Chapitre 9.

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Un peu moins de deux ans s'étaient écoulés depuis ma première rencontre avec Louis. J'allais avoir onze ans demain. Malheureusement, il restait toujours autant muet. Par contre, Matthieu se rapprochait beaucoup de moi. Tant mieux. J'avais besoin d'une présence pour m'aider à tenir le coup. Malgré les apparences, la vie que je menais était douloureuse. Certes, les nombreux enfants dans le monde qui se contentaient d'un maigre repas par jour étaient plus à plaindre que moi mais n'étant pas élevée sans mes proches, la situation devenait délicate à supporter. Heureusement qu'Hélène m'appréciait et c'était réciproque. Je la voyais vraiment comme ma seconde maman. Ici, c'était un peu comme la tutrice de tout le monde mais je sentais bien qu'elle était plus proche de moi, et par conséquent du garçon aux yeux bleus. Elle essayait de le faire parler un peu pour que l'on puisse entamer de véritables conversations. Ses tentatives restaient vaines, Louis avait toujours quelque chose qui l'empêchait de nouer des liens avec les autres. Hélène me décrivait comme quelqu'un de très humain. C'était peut être parce que je m'en voulais autant de ne pas réussir à l'aider. J'ai besoin de connaître son histoire, la manière dont il a perdu sa famille, pourquoi il est assis toute la journée à côté de la même fenêtre. Comme toujours, je dépensais beaucoup de mes heures à être présente pour Louis. Je trouvais ça étrange que je sois plus proche de lui que de Matthieu. Il y avait ce lien invisible qui nous reliait. Je ne saurais pas l'expliquer mais ça me plaisait. Bien sûr, j'aurais rêvé qu'il soit plus bavard, mais je ne pouvais rien y changer. Du moins, pour l'instant.

Hélène avait fait des gâteaux pour le déjeuner de ce midi. Deux au chocolat, sachant qu'ils plairaient à la majorité d'entre nous, un cake aux pommes et une tarte au citron ornée de onze bougies. Elle avait bien pris note de ce que j'aimais, elle était vraiment attentive à chacun de ses protégés. L'an dernier, elle m'avait expliqué qu'elle n'avait rien pu faire parce qu'elle était occupée à préparer le départ de Zachary et Logan, deux jumeaux qui avaient été recueillis par Liam et Harry. Je ne lui en avais pas voulu, elle faisait beaucoup pour moi et la priorité ici était les enfants. Elle m'avait promis qu'elle se rattraperait l'année suivante et effectivement c'était réussi. Tous les pensionnaires m'avaient souhaité un bon anniversaire et j'avais eu droit à une bonne dose de sourires aux dents blanches. Il faut dire ce qui est, je n'avais aucun mal à être appréciée. J'avais été surprise parce que Louis s'était levé pour venir autour de la table. Il  m'avait même fait un sourire, un peu timide certes, mais c'était un gros effort pour lui. J'avais apprécié son geste. Chaque personne présente riait, ça faisait du bien d'avoir une atmosphère aussi détendue, ne serait ce que pour une journée. Alors que nous avions à peine terminé notre dessert, Hélène s'est avancée et elle m'a tendu un paquet. Elle m'a dit que je n'étais pas obligée de l'ouvrir directement, tant mieux, je préférais attendre d'être seule. Je ne sais pas pourquoi mais ça me semblait être plus respectueux vis à vis des autres.

Je jetai un coup d'oeil à ma montre. Vingt et une heure cinquante quatre. J'étais dans ma chambre depuis quelques temps maintenant. Je repensais à cette journée qui avait été la meilleure depuis mon arrivée ici. La directrice avait eu une super idée. J'avais vraiment besoin d'un anniversaire "comme avant". Juste un gâteau avec des bougies. C'était simple mais ça avait fait son effet sur tout le monde. Ça m'avait rappelé de bons souvenirs. J'avais le cadeau d'Hélène dans les mains. J'hésitais à l'ouvrir. Elle n'avait pas à me gâter comme ça. Elle ne le faisait pas avec les autres, je ne vois pas pourquoi elle devrait m'accorder plus de privilèges, être plus clémente ou plus aimable avec moi. Il faudrait que je me renseigne, je trouve ça bizarre. C'est triste pour tout les autres...

Vingt deux heures trente et une. Je me décide enfin à déchirer le papier qui recouvrait la boîte. En voyant son contenu, j'écarquillais les yeux. Un cahier avec une couverture de cuir brun, des stylos, des crayons, et le plus étonnant : deux lettres. Je ne pouvais pas rêver mieux pour l'instant. Je n'avais pas écrit depuis que j'avais quitté ma maison. Ça me manquait beaucoup mais je n'avais pas de feuilles dans les tiroirs de ma table de nuit et je ne souhaitais pas écrire dans la salle commune. Je n'aime pas qu'on lise mes textes. Un immense sourire avait pris place sur mes lèvres mais aussitôt il fut remplacé par une moue dubitative. Qui pouvait m'envoyer des lettres ?

I Miss You. [En Pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant