Chapitre 6 : Course poursuite ( Corrigé )

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Je fuyais maintenant depuis quelques minutes lorsque des bruits de pas se firent entendre derrière moi. Prise de panique, j'accélérai, mettant toute mon énergie dans cette course folle. J'avais l'impression que la forêt s'était retournée contre moi.

Que les racines sortaient de terre pour me faire trébucher, que les branches, tel des bras, venaient me lacérer la peau de leurs mains griffues, que les arbres tout à l'heure majestueux, étaient à présent dépourvus de feuilles, sombres et effrayants.

Ils se moquaient de moi et de ma stupidité d'être venue dans cet endroit maudit. La forêt semblait s'étirer à l'infini et je commençais à désespérer de ne jamais trouver de sortie quand j'aperçus au loin ce qui me semblait être le portail.

L'espoir envahit ma poitrine, j'allais peut-être pouvoir m'échapper d'ici ! Plus je m'en approchais, plus je sentais l'excitation monter en moi et me donner la force de courir.

Distraite, je me rendis compte, trop tard, que les bruits de pas s'étaient considérablement rapprochés. Soudain, une main glacée me saisit le coude et me tira violemment en arrière. Coupée dans mon élan, je m'écrasais lourdement en arrière.

Le choc de la chute me coupa le souffle et la douleur se répercuta dans ma colonne vertébrale. Ma tête cogna violemment la terre et des points noirs obscurcirent ma vision quelques secondes.
Pendant ce temps, le monstre s'était mis à califourchon sur moi et me fixai de son regard pénétrant.

Oui, pénétrant, c'était comme si grâce à la force de son regard, il pouvait entrer en moi. Prendre possession de mon âme, de mon esprit. Je me sentis fouillée de l'intérieur. J'essayai de repousser cette intrusion désagréable en me concentrant. Je sentis monter en moi un sentiment de force étrange et, comme par magie, mon agresseur fut projeté violemment contre un arbre. 
Il poussa un grognement bestial et s'écroula sur le côté en position fœtal.

Là, sur le sol les yeux fermés, il ressemblait tellement à un humain. 
Il releva la tête et me regarda de ses yeux d'un rouge profond où régnait une intense soif de sang. Mon sang. Non, il était tout sauf humain. 
Je me rendis soudain compte qu'un halo mauve m'entourai. Ça y est, je suis folle pensais-je.

Je me relevai et, prise d'un vertige, je manquai de retomber. Une fois que la terre eut fini de tourner, je me remis à courir de plus belle. 

Cette fois, j'arrivais au portail sans incident. Je me rendis tout de suite compte que la forêt m'avait de nouveau joué un tour. En effet, des racines, du lierre et des ronces s'étaient enroulées autour de la poignée et des barreaux, me privant de mon unique moyen de sortie. Pitié, non !me lamentais-je intérieurement.

Je ramenai une de mes mains contre ma poitrine, me concentrant dessus pour calmer les battements effrénés de mon cœur. Je me retournais ensuite pour vérifier que lui n'était pas revenu. La forêt était silencieuse, trop silencieuse. J'attendis encore un peu au cas où. Toujours rien, peut être mon coup l'avait-il mis KO ? 
Ou pensait-il finalement que mon sang n'en valait plus la peine et qu'il avait fait demi-tour pour terminer ce qu'il avait commencé avec Sarah ? Sarah... Je chassai ces idées lugubres de mon esprit. Je ne devais pas y penser, pas maintenant en tout cas.

Je commençai à escalader le portail, veillant à éviter le plus possible les épines. Je respirais laborieusement et je tremblais encore plus sous l'effort. Je m'appliquais à la tâche quand quelque chose vînt troubler ma concentration. Je mis plusieurs secondes avant de trouver quoi. 
Je me figeais. Une respiration se faisait entendre au-dessus de moi, et je pouvais facilement deviner l'identité de son propriétaire. Je relevai la tête avec une lenteur extrême.

J'eus le souffle coupé en me retrouvant à seulement quelques ridicules centimètres du visage de l'assassin. Sa bouche s'étira en un grand sourire carnassier, du sang perlait encore au bout de ses dents de tueur. Un feu de folie pur embrasait ses yeux. La proximité avec cet être me rendit folle et je voulus mettre le plus de distance possible entre nous alors je me laissais tomber.

La chute dura plus longtemps qu'elle n'aurait dû et le choc fut plus violent aussi. Le portail n'était pas petit mais tout de même ! Ce n'était pas normal mais en même temps tout était anormal ici. Seulement une fraction de seconde après que mon corps soit rentré en collision avec le sol tout devînt flou et je n'entendis plus qu'un sifflement strident dans mes oreilles. Une douce torpeur m'envahit soudainement.

J'essayais faiblement de me relever mais n'y parvînt pas.
Je n'avais plus de force et ma volonté était altérée par cette agréable sensation. Je pouvais à peine réfléchir quand le monstre se remit sur moi pour la deuxième fois et je ne réagis pas quand il me transperça de nouveau de son regard ignoble. 

J'étais calme, trop calme pour ce genre de situation, mais au moins je n'avais plus peur. Peur ? De quoi avais-je peur déjà ? Je n'arrivais plus à me rappeler. Je n'avais aucune raison d'avoir peur. J'allais mourir c'était inévitable mais je l'acceptais. Je pourrais rejoindre mon père. Je n'avais plus envie de résister. 
Les ténèbres m'appelaient pour me plonger dans un sommeil éternel et dieu sait ce que j'avais envie de dormir ! Ce serait tellement facile de me laisser aller, de lâcher prise.

Et ta mère ? Et Sarah et Buck et ton père ? dit une voix désespérée dans ma tête. Mes pensées s'éclaircirent peu à peu, cette voix avait raison ! Je ne devais pas abandonner ! Si j'avais la possibilité, la plus infime soit elle, de m'échapper, je devais la saisir. Il fallait que je me batte pour ma vie au nom de mes proches, les morts comme les vivants.

Je sortis brusquement de mon hébétude. La bête dut s'en rendre compte car elle me serra plus fort. J'essayais de me débattre comme une folle en poussant des cris de rage mais il était bien plus fort que moi. 
Il semblait se délecter de mon affolement. Il approcha dangereusement son visage du mien et je compris ce qu'il allait faire.

_ Noooooooooooon ! Hurlais-je à plein poumons.

Ça ne servit à rien et il mordit férocement dans mon avant-bras. Ses crocs s'enfonçant profondément dans ma chair.

La douleur était insoutenable et tout mon corps me brulait affreusement. Il suçait mon sang sans me quitter du regard. Il passa sa langue sur ma plaie à vif m'arrachant un gémissement et je vis sur son visage une expression de contentement.

Je me retins difficilement de vomir. J'étais définitivement perdue. Soudain, une ombre passa au-dessus de moi et renversa avec violence l'abomination, me dégageant de sa prise. Je regardai à côté de moi et vis...Buck !

Mon fidèle ami avait l'air d'être blesser à la pâte mais il était vivant ! Je me mis debout tant bien que mal. Buck se battait avec acharnement contre cette infamie mais il ne faisait pas le poids. Comment pouvais-je l'aider ? Je ne savais pas quoi faire. Je croisais brièvement le regard de mon chien, puis je compris. Si Buck était revenu c'était pour me sauver et me laisser le temps de m'enfuir. Il savait qu'il ne pourrait pas le battre mais il le faisait pour moi. Il se sacrifiait pour moi. L'horreur du moment me fit monter les larmes aux yeux. Même si Buck s'en sortait comment pourrait-il sortir d'ici ?

La seule solution était le portail et je ne pourrais pas le porter. 
Buck aboya, il commençait à fatigué et je ne servais à rien planter là comme une idiote. Je me remis à escalader le portail sans faire attention à ne pas me blesser cette fois.

Ce n'était rien comparé à la douleur dans mon bras ou de celle dans mon cœur. Arriver en haut, je me retournais une dernière fois et murmurais dans un sanglot :

_  Je n'oublierai jamais !

Je descendis ensuite l'autre côté et atterris sur la terre ferme. 
Je n'arrivais pas à croire que j'avais fait ça. Je venais d'abandonner Buck et Sarah. Je ne valais finalement peut-être pas mieux que lui.

Puis, comme la lâche que je suis, je m'enfuis encore une fois, sans un regard en arrière. Tandis que les larmes dévalaient sur mes joues et que j'apercevais enfin ma maison, je réalisais une chose : une partie de moi était aussi morte là-bas.

* Chapitre corrigé par Furflan ! *

Céleste : La forêt des cauchemarsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant