Prologue

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La porte d'entrée claqua. Le petit garçon se roula dans sa couette et attendit. Il savait ce qui allait arriver. C'était toujours pareil. Il entendit des voix et sa petite main d'enfant serra plus fort son doudou contre lui. Malgré le silence encore présent, il ne put s'empêcher de trembler. C'était pour bientôt. Ça allait bientôt recommencer. Puis soudain, des éclats de voix. Quelque chose sembla s'être brisé, peut-être contre un mur. Pourvu que ce ne soit pas sa mère... Il enfoui sa tête sous son oreiller. Il ne veut pas l'entendre. Il ne peut plus l'entendre. C'est trop dur.

- Non, arrête ! Lâche-moi ! Lâche-moi, Mick !

Une larme roula sur son visage de poupon et il se boucha les oreilles. Non ! Pas ça ! Pas encore ! Pas sa mère ! Il pleura en silence jusqu'à ce que ses mains n'arrêtent plus aucun son, jusqu'à ce qu'il ne puisse plus sangloter pour couvrir les cris d'en bas.

- Ne me frappe pas ! Ne me frappe pas, je t'en prie ! s'époumona sa mère.

Il aurait reconnu entre mille le bruit déchirant qui résonna ensuite. Il ferma les yeux pour ne pas voir l'état sûrement dramatique de sa mère. Il se mit à frapper son oreiller, de toutes ses forces comme si les coups qu'il lui mettait éviterait à sa mère d'en prendre plus. Alors, quand celle-ci hurla encore, il n'y tint plus. Il sortit de son lit et marcha, pantelant, jusqu'à l'escalier menant au salon. Il descendit timidement quelques marches, s'assit et regarda entre les barreaux la scène lamentable. Un homme se tenait dos à lui. Le petit garçon reconnut son père au collier de pâtes qu'il portait autour du poignet. Il voulu hurler quand l'homme porta encore la main sur sa mère. Seul le contact de son doudou l'en empêcha. Et quelqu'un entra dans la pièce. Le petit garçon aurait pu être surpris, il ne connaissait pas le nouveau venu à prêt tout, mais il n'en fut que soulagé. Les éclats de voix reprirent. La bagarre monta d'un cran. Les poings et les hurlements se firent plus forts. Le petit garçon s'allongea sur sa marche pour ne pas qu'on le voit et pour pouvoir pleurer en silence. Il se ferma la bouche avec ses mains pour ne pas crier, et reposa sa tête contre sa peluche fétiche. Puis soudain, une détonation retentit. Il y eu un bruit écœurant, un gémissement étouffé et se fut le silence. Un silence chargé de douleur. Le petit garçon se redressa. Sa mère gisait au pied du canapé, une balle fichée dans le ventre, elle semblait agoniser. Et à l'autre bout de la pièce, l'inconnu lâcha un fusil pour s'enfuir en courant. Le père hurla. Le petit garçon remonta à toute vitesse dans sa chambre, persuadé qu'il allait être puni. Bien sûr, alors qu'il grelottait dans son lit, son père avait déjà saisi le fusil et était parti en courant venger sa femme dont les yeux venaient de se fermer.

Plus tard, alors qu'il dormirait profondément, le petit verrait des lumières bleues et blanches, de grands hommes armés avec d'étranges gilets, un sourire confiant qui lui promettait le bonheur. Mais ça n'était qu'un rêve. Ça ne pouvait être qu'un rêve. Et alors que ses songes l'emmenaient loin de chez lui, le seul habitant qu'il resta dans cette demeure fut l'ours en peluche qui dormait silencieusement dans les escaliers, attendant son heure pour pouvoir raconter ce qui s'était réellement passé, cette nuit-là.


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