Coïncidences

CHAPITRE VII

On récite en chœur « I wish you to spend a great year and thank you to your promises », (je vous souhaite de passer une bonne année et vous remercie de vos promesses) puis on débarrasse la table en silence.
    Je monte me brosser les dents puis me rend dans ma chambre. Mon sac est prêt depuis une semaine et mes habits sont soigneusement pliés sur la chaise.
    Je m'allonge sur le lit, les bras croisés derrière la nuque, les yeux grands ouverts fixant le plafond.
    Clem me rejoint un peu plus tard et on s'assoit côte à côte sur mon lit.

    « - Tu stresses ? demande-t-elle.
- Non. Et toi ?
- Un peu. Je sais pas si j'arriverai à tenir ma promesse.
- Mais si, t'en fais pas.
- Mouais...

    On reste sans rien dire pendant cinq minutes puis elle m'embrasse sur le front, me souhaite bonne nuit et retourne dans sa chambre.
    Maman entre en même temps que Clémence sort. Je me couche sous la couette, elle me dégage les cheveux du visage et me caresse la joue.

    « - Fait de beaux rêves, chérie. »

    Elle sourit puis sort rejoindre mon père dans la chambre. « Fait de beaux rêves. ». Ça remonte à un bon moment la dernière fois que j'ai « fait de beaux rêves ».

Quatorze... quinze... seize...
Ce couloir devient presque accueillant à force de le visiter. La bougie qui vacillait à la fin du mois de juillet est maintenant éteinte.
Vingt-deux... vingt-trois... vingt-quatre...
Les rats qui se battaient sont en état de décomposition.
Trente-sept... trente-huit... trente-neuf...
Les miettes de la statue de plâtre se confondent avec la poussière, les traces de griffes sont comme au premier jour.
Cinquante-trois... cinquante-quatre... cinquante-cinq...

8h02. Je n'ai pas mis mon réveil, comme d'habitude. Le cri résonne encore dans mes tympans. Je m'habille puis je descends mon sac dans le hall. Je dis bonjour à Maman et à Clem et entame une tartine et un verre de jus de fruit.
    « - Papa est déjà dans l'avion, grogne Clem entre deux gorgées de café.
- Déjà ?
- Oui, il a pris le deuxième vol, le premier était trop tôt, répond Maman.
- Oh...
- Tu commences à quelle heure Maman ? demande Clem.
- 11h.
- La chance... »

    On termine le petit déjeuner dans le calme, mise à part la pression que nous rajoute Maman avec les horaires du réveil qu'il ne faut pas rater, la carte de self qu'on ne doit pas oublier, les tenues jugées trop « provoquantes » à éviter et enfin, la concentration dont il faudra faire preuve. Ma sœur et moi nous contentons seulement d'acquiescer puis nous montons « finaliser notre préparation ».
    Je me maquille légèrement, je n'aime pas qu'on me remarque. Une fois prêtes, on embrasse Maman puis on sort dans l'allée.
« - Bon, je te laisse, je vais rejoindre Raph. Bisous, bonne rentrée ! On se voit tout à l'heure, me dit Clem avec un sourire rayonnant.
- À toi aussi, à toute. »

    Elle me sourit encore et part en sens inverse.