1-Louis

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WE'RE CRAZY, BUT NICE.
Ou comment vous demander dans quel livre de fou-furieux vous êtes tombés.



Est-ce possible d'avoir l'air plus minable que moi en ce moment ? Honnêtement, je ne pense pas. Je ressemble à... un raisin qui hésite entre rester frais ou devenir sec. Vous voyez, le truc moche, là ? Bah, voilà, c'est exactement ça. Je suis en décomposition sur mon canapé, mes fesses qui menacent de glisser et de s'écrouler sur le sol, mes jambes étendues devant moi. Mes yeux mi-clos, par manque d'intérêt pour la télé en face de moi, manquent à plusieurs reprises de se fermer de bon. Les images pixélisées, que je vois sans regarder, diffusent des lumières colorées dans la pénombre et sur mon visage morne et ennuyé. Elle racontent une histoire inintéressante, que j'ai depuis longtemps arrêté de suivre, parce que, justement, c'était inintéressant. La télécommande est échouée près de moi, ce qui accentue l'image lamentable que je renvoi.

Mais c'est vrai quoi, l'Auteure aurait pu trouver une situation plus originale comme début, qui m'aurait plus mis en valeur, vous ne trouvez pas ? Moi, échoué sur mon canapé, avec la solitude pour seule compagnie... C'est fichtrement banale, comme scène. Et les Lecteurs ne veulent pas lire une histoire similaire à la leur, et à des milliards d'autres. Mais bon, je ne suis qu'un personnage, c'est ça ? Et donc je suis sensé fermer ma gueule, je sais, j'ai compris. Et bien, faites comme si je n'avais rien dit ! Après tout, il n'est peut-être pas trop tard !

Ha ! Je te signale que je suis l'Auteure ! Je vois tout ! Donc on va faire « comme si », pour cette fois. Contente-toi de suivre le Texte, et ne dérive pas !

Ça va ! Si on a plus le droit de s'exprimer ! Enfin, je reprends :

Bon, je vous rassure tout de suite, cet état misérable n'est qu'extérieur. Parce qu'à l'intérieur, je jubile. Disons plutôt que je suis impatient de jubiler. Et oui, parce que, ce soir, c'est soirée film entre amoureux ! Mais bon, en attendant, je m'occupe comme je peux -d'où l'état déplorable dans lequel je suis. Depuis tout à l'heure, j'ai l'impression d'être un Gif. Vous savez, la petite vidéo qui se rejoue en boucle ? Voilà, et bien, d'après l'Auteure, j'en suis un. Comparaison étrange, c'est vrai, mais elle n'a rien trouvé de mieux que ça, alors, c'est auprès d'elle qu'il faut se plaindre. Madame dit que, comme je ne fais que jeter des coups d'œil à l'horloge, puis pousser un soupir, parce que c'est la troisième fois que je la regarde dans la même minute ; je ressemble à un Gif : répétitif, et lassant, au bout d'un moment. Sérieusement, elle exagère. Je ne suis pas lassant.

Enfin bref, je disais donc... Oui ! Voilà. Soirée film. Qui n'en rêve pas ? Blottit l'un contre l'autre, devant le blockbuster du dimanche soir. Cliché ? Peut-être. Et encore, on n'a pas le pop-corn. Pas qu'on ne veuille pas faire comme tout le monde, loin de là... C'est juste que les « crunsh crunsh » nous empêchent de suivre le film, que ces saletés s'incrustent entre les dents, et que, du coup, c'est pas pratique pour s'embrasser. Si vous ne le saviez pas, le pop-corn est le Tue-L'amour numéro un.
Voilà, c'étaient toutes les raisons de pourquoi notre couple ne mange JAMAIS de pop-corn pendant un film. Oui, je sais que ça ne sert à rien, que ça vous intéresse pas, que vous n'en avez littéralement rien à foutre, mais je croyais vous avoir prévenus, je m'ennuie. Alors autant s'ennuyer à plusieurs, vous ne croyez pas ?

Le Texte, Louis, le Texte !

Oui oui, le Texte ! Donc, hum...

Un « ding dong » sonore couvre le bruit du téléviseur, puis résonne dans la maison. Alléluia ! Adieu l'ennui ! À moi les câlins ! Et, soyons clairs, je m'en fiche si j'ai l'air d'un bébé en manque d'amour, d'accord ?
Je saute sur mes pieds, et ignore les fourmis qui montent le long de mes jambes. Ça m'apprendra à rester dans une position de beauf pendant si longtemps...
Je bataille quelques secondes avec la porte et les clefs qui y pendent, mais finit par l'ouvrir sur mon petit-ami. Non non, ce n'est pas une faute de frappe. C'est bien écrit "petit-ami". Parce que, oui, je suis gay. Encore au placard, certes, mais pas moins homo. J'espère, réellement, que ça ne vous dérange pas. Et, si c'est le cas, j'en suis désolé pour vous, car vous devez avoir un esprit étroit. Ou être berné par des idéologies.
Donc, revenons-en au texte, comme dirais notre chère Auteure.

I Saw It In Your Eyes. [L.S] ARRÊTÉEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant