Chapitre 14

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Chrysta se lève et vient m'enlacer pendant que je murmure un petit "oui".

" Tu ne m'avais pas dit que tu jouais du piano, je souffle la voix éraillée.

- Tu m'avais pas dit que tu chantais, me rétorque-t-elle."

Un gros silence s'installe dans la pièce destinée à le chasser.

Chrysta se décale et tend le bras pour sortir une bouteille de l'arrière du piano. C'est de la Vodka.

" T'en veux ? elle me propose.

- Non ça va aller, merci."

Elle hoche la tête et entreprend de l'ouvrir.

" N'importe quoi ! je la gronde. Tu ne vas pas boire ça quand même ? "

Je lui arrache la bouteille des mains et vais la ranger.

" Pourquoi ? s'énerve-t-elle.

- Tu vas être complètement saoûle ce soir pour le dîner !

- Rien à faire..."

Elle soupire puis quitte la pièce.

" Où vas-tu ? je lui demande.

- Essayer la baignoire ! "

J'avais envie qu'elle reste avec moi. Juste pour que je sois avec elle.
Peu après, je l'imite et quitte la pièce.
Un besoin puissant de dessiner hurle alors dans ma tête, dans mon coeur, dans toutes les parties de mon coeur.
Il doit bien y avoir de quoi dessiner dans le salon !

J'y cours tellement l'envie est forte et j'y trouve une grande étagère en bois où sont entassés des piles de carnets neufs et des boîtes de crayons.

La quantité de fournitures est si impressionnante que je m'étonne de ne pas l'avoir remarqué quand je suis rentrée !

Je tire un grand carnet aux feuilles brunes, une boite de crayons d'aquarelle et me jette sur un fauteuil.
J'attrappe le premier crayon de la boîte : il est bleu, bleu turquoise. À cet instant cette couleur n'évoque qu'une seule chose pour moi, ou plutôt une seule personne.

Je trace rageusement les traits de la salle de musique puis ceux des mèches de Chrysta.
J'en prends un à la couleur plus sombre, presque noire et je trace son buste, son visage versé sur le côté, ses paupières baissées et ses lèvres entrouvertes pendant qu'elle chantait.

J'ouvre en grand la boîte, déchirant l'emballage au passage et pioche les couleurs au hasard. J'ajoute des touches de couleur pour combler peu à peu l'espace blanc du papier.

Au bout de ce qui me semble être une trentaine de minutes, j'entends la porte de la salle de bain s'ouvrir et des pas s'approcher.

" Kenny ? "

Je lève la tête et me rends alors compte que je me trouve par terre, entourée d'un étalage de feuilles et de crayons.

" Tu m'as dessiné ? s'étonne-t-elle. "

Je hoche la tête.

" C'est magnifique...

- C'est parce que tu l'es, je murmure d'une voix rauque.

- C'est une déclaration d'amour ou ça ne va vraiment pas ?

- Je ne sais pas..., je lâche d'une voix traînante. Peut-être les deux..."

Elle s'approche et tend doucement la main vers le carnet.

" Je peux ? "

Je le lui mets dans les mains en guise de réponse.
Elle ouvre de grands yeux en effleurant le papier du doigt.

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