Mais la honte monta en lui quand il comprit que cela partait de notre rencontre au cimetière. Mais quand j'évoquais Paul je hoquetais de plus belle. Lui devenait rouge de honte. Il se sentait coupable. Mais ce n'était pas de sa faute. C'était moi qui l'avais abordé. Et puis tout cela n'était qu'un malentendu. Mais Ingrid avait profité de la situation et avait gagné gain de cause. Louis ne savait pas comment réagir, je savais bien que s'il m'adressait un « désolé » pour lui cela ne suffirait pas. Il n'avait pas d'excuse à me rendre. Au loin je les entendais se murmurer des « je t'aime » et tout le baragouin habituel des amoureux. Cela se stoppa quand j'entendis mon prénom. Je n'osais plus les regarder. Cela me dégoûtait. Ma meilleure amie avec mon amoureux. Mais la voix d'Ingrid me fit sursauter :

- Pas mal ton nouveau copain, je m'attendais à pire venant de ta part.

Je ne savais pas quoi répondre je ne pouvais pas lui renvoyer la balle puisque son nouveau copain était mon ancien. J'ai tout simplement baissé la tête en hoquetant. Louis semblait révolté.

- Tu ne vas pas te laisser faire par une pauvre fille comme celle-ci.

- Tu ne la connais pas, ai-je bafouillé le plus bas possible.

C'est là que Paul est intervenu d'une façon tout à fait inattendue.

- Un peu de respect ça ne tue pas.

Le son de sa voix me fit frissonner. Un vent glacial se répandit dans tout mon corps. Sa douceur semblait envolée, volatilisée.

- Alors dis à ta copine de partir, commença Louis, on ne veut pas de vos commentaires.

- Constatations, a épelé Paul, ce n'est sûrement pas dans ton vocabulaire.

Ils se détestèrent au bout de 30 secondes.

- Mais vous vous ne rendez pas compte à quel point vous pouvez faire du mal, a-t-il défendu tout en se mettant en colère, elle a fondu en larmes quand elle vous a vus dans les bras l'un et l'autre. Et elle pleure toujours et vous venez nous embêter maintenant Le respect non plus ce n'est pas dans ton vocabulaire.

- Tu crois que le manque de respect ça vient que de nous, a rétorqué Paul, Elle m'a trompé Très bien, je ne compte plus à ses yeux et en plus il me traite comme un objet, quelqu'un qui ne vaut pas son attention.

- Et les preuves ? T'en a ?

- Des photos

- C'est tout ce que t'as ? Des photos ?! Et l'avis de ta copine ce n'est pas une preuve ?

J'aurais bien voulu connaître sa réponse mais un membre de la direction le lui en a empêché. Ils étaient priés de sortir pour éviter une bagarre. J'avais une dette de plus envers Louis qui avait débattu à ma place avec beaucoup d'aisance. Louis a vite terminé son repas. Moi je n'avais pas faim. Cet endroit était insupportable. J'avais toujours cette boule au ventre et des petits hoquets sans fin. Paul et Ingrid formaient désormais un couple. Rien que d'y penser cela me donnait la chair de poule. Louis voyait bien que je n'étais pas bien. Il essayait de lancer des conversations mais en vain cela se finissait toujours par un silence glacial. En fin de compte il m'invita chez lui afin de me présenter à ses parents. Sa maison n'était effectivement pas très loin de la mienne. C'est ce que j'appelle la providence. Sa mère était blonde aux yeux châtains. Elle avait la carrure que toutes les jeunes filles rêvent avoir. Elle avait les mêmes yeux que Louis. Ceux qui vous ensorcèlent. On ne peut pas cesser de les regarder. Son père était brun aux yeux gris. Il avait un très beau sourire. Son ventre confirmait qu'il avait passé la quarantaine. Il rigolait sans cesse. Cela me redonna un peu le sourire. Il me taquinait. Je voyais que Louis était un peu gêné. Après cela il m'a entrainée dans sa chambre. Nous avons beaucoup discuté. La bonne humeur de son père m'avait fait oublier les moments difficiles de la journée. Il m'a proposé de venir chez lui tous les jours pour me remonter le moral. Je pense que c'est une bonne idée. J'aime sa présence.

Mes quinze ansOù les histoires vivent. Découvrez maintenant