"En famille tout ce sait mais rien ne se dit" Jean Gouny

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-Je suis désolée... Personne ne t'a prévenue?

-Non, personne...

La voisine de maman semble mal à l'aise, ça se voit, elle joue avec ses doigts et son regard est fuyant. Elle s'assoit en face de moi et pose maladroitement son coude sur la table pour se donner de l'allure.

-Ça fait deux jours, on l'enterre demain. Je pensais que tu avais de la famille ou... Je suis encore désolée Gaïa.

Je secoue la tête, lourde mais pourtant vide de pensées. le dos courbé les coudes sur les genoux et les mains jointes je fixe le sol carrelé blanc. J'entends la respiration rapide du chien de Pauline qui tourne autour de ses jambes. Elle pose sa main sur mon avant bras et je me redresse.

-Je ne sais pas quoi te dire Gaïa, je ne sais pas si... enfin peut-être t'a t-elle laisser des affaires... comment on dit déjà? Un testament?

-Oui sûrement.

Je renifle et me lève enfin, je la remercie de m'avoir prévenu lui demande l'heure et l'endroit de l'enterrement. Demain, jeudi à 14h30 à l'Eglise Sainte Claire. Elle me donne encore une dernière fois ses condoléances et je quitte l'appartement, à cet instant je me sens complètement perdue, je ne sais plus où aller ni quoi faire. Le visage de ma mère semble être imprimé sur ma rétine et de partout où mon regard se pose je la voit. Ses traits fins, ses yeux verts et ses cheveux châtains. Je l'admet enfin, j'ai envie de pleurer.

Je m'installe au volant de ma voiture. Tout ces kilomètres, cette rage et ce dégoût que j'avais en arrivant ici c'est dissiper en un instant. J'essaie de me repasser les films de mon enfance et mon adolescence chaotique, je me refait nos disputes et mes claquages de portes. Je revois ses compagnons et ses bouteilles, ses paquets de cigarettes sur la table de la cuisine et ses cernes sous les yeux. J'entends le son de sa voix, de ses cris de ses rires et de ses pleures. Je revois ses mains vieillit, ses doigts jaunit et ses ongles courts mais avant tout je sens, hume, les parfums qu'elle mettait. L'odeur que j'aimais tant, celle qui me rappelle les bons moments...

Une larme coule sur ma joue que j'essuie du revers de la main. Je m'ordonne d'arrêter de penser à tout ça et met le contact direction l'hôtel le plus proche.

* *

*

J'ai tellement mal à la tête, tellement mal au cœur. Je me laisse tomber lourdement sur le lit, les mains sur les yeux. Les émotions me submergent et je craque. Comme lorsque l'on a plus de force, que notre corps nous fait souffrir et qu'un millier d'aiguilles nous transpercent le cœur. Je pleure de toutes mes forces, les sanglots m'ébranle j'ai l'impression d'étouffer. "Maman" maman que m'a tu fais? Pourquoi ne m'a tu pas retenue?

Mes pleures raisonnent dans la chambre comme celui de mes cris intérieur, être seule, orpheline, en colère.

Je me ressaisie au bout d'un quart d'heure, les larmes ne coulent plus mais mes yeux me brûlent et ma poitrine me fait souffrir. Je décide alors de prendre un bain pensant que cela pourrais me détendre. Je pénètre dans la salle de bain et me regarde dans le miroir, tout se bouscule dans mes pensées. Les lettres. La mort de ma mère. Aucune explication. Je me trouve laide, j'enlève mes habilles en faisant couler l'eau du bain. M'installant dedans je regarde l'eau couler du robinet et ne songe qu'à ne plus songer.

Il est 18h quand je sors du bain. Les doigts fripés je me sens las, étourdis c'est alors que mon portable ce met à sonner, le numéro affiché m'est inconnus je décroche mais ne parle pas.

-Allô? Gaïa?

-Ou... Oui c'est moi? Dis-je en m'éclaircissant la voix.

-C'est Loucas... T'es où?

Je retiens mes larmes du mieux que je peux mais ma voix me trahis.

-Je... Désolé Loucas je ne suis pas très bien.

-Qu'est ce qu'il y a? Réplique t-il d'un ton affolé.

-Ma... ma mère est morte... Dis je en laissant couler quelques larmes brûlante.

Mon interlocuteur ne parle plus. je m'assois sur le bord de la baignoire enroulée d'une serviette et renifle comme une enfant.

-Putain Gaïa je sais pas quoi dire.

-Lou je suis perdue.

-Sois forte déesse. Je... putain c'est chaud... Comment? Enfin comment tu l'a sue?

-Le destin...

-Comment ça le destin?

-J'étais dans le bureau de mon père Lundi dernier et j'ai... j'ai fais une découverte... enfin j'étais grave en colère contre elle et j'étais partie la voir pour... Ma voix se casse et Lou comprend aussitôt.

-Gaïa? Gaïa? écoute moi s'il te plait. Je t'interdit de t'en vouloir, je t'interdit d'avoir des remords. Je t'en supplie dès que tu reviens viens direct chez moi et nous poserons les choses calmement. D'accord?

-hum...

Je n'arrive plus a stopper mes soubresauts, comme une enfant qui a un gros chagrin et qui se fait réconforter je m'apaise au fur et mesure que Loucas me parle.

-Bon mon cœur je dois te laisser Jeff m'attends... Toutes mes condoléances.

-Merci, a plus tard.

Je raccroche et essuie mon visage avec la serviette. Je regarde l'heure sur mon smartphone il est 18h32 et j'ai juste envie de tout oublier. Le regard dans le vide je pense a tout et a rien en particulier et quelques minutes plus tard je sombre dans un profond sommeil.

Les parapluies noirsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant