Cinq -
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5 juillet 1990, Iran, village de Cham-e-Riz.
O M N I S C I E N T
Le grand jour.
Tout était prêt, les femmes avaient douché Elnaz, l'avaient habillé d'un tchador en soie. Le trou où sera placée Elnaz était prêt aussi, sans oublier les pierres – de taille moyenne pour qu'elle subisse la douleur ainsi que pour tout le monde puisse en jeter –. Elle était resplendissante pour mourir. Triste vie.
Sur la place public, tout le village était présent, pour tout vous dire, tout le monde se devait de venir, c'était une obligation. Voir la mort d'une femme, c'est tellement beau n'est ce pas ?
« Le monde change quand nous changeons. »
- « Ramenez-là ! » cria le maire.
Elnaz, avançait à petits pas avec le peu de force qu'il lui restait, tenue par des hommes et une chaîne à ses pieds – pour ne pas qu'elle puisse s'enfuir. –. Une fois arrivés sur place, deux hommes la force à se mettre à genoux et la recouvrèrent de terre jusqu'à qu'elle atteigne sa poitrine. Ils lui enlevèrent également son tchador, en prenant avec sa pudeur.
Tout était en place.
- « Bismi- ! » cria le maire mais interrompu par un grand boum.
Au milieu de la place publique où allait être exécutée Elnaz, un petit garçon, d'une dizaine d'années à peu près s'écroula au sol. À cette époque-là, on obligeait tous les jeunes garçons à participer aux meurtres de la place publique. C'était comme une sorte de tradition pour les forger dès leur plus jeune âge, mais les plus fragiles ne résistaient pas très longtemps.
Au même moment, le regard d'Elnaz croisa celui d'Ehsan, celui-ci la regarda attristé et chuchota un « Désolé. » avant de baisser la tête. Celle-ci le regarda longtemps de ses beaux yeux gris et détourna finalement le regard à la recherche de Firouzeh.
Elle avait balayé d'un regard la place publique, cherchant désespérément Firouzeh. Lorsqu'elle tourna la tête, celle-ci se trouvait les pieds et les mains attachés à une chaise, sûrement pour ne pas qu'elle l'aide. Elnaz lui sourit simplement et Firouzeh lui rend son sourire, mélancolique.
L'enfant enfin évacué, la cérémonie pouvait commencer. C'était le père d'Elnaz qui ouvrait la danse, il tenait d'une main une pierre et de l'autre sa canne qui l'aidait à se tenir debout, attendant le signal du maire.
- « La cérémonie peut enfin commencer ! BISMILLAH ! » cria le maire.
Souriante, Elnaz attendait patiemment que son père lui jette une pierre. Le revoilà entrain d'assommer une autre femme, l'autre étant son ex-femme et celle d'aujourd'hui, sa fille. N'a-t-il donc pas honte ? Jeter des pierres sur une femme jusqu'à sa mort, c'est désolant.
- « AAH ! » cria Elnaz de douleur en recevant le projectile.
Husseïn – père d'Elnaz – venait de jeter la première pierre. Celle-ci avait atterri pile entre ses deux yeux, du sang avait même déjà commencé à couler.
Mehran était le second, autant vous dire qu'il n'y ait pas aller de main morte, la pierre avait atterri sur sa bouche, elle qui était déjà enflée. Cependant Elnaz souriait toujours, restant digne, malgré qu'elle soit plus que triste.
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Dix minutes sont passées, de pierre en pierre, Elnaz ne ressemblait à chaque fois, un peu plus à rien. Les jets s'enchaînaient. Pour finir, c'était maintenant à Ehsan de lui jeter une pierre, celui-ci, ne voulant pas la blesser, – et ne sachant pas viser également – jeta la pierre à côté. On l'invita à recommencer d'une seconde fois, puis une troisième et enfin une cinquième. En vain. Ses fils avaient déjà jetés plusieurs pierres, c'est sûrement ce qui avait le plus touché Elnaz, déjà affaiblie, mais qui l'était encore plus lorsque ses propres fils se retournaient contre elle.
C'est Mehran qui prît alors le relais, et jeta la pierre dans le cœur de la jeune femme, celle-ci s'effondre directement.
Elnaz oublia alors sa douleur, sa tristesse, pour un moment. Cette tristesse des femmes seules, qu'on suppose courageuses parce qu'elles ne se plaignent pas, mais qui saute aux yeux de quelques jeunes inconnus, parfois, au beau milieu d'une foule et cria alors de son dernier souffle : « Ašhadu an lâ ilâha illa-llâh, wa-ašhadu anna Muḥammadan rasûlu-llâh. » choquant alors tous les habitants du village – l'Iran est un pays majoritairement chiite, ils sont donc partisans d'Ali et non du Prophète Muhammed ṣallā-llāhu ʿalayhi wa sallam – avant de rendre son âme.
Midi. Elnaz Yossephyan était morte le sourire aux lèvres.
La foule se dispersait petit à petit et Elaleh couru alors vers sa mère accompagnée de Firouzeh.
- « Ummî ! Ummî ! Tu n'es pas morte hein ? Ummî, tu m'entends.. ? » pleurait Elaleh.
– « C'est fini ma fille. Elle est.. morte. » dit difficilement Firouzeh. « Viens, aide moi à la porter, elle ne mérite pas d'être manger par les chiens ou les vautours. »
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Elnaz était à présent six pieds sous terre. Firouzeh et Elaleh l'avait enterré comme elles pouvaient et avaient prié pour elle.
- « Ummî.. Ils avaient pas le droit.. Non, ils avaient pas le droit. » finit par dire Elaleh en embrassant la tombe de sa mère.
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« Le récit d'une lapidée. »
Merci pour les quelques votes, ça fait super plaisir wAllah! J'ai beaucoup d'idées d'histoires, j'ai commencé à en écrire certaine et bref, j'vous en dis pas plus. Bisous à toutes. ❤️️
@MentalStoique
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Le récit d'une lapidée.
Ficción General> HISTOIRE COURTE. < L'histoire d'une jeune femme, iranienne, mariée de force et ayant eu 4 enfants de ce mariage. Cependant son monde s'écroule lorsque son mari l'accuse à tord d'infidélité avec un homme du village.. Inspiré du film « La lapidation...