Un grenier convoité (Esther) réécrit

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Aujourd'hui il faisait beau dehors. ou du moins nous imaginons qu'il fasse beau. Un vent de chaleur souffla dans notre "caverne d'Ali Baba" comme monsieur Gunther aimait tant l'appeler, et le parquet, habituellement glacée, dégageait une chaleur et convivialité si douce et forte à la fois que nous étions tous pieds nus, à nous en imprégner.

Dans la salle commune, chacun de nous était là, vaquant à différentes activités. Monsieur Benjamin cirait les chaussures de tout le monde, comme si on allait nous annoncer dès ce soir que nous étions libres, madame Sarah elle, était en train de recoudre les chaussettes de son époux, trouées au niveau de la plante de pied. Monsieur Gunther et père tentaient tant bien que mal de mettre de l'ordre dans la pièce en faisant le tri de ce dont on avait besoin et ce qui n'était plus utilisable, pour au final tout remettre en place, l'idée de se séparer de la moindre babiole étant trop dur a supporter. Monsieur Willem découpait toute sorte de légumes avec mere, et tous deux sentaient le contenu de différents pots à épices que nous avions emportés avec nous en arrivant ici, dans l'espoir de trouver l'ingrédient secret qui permettra à cette potée de choux frisés d'être un peu plus mangeable. Aria quant à elle se tenait près de madame Sarah, et faisait de la broderie, montrant à cette dernière les différents points et lui demandant des avis et conseils pour comment tenir l'aiguille ou comment elle avait réussi à parfaire son point de tige. Enfin, Isaiah était là, une pièce de monnaie qu'il faisait passer d'un doigt à l'autre et qu'il lançait au ciel par moment, le regard perdu, tandis que je pliais le linge.

Nous sommes aujourd'hui le 29 janvier 1943.
Compter les jours, les nommer chaque matin m'aide à croire en une possible liberté prochaine. Cela peut paraître bête, mais dans notre situation, on s'accroche à chaque lueur d'espoir, chaque bout de corde que l'on trouve et qui pourrait nous aider à sortir la tête de l'eau.

Aria vint s'asseoir près de moi, afin de me montrer la fleur qu'elle brodait sur le veston bleu qu'elle aimait autrefois tant. Son enthousiasme était presque contagieux.
- Elle est magnifique Aria! Pourra tu me broder la même sur mon veston vert?
- Oui! Bien sûr! Je vais le chercher maintenant.
Elle se leva, prise d'un élan incroyable, puis se retourna, m'enlaça et alla chercher mon veston. Elle était si gentille, si douce. À quel moment pouvait on pensé qu'une fille aussi douce qu'elle pouvait représenter un danger? Je n'arrivais pas à le concevoir.

Mais apparemment c'était le cas. Aria revint s'asseoir près de moi et me demanda si j'avais besoin d'aide. Elle proposer toujours son aide, même si on ne le lui demander pas. Mais je n'avais pas besoin de son aide.
A vrai dire, son excès de gentillesse avait tendance à m'insupporté assez vite. Je sais qu'elle se proposait de bonne foi, mais comment était il possible d'être aussi gentille. Je n'arrivais pas à le concevoir. Mais j'essayer d'être gentille avec elle. Vraiment.
Je pliais les dernières chaussettes de l'énorme panier que madame Sarah on avait donné puis je me leva en prenant dans mes bras la pile de chemisiers pliés que j'avais déposé sur le tapis.
-Je vais rendre les vêtements à leurs places.Quelqu'un a une demande spéciale?
- Oui Esther. C'était madame Sarah qui parlé. Pourra tu poser mes vêtements sur la table dans ma chambre?
Pas besoin de répondre. Bien sûr que j'allais le faire. Au moment où je me retournais, Isaiah se leva, agrippa la pile de jupes et vint vers moi.
- Je vais l'aider à ranger.
- Je peux le faire, dit Aria.
- Non c'est bon je vais le faire
Dans le petit couloir, déjà étroit, Isaiah vint se mettre à mon niveau ce qui rendait presque notre passage impossible. Il ouvrit la porte de la chambre de ses parents et entra dans la pièce, déposant au passage la pile de jupe sur la table dont parler madame Sarah tout à l'heure et s'affala sur le lit qui occupait presque toute la pièce. Pendant que je rendais les chemises de son père dans l'armoire, Isaiah releva la tête et se mit à me regarder.
- Pourquoi être venu si vous ne m'aidez même pas?
- Esther arrête de me vouvoyez!
- Pourquoi donc? Que je sache, nous ne sommes pas amis et aucun lien ne nous lie.
- Nous vivons dans une maison ensemble. Bien évidemment qu'un lien, très fort même, nous lie.
Je ne supportais pas quand il avait raison. Je pris les jupes, déposa sur la table ce qui appartenait à madame Sarah comme elle me l'avait demandé et sorti de la pièce. Mais Isaiah ne semblait pas du même avis. Il retenait mon poignée de sa main, le corps étiré tout le long du lit.
- Esther, j'ai une demande à te faire.
- Quoi donc?
- Est ce que je pourrais utiliser de temps à autre le petit coin dans le grenier. Je ne supporte plus le fait de dormir dans la grande pièce. Messieurs Willem et Gunther sont réellement gentils, mais ils restent un couple et je me sens de trop parmi eux.
Je le regardai longuement. Il me faisait de la peine. Cette situation ne doit pas être facile pour lui, d'autant plus qu'en étant fils unique, il n'y avait aucune chance qu'il partageait sa chambre.
-Tu veux dire que tu veux commencer à dormir là bas?
- Eh bien... oui c'est ça. Je sais que ce n'est pas très gentil de ma part et que c'est ton...
- J'accepte.
- Vraiment?
- Oui mais à condition que, le journée, je puisse aller y lire ou peu importe d'ailleurs.
- Oui oui, bien sûr que oui. Merci beaucoup.
Il se leva d'un bond et m'enlaça. Il resseré son étreinte, tandis que les bras pendaient le long de mon corps. Que faisait-il?
Ses bras exercés une pression assez forte sur les épaules, et je sentais ses mains dans mon dos. Il sentait un mélange d'eau de Cologne et de menthe poivrée. Son étreinte était agréable, mais j'y mît fin assez rapidement.
Avant de refermer la porte il murmura « merci ».

1943 (En réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant