Ángelos |✔️

XII. Madilyn

— Encore ? C'est une blague...
« Sa tête montre pourtant bien qu'il est sérieux... » pensai-je.
— Je ne blague pas.
Je le regardai, sans dire un mot, puis me retournai en me grattant l'oreille. « Il n'est vraiment pas drôle, pas du tout »...
— La prochaine fois, je me révolterai ! criai-je. Moi aussi j'ai le droit de vivre.
— Obéis sans faire tant d'histoires.
— « Obéis sans faire tant d'histoires »... murmurai-je.
Il me regardait fixement tandis que je m'éloignais.

« Ces maudits démons aiment jouer... Je vais leur montrer, moi, comment jouer ! » À chaque fois, ce devait être pour moi. Toujours, toujours, toujours ! D'accord. Finissons ça sans faire tant d'histoires. Les supérieurs se jugeaient bien supérieurs ! « Ils pourraient, eux aussi, s'occuper des obligations et ne pas se contenter de donner des ordres... » Je sautai en étendant mes ailes, mis les mains sur mon visage et me laissai tomber. Vitesse... J'aimais cette sensation. Ça me calmait.

J'étais très visible dans l'obscurité, ce qui impliquait plus de problèmes. Je voyais la Terre obscure, obscure comme le ciel. « La nuit », pensai-je, tout en prenant la direction des satanées créatures. Arrivée à la cité, là où les démons se trouvaient, je me mis à parler toute seule, comme toujours. Je n'aimais pas travailler la nuit... J'étais très visible dans l'obscurité, ce qui impliquait plus de problèmes. Mais, au moins, les humains dormaient.

La lumière de la lune se reflétait sur le sol comme une toute petite et maléfique créature. Je m'approchai d'un pont. J'en vis deux se cacher dans les ombres.
— Sortez... Je veux seulement parler, d'accord ?
« Ils sont désespérants... » Je le savais, ils n'allaient pas sortir, c'était clair depuis le début. J'étais plus impatiente que d'habitude. « Vous l'avez cherché... » Je m'approchai plus rapidement du pont. Je les attrapai d'un coup, les soulevai en les regardant avec indifférence...
— Je vous plains. Mais avec les méchants, il faut être méchant.
Je fermai les yeux et je les envoyai là où ils devaient être. « Deux en moins », pensai-je. J'ouvris doucement les yeux. Je me mis à scruter les ombres, à la recherche d'autres démons quand, soudain, une voix me fit sursauter.
— Madilyn !
Je me tournai d'un coup et je regardai. Une fille se tenait là. La fille de la dernière fois ?
— Qui est là ?
— Lyn... prononça-t-elle encore avec sa voix claire qui réveilla en moi beaucoup, beaucoup de souvenirs.
« Cette voix... »
— Lia, arrête de chanter ! On a été envoyées là pour nettoyer ce parc, tu leur apprendras à chanter quand on rentrera.
— Mais laisse-nous, les démons chantent très mal. Chanter avec les oiseaux, c'est plus agréable.
— Ils crient.
— Quoi ?
— Les démons crient.
— Ils chantent, ma chère sœur, à leur manière, mais ils chantent.
— Oui, comme tu veux.
« Rien ne la fera changer, rien... Je ferais mieux de finir seule le nettoyage pour pouvoir rentrer... »
C'était sa voix... « Elle n'a pas changé », pensai-je.
— Lyn... Luc ne te manque pas ? Il me manque, à moi...
— Il ne me manque pas.
— Pourquoi ?
— À lui, je ne lui manque pas.
— Comment tu sais ça ?
— Il serait déjà venu s'il voulait me voir, si je lui manquais. Il fait toujours ce qu'il veut, tu ne te rappelles pas ?
— Ha ha ! Oui... C'est vrai, mais peut-être qu'il ne peut pas venir.
— Non. Il ne veut pas venir.
« Lucifer ne veut pas me voir, sinon il aurait trouvé un moyen pour le faire. » pensai-je. Et j'avais raison...
Oui, j'avais raison, je ne l'ai plus jamais revu, et c'était elle qui le remplaçait... « Elle m'a toujours fait penser à lui... » Mais quelque chose l'éloigna de moi.
— Mal. Très mal.
— Pourquoi parles-tu toute seule ?
— Je pense.
— Ah, oui ? Et à quoi ?
— À rien... dit-elle en souriant.
— J'espère que ce n'est vraiment rien, comment tu dis.
Son regard me disait bien le contraire...
Je n'aimais pas les secrets. « Ils m'ont tout caché et puis, ils ont disparu. »
— Luc ? Lollia ! Où est Lucifer ? Réponds !
— Je ne sais pas... Je ne sais vraiment pas !
— Lollia...
— Lyn...
« Ils ont disparu l'un après l'autre. »
— LOLLIAAAA !
Non... Elle n'avait pas disparu, elle... « Non ! Lollia n'a pas disparu ! »
— Tu n'as pas disparu.
Elle bougea la tête en faisant un signe de négation. Son sourire précéda deux grandes larmes qui coulèrent jusqu'à son menton.
— C'est vraiment toi ?
Elle bougea la tête, en faisant un signe affirmatif, cette fois.
— Tu as coupé tes cheveux... Je ne t'avais pas reconnue...
— Oui... dit-elle encore.
— Tu as changé. Tu es plus sensible, comme les humains que tu détestais tant. Pourquoi tu pleures comme ça ?
— Je ne peux pas m'en empêcher... Depuis que je suis là, mon cœur et mon corps sont plus sensibles, essaya-t-elle de dire, sans cesser davantage de pleurer.
— Tes ailes ont vraiment disparu... Je n'avais pas rêvé, la dernière fois.
— Oui...
Elle n'avait pas changé, cette voix était sûrement la seule chose qui restait de la Lollia que je connaissais...
— Tu... Tu as trouvé ce que tu cherchais... ? Ta curiosité a-t-elle été satisfaite ?
— Oui...
Elle semblait de plus en plus triste, son sourire commençait à disparaître.
— Je suis contente d'entendre ça, Lia.
Je lui souris. Elle se noya dans son chagrin, elle n'arrivait pas à retenir ses larmes. Elle n'y arrivait pas du tout. Je me rapprochai d'elle, posai mes bras sur elle et je la serrai doucement. Je couvris nos corps de mes ailes. Du sien, émanait encore la chaleur d'un ange. Cela non plus n'avait pas changé.
— Tu vis bien ?
— Lyn... Tu m'as beaucoup manqué... Tu crois que je vis bien ?
Elle n'arrêtait pas de pleurer tandis que mes yeux, eux, commençaient à me picoter. Finalement, une larme coula tout au long de ma joue. Ça devait arriver, même les anges pleurent...
La pluie commença à tomber.
— Tu veux revenir ?
— Je ne sais pas, Lyn... Même si je voulais, comment ? Comment faire ?
— Lollia...
Je ne savais que dire, je ne savais ni que faire, ni que dire. Ça ne servait à rien.
— Lyn...
Que dire ? Que faire... Je ne savais pas... Je ne savais vraiment pas comment résoudre ce problème...