La Consœur

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Vesta n'avait pas menti, elle amena l'enfant à la Confrérie. Même si Melody se demandait bien ce que la Confrérie pouvait être.

Ça ressemblait à une immense bâtisse aux pierres très bien alignées. Érigées gracieusement vers un ciel bleu-azur, ses multiples et exubérantes tourelles en moucharabieh laissèrent la fillette bouche bée, émerveillée. Elle n'avait jamais connu que la nature et sa petite maison. Cet endroit, c'était comme si les plus beaux châteaux et les plus beaux palais de tous les livres qu'elle avait lus s'y étaient donné rendez-vous.

Vesta les avait fait apparaître dans une cour entourée par l'édifice et bordée de rangées de statues que Melody trouva à la fois exotiques et splendides. Même si ça représentait des gens tout nus. D'une pression sur l'épaule, la Consœur l'entraîna sous une arche. L'enfant leva la tête pour apercevoir un dragon de pierre cracher du feu de pierre sur une salamandre de pierre.

Au bout de quelques pas, de l'autre côté de la voûte, le monde changea. Le ciel avait repris une couleur gris claire plus habituelle. Elles marchaient à présent à travers une succession de jardins, ornés de fontaines et quadrillés de parterres de graviers, qui menaient vers de nouvelles parties de la bâtisse.

Elles croisèrent de nombreux Confrères, mais personne ne sembla leur prêter attention. Ils portaient tous la même cape rouge. Ou presque la même cape rouge. En fait, la couleur était différente, même si ça ne se voyait pas au premier coup d'œil.

« Pourquoi est-ce que vous n'avez pas tous la même cape ?

— Parce que nous n'avons pas tous le même rang. Suis-moi !

— Non. Je m'en fiche de ta confrérie. Je veux pas y aller. Je dois rejoindre les loups-garous pour que mon père me retrouve là-bas.

— Ta famille est ici. »

Le visage de Melody s'illumina d'un sourire plus large que sa bouche. D'un seul coup, elle se sentit beaucoup plus motivée pour suivre Maître Vesta. Elles marchèrent encore de longues minutes dans les jardins et atteignirent une magnifique porte, rouge elle aussi.

« Pourquoi Perle s'est transformée en monstre ? » demanda-t-elle en constatant que ce passage n'était orné que de fleurs et de plantes.

Le dragon de tout à l'heure était plus impressionnant.

« Perle ?

— Le lapin-monstre. Je l'ai appelée Perle à cause de sa fourrure, expliqua la gamine.

— C'était un Changeur, pas un lapin. C'est un être qui se nourrissait de ta magie. Et à voir comment il tremblait, tu as dû lui en fournir assez pour l'année à venir. Si les vampires s'étaient un peu renseignés sur la région, ils auraient su qu'il n'y a pas de lapins en Bourgogne. »

Melody fronça les sourcils. Elles avançaient maintenant dans un couloir, tout en arches et en ogives blanches et rouille. Pensive, elle murmura :

« Alors, peut-être qu'ils se sont aussi trompés, pour les sorciers...

— Pour les sorciers ? questionna Vesta, la main sur la poignée d'une nouvelle porte.

— Les vampires, ils ont dit que c'était les sorciers qui étaient responsables de la pluie. C'est vrai ? »

Vesta s'immobilisa et fixa l'enfant. La colère qui se dessina sur son visage glaça Melody plus encore que celle de Mary. Mais elle n'eut pas beaucoup le temps d'y prêter attention, car dans la pièce, entre une belle et grande fenêtre ouverte sur les jardins, un canapé rouge et une petite table, il y avait son père, assis sur une chaise.

Melody, huit ans, deux vampires et l'apocalypseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant