Chapitre 2 : Son blouson

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Le portail gris se dresse devant moi, me dominant de toute sa hauteur.Je ne lui avais jamais portée aucune attention jusqu'à présent, mais aujourd'hui il semble prendre sa revanche sur moi, indigne mortelle qui jusqu'à maintenant foulait les pieds de ce divin sanctuaire qu'est le lycée sans se soucier de lui, fidèle et vieux gardien de ce lieu de perdition où nombre d'entre nous y laissèrent leurs vies.

Il semble me toiser fièrement, riant de mon malheur. Il se moque de moi, pauvre petite fille trempée jusqu'aux os. Mon école est plus sinistre que jamais, avec sa vieille façade bétonnée et la pluie battante s'abattant sans-pitié sur les fenêtres obsolètes de la cantine. Rageusement, je franchis l'entrée en courant. Il n'y a même pas cinq minutes que c'est la rentrée et j'ai déjà réussi à être en retard. Tout ça à cause de ce foutu blouson noir. En le voyant ainsi roulé en boule dans ma garde-robe, je n'avais pu retenir mes larmes. Mes épaules avaient été saisis de tremblements incontrôlables, et j'avais chialé comme ça, par terre, le blouson serré fort, très fort contre ma poitrine. Tellement fort et tellement longtemps que je n'avais pas vu l'heure passée. C'est mon frère qui, timidement, avait toqué contre ma porte, et m'avais murmuré:

-Kim, il est 7H49... Tu vas être en retard.
-Laisse-moi tranquille.

Une légère teinte rouge colora ses joues pâles. Je me mordis les lèvres, sentant que j'avais été trop sèche. Tout en essuyant mes larmes, je lui fis un signe de main, l'encourageant à approcher. Il se réfugia entre mes bras, et lentement, je le berçai, jusqu'à ce qu'il s'endorme entre mes draps. Voilà, c'est comme ça que j'ai été amené à arriver avec douze minutes de retard dans ma salle de classe, trempée jusqu'aux os et avec trente paires de yeux fixés sur mes yeux rougis et sur son blouson noir. Le blouson de la défunte Ana.

Ma vie en grandOù les histoires vivent. Découvrez maintenant