Évitement impossible

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Je suis presque parvenue à oublier Nikki, passant tout le reste de l'après-midi avec Eléonore et Lucille, évitant ainsi délibérément mes compagnons de table et cette peste de femme. L'heure de déguster la magnifique pièce montée vient de sonner, je propose mon aide à mon amie. Bien que des serveurs s'occupent de tout, Eléonore souhaite superviser ce moment précis. Elle m'envoie chercher Ludovic que nous n'avons pas vu depuis des heures.

Je le retrouve jouant au billard, avec quelques amis et... Nikki. Un Nikki nonchalamment appuyé contre le dossier d'un canapé, ses longues jambes allongées devant lui, une bouteille de bière aux lèvres, sa pomme d'Adam bougeant au rythme de ses goulées, dans un geste très sensuel. Sa chemise ouverte laisse entrevoir sa poitrine aux pectoraux magnifiquement dessinés, la blancheur du vêtement accentue son bronzage et l'on entraperçoit un tatouage. Deux jeunes gamines, subjuguées par ce spectacle, me bousculent en quittant la pièce, gloussant comme des dindes. Moi-même je me retiens de baver devant ce spectacle particulièrement sensuel. Je suis aussi atteinte qu'elles et je n'ai plus quinze ans ! Je détourne rapidement le regard, pas assez vite, il m'a surprise le reluquant. Je sors de ma torpeur et me précipite à la rencontre de Ludovic pour l'informer que sa femme attend après lui. Au passage je tente d'inciter les jeunes à nous rejoindre, mais rien ne les intéressent hormis leur téléphone. Quelle génération ! Je n'insiste pas.

Je fais demi-tour pour quitter la pièce, Nikki sur mes talons. Je sens son regard sur mes fesses. Je suis sûre que vous me comprenez ! Nous les filles, avons un sixième sens pour ces choses-là. Il est tellement proche, que s'en est gênant. Ma confiance toute nouvelle vient de s'envoler à tire d'ailes assurément. Qu'est-ce que j'imaginais ? Qu'une nouvelle Meg venait de naitre ? La confiance en soi ne se gagne pas en un claquement de doigts ! Ok ! J'étais persuadée avoir gagné la première manche d'un jeu pas vraiment déclaré. Mais j'ai encore du boulot. Je suis tellement tendue et perturbée que je trébuche en passant la porte. Je ne suis pas Flo qui nous aurait joué sa carte « je remue du popotin », et avec elle, c'est le mec qui se serait cassé la figure.

Je n'ai pas le temps toucher le sol qu'une poigne de fer m'en empêche. Je me retrouve collée à son torse, il me maintient en m'enserrant la taille de beaucoup trop près à mon goût. Oui de beaucoup trop près ! Je sens son souffle dans mes cheveux et sa peau qui touche la mienne. Je n'ose plus respirer, je ressens comme des picotements m'envahir, une sensation déconcertante par sa nouveauté. Est-ce le grand frisson dont on parle dans les romans d'amour ? Je reste immobile, les yeux clos, savourant, cette sorte de caresse. L'instant. Je sais que je dois me ressaisir. Il réagit avant moi. Je le regrette aussitôt, je pourrais rester indéfiniment dans ses bras tellement son contact s'avère être agréable. Je me presque fondre.

— Je constate que tu apprécie mon contact, mon cœur.

L'entendre m'appeler ainsi me fais reprendre mes esprits. Comment ose-il ? Je retire brutalement sa main de ma taille et me tourne vers lui, furieuse.

— Ne m'appelle jamais, « mon cœur », sifflé- je, martelant ces mots. Garde-les pour Suzie ou une autre de tes conquêtes.

Aussitôt, je regrette mes paroles, celles concernant Suzie. Je viens de me trahir. Désormais il sait que « je suis la fille de la cuisine » !

Comme s'il l'ignorait !

Immobile, il met les mains dans ses poches, accentuant le relief indécent de son pantalon et ce ... sans aucune gêne. Oui, je regarde et alors ? Il me sourit, mettant en évidence la fossette hyper craquante du coin de sa bouche, me regarde droit dans les yeux d'un air provoquant.

— Eh bien voilà ! Les choses sont très claires désormais. On peut passer à l'étape suivante « ma petite voyeuse ».

Je serre les poings de rage et l'abandonne sur le pas de la porte, m'enfuyant comme une gamine. Je l'entends éclater de rire dans mon dos. Il se fout de ma gueule, le salaud ! Ma petite voix intérieure me fait remarquer que je l'ai bien cherché. Je rejoins ma table, furieuse, avec l'impression d'avoir été manipulée. La situation échappe à mon contrôle. On peut dire :

1 set partout, service Nikki ! J'ai gagné le premier set, lui celui-ci.

Serais-je à la hauteur pour remporter la partie ? Je ne le pense plus. Ce mec me semble trop habitué et entrainé pour ces terrains de jeux dont je suis loin de maitriser les règles.

En correction V8



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