4- Harry

174 27 153
                                    

PLUS D'AMOUR QUE DE MAL
Ou comment trouver ce titre très puéril.



Je viens vraiment de rêver d'un souvenirs ? Je ne savais même pas que c'était possible. En tout cas, vous savez désormais comment tout ça a commencé. Juste une petite soirée étudiante, un peu trop d'alcool, et me voilà inerte, frappé à mort.

C'est la première chose à laquelle je pense quand je reprends conscience, alors que quelque chose de dur et de froid est plaqué sur tout le côté droit de ma tête. J'entrouvre mes yeux, mais laisse la barrière de mes cils filtrer l'éclairage extérieur. Des dizaines de petites piqûres s'enfoncent dans ma joue, et je bouge les traits de mon visage, plisse le nez, pour comprendre ce que c'est. Après plusieurs secondes, je réalise que ce sont des cailloux, de minuscules petites pierres, qui écrasent ma peau. Soudain, une intense migraine déferle sur mon crâne, et je gémis et grimace sous l'importante et surprenante douleur, en refermant les yeux précipitamment, comme si ça pouvait m'apporter un quelconque soulagement.

Bon, ok. On va faire les choses dans l'ordre.
Premièrement : je suis où ? Mes paupières deviennent deux fentes, qui laissent apparaître une partie de mes pupilles. Elles bougent de droite à gauche, coulissent sur le petit espace découvert, pour deviner mon emplacement. Je vois une grande étendue noire, comme une plaine charbonneuse interminable, qui occupe toute la partie droite de mon champs de vision. Elle est parsemée d'imperceptibles roches, aussi ébène qu'elle, et c'est sûrement ce que je dois sentir sur ma pommette. Mais qu'est ce que c'est ? Je fronce les sourcils. On dirait... un... sol ..? Soudain, tout tourne, bascule, comme si mon oreille interne bougeait de quatre-vingt-dix degrés, et je prends conscience que tout mon corps est étendu sur ce parterre de goudron, ma tête reposant contre le béton. Encore quelques instants, et je me sens capable de bouger mes membres. Je plie alors mes doigts de pieds, pour vérifier qu'ils sont toujours sous mon contrôle. De toute évidence, ils le sont, puisqu'ils exécutent mon ordre, se tordant dans le maigre espace qu'offre le bout de mes bottines. Finalement, je finis par cligner des yeux, puis par les ouvrir complètement, m'habituant pendant plusieurs secondes à l'agressive lumière de l'environnement. Avec un plus large champ de vision, je laisse mes yeux coulisser plus loin sur le sol, et aperçois... des chaussures en tous genre, toutes pointées vers moi. Par centaine, elles semblent hébétées, se balançant d'une semelle à une autre ; par centaine, elle forme un demi-cercle oppressant, devant la seule et unique victime ici. Je remonte le long de ces jambes bien trop nombreuses, observe ces personnes, ces visages qui me regardent avec des yeux mêlant la pitié à l'inquiétude, la curiosité à l'incompréhension... Est-ce ceux à quoi je suis destiné ? Je ne vaux que ça ? De la pitié ? De l'inquiétude ? Je ne suis pas une bête de foire, bon sang ! Ça se voit, non ? Alors pourquoi me scrutent ils de cette façon ? Je mérite mieux, je pense - et j'espère. Et pourtant, pourtant... Ces visages... Je les connais. Ils me semble comme... familiers. Je réfléchis, fais tourner les méninges de mon cerveau tout juste réveillé, qui carbure sous ma douleur crânienne. Mais oui ! Ce sont les mêmes étudiants que ceux de ma fac ! Fac !? Euh... Wow... On rembobine tout ! Qu'est ce que je fous ici ? Ha oui, pardon. On avait dit : les choses dans l'ordre.

Deuxièmement : pourquoi je suis allongé sur le sol !? Tout d'un coup, j'entends des gémissements. Non, pas les gémissements auxquelles vous pensez, petits pervers... On dirait... des plaintes. Il y a aussi les bruits secs et reconnaissables de... coups de poings ? Je délire ou quoi ? Je ne peux rien voir, toute l'action se passe dans mon dos. J'essaie de me retourner, mais à peine ai-je entrepris mon mouvement, qu'une douleur lancinante me déchire la poitrine, et réveille des crampes dans mes membres. Je gémis, mais rien que cette action me fait encore plus mal à la tête. Alors je prends une profonde inspiration, avant de me stopper d'un seul coup. La douleur déjà oppressante dans mon torse, se multiplie, et je sens des choses étranges au niveau de mes côtes, ce qui me fais encore plus paniquer. J'halète, sous la douleur de ma poitrine, et pour extérioriser ce mal de tête, puisque je ne peux pas crier. Mais même comme ça, même comme ça, j'ai besoin de tout lâcher. Parce que je me souviens de ce que je fou ici, allongé et exposé aux regards trop curieux. Je me souviens que trop bien de ces coups, de cette amère humiliation, de ces insultes abjectes, de ses propos abominables, dégoûtant, m'écœurants de ma propre espèce. Ils m'ont mis dans cette état là, juste pour donner raison à leur propos déraisonnables : ils m'ont traiter de misérable ; ils m'ont rendu misérable. Alors je pleure. J'en ai tous les droits, toutes les raisons, vous ne croyez pas ?.. Je lâche des sanglots pitoyables, lamentables, minables, qui ne me font que d'avantage mal, sous mon tee-shirt et mes cheveux. Je n'en peux plus, je ne sais pas comment faire. C'est un cercle vicieux : je dois exprimer ce trop plein de douleur, mais dès que je le fais, j'ai encore plus mal. J'ai la tête qui tourne sous l'effort de souffrir, sous cette crise de sanglots que je n'arrive pas à arrêter. J'ai besoin d'aide, d'une main tendue... D'une main tendue... Oui, exactement comme elle, devant moi. Attendez... Quoi !? Je regarde ces doigts rugueux, ornés d'ongles coupés courts. Et je la dévisage, je l'agrippe et je me relève, j'essuie ces larmes ridicules qui blessent mon ego, et je me dresse, enfin, fière et stable sur mes deux jambes écorchées.... C'est faux. Je ne fais rien de tout ça. Je suis toujours sur ce béton inconfortable, tremblant, faible, sanglotant et observant ma sauveuse à travers mes larmes, qui la rendent floue et irréelle.

I Saw It In Your Eyes. [L.S] ARRÊTÉEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant