Chapitre 6

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Une jambe élancée, guidant un tissus glissant sur ses chevilles, frôlant sa peau à chacun de ses pas. Mes yeux ont suivi cette courbe-silhouette retrouvée, jusqu'à la pointe. Des escarpins vernis noirs, reflétant la lumière du jour. Une jupe longue, noire, plissée, jouant avec le vent.

Ce vent qui réinvente sa coiffure. J'aime ces petites mèches rebelles, ce tee-shirt mal repassé. Le vent qui fait danser encore et encore le tissus de sa jupe.
Épris de la même curiosité, j'embarque dans ce nouveau voyage face à son parfum, sur la trajectoire qu'elle a entrepris. Toujours caché derrière mon incapacité.

Surpris, je remarque des sortes de bleu sur son bras droit alors découvert. À y faire plus attention, j'en découvre un deuxième au bas de son cou, ce qui m'intrigue d'avantage.
Ma vision à désormais changé. Je ne la regarde plus de la même façon. Je me met à fabuler, imaginant le pire.

Je continue de la suivre, repartant sur cette vieille route, reprenant ce travail plus tôt abandonné. Elle allait comme pour rentrer chez elle. J'en reconnaît le trajet. J'étais comme la première fois, attiré par elle. Je ne me privais plus de la regarder, hypnotisé.
Je marche sur ses pas, toujours les mêmes. Ceux qui grattent le béton, ceux qui ne retiennent que moi. Le bruit de ses talons frappant le sol influence le rythme de mes pas.

Elle fuis lorsqu'elle remarque ma présence. Elle ne voit en moi que le passé. Je ne veux pas lui faire peur. Elle accélère le pas et se force à ne pas tourner la tête. Elle a honte de s'être ouverte à moi, l'autre jour, en pleurant.
Elle sait bien qu'elle est vulnérable psychiquement. Elle réagit comme ça parce qu'elle a peur d'être entrainée.

La situation devient comme une enquête sentimentale. Je cherche la vérité, je cherche à aider cette fille qui me remplit d'admiration.
Mon coeur bat à cent à l'heure quand je suis au tournant de l'impasse Baudelaire. Elle avait préparé ses clefs. J'ai vu à travers les carreaux cette silhouette monter en hâte les escaliers du bâtiment. Elle avait l'air attendue, en retard.
C'est quelques instants plus tard que je compris que j'avais raison. Les yeux attachés à cette fenêtre, je l'ai vue s'approcher de cet homme grand, musclé, la tenant maintenant par la taille. Il l'a serrée bien fort. Il avait l'air menaçant. Il bougeait les bras dans tout les sens.

J'étais en bas, à regarder, appuyé contre le mur de la maison au coin. J'ai tout vu, j'ai tout compris.
Je me suis enfoncé un peu plus loin dans l'impasse.

Il l'a poussée, elle s'est laissée tomber. Non, il n'a pas cherché à l'aider à se relever. On entendait d'ici qu'il criait. Il a levé le bras, les doigts alignés, il a agi, et elle a crié. Il n'a pas cessé.
Il est vingt heures. Il est tard. Elle est en retard.

Elle a intérêt à ne pas recommencer.

L'homme à attrapé le bras d'Axelle, et il l'a emportée ailleurs, dans une autre pièce. En me remémorant la scène, j'ai peur d'imaginer le suite.

L'homme qu'elle aime la bat, et le seul moment ou elle peut partir et s'évader c'est après le travail, lorsque lui travaille encore. Elle venait alors lire dans le parc. Ses robes longues et amples permettaient de dissimuler les marques gravées sur son corps. Elle rentrait le soir, elle rentrait tout les soirs. Elle se donne le courage d'affronter tout ça. Elle était de retour tout les soirs à la même heure. Un peu de retard et elle doit subir d'avantage.

Les cris ont cessé, après presque vingt minutes. J'ai voulu intervenir, appeler, régler ça.

C'est alors que j'ai entendu une fenêtre s'ouvrir au dessus de ma tête.

-Ne faites pas ça. Lasser votre téléphone et partez d'ici. Vous n'avez rien à faire là.
Axelle me parle de sa fenêtre.
-Partez avant qu'il vous voit, reprit-elle.

La fenêtre s'est refermée quand un homme est apparu. Je me suis caché dans le creux d'une porte. J'ai entendu la fenêtre se réouvrir, j'ai fermé les yeux. Je savais que ce n'était plus Axelle qui avait ouvert cette fenêtre. Si l'on me voyait ça irai mal pour elle.
La fenêtre s'est refermée et j'ai attendu quelques secondes avant de me diriger vers la sortie de l'impasse.

L'énigme était alors expliquée. Elle n'était néanmoins pas résolue. Je ne la laisserait pas souffrir ici, le soleil ne peux mourir de par la faute de l'ombre. Il en vas à l'encontre.
Axelle est seule, décidément. Il n'y à désormais que moi pour pouvoir y remédier.

Personne ne remarque son mal-être, le monde s'entête dans son égo, à ne prendre en compte la tristesse des autres que si elle les atteints eux mêmes.

Je ne suis pas les autres.

Je ferais tout. Et même que je commencerai demain. Je ne sais pas comment, par quel moyen, mais je vais changer la vie de cette femme. La vie n'est appréciable que si l'on cherche à lui en donner un sens positif. La solitude ne résous rien, désormais je veux être celui qui l'aura aidée.

C'est décidé, je ne renoncerai plus.

Je garde ça en tête tout le long du trajet. Je finis par revenir au rond-point de la banque, il fait presque nuit. Je rentre chez moi, mange, me prépare, et me glisse au plus vite sous la couette. Je garde tout en tête. C'est comme ça qu'apparaît enfin la volonté et le courage. Je laisse le sommeil m'emporter, le rêve me dominer. Je laisse la lune faire son travail. Elle honore le ciel de sa présence et je n'ai plus la force de venir l'admirer. Mes yeux se ferment, ma mémoire s'évade, embellie par ces dernières pensées. Derrière chaque goutte de pluie se cache un nuage qui fait de l'ombre à la lumière.

Tout un jour doit pouvoir s'arranger.
Tout.

Sinon, plus rien ne vaut la peine d'être pris en considération. Alors s'il vous plaît, laissez moi y croire. Je sais que c'est possible. Je veux continuer à y croire. Je ne demande que cette volonté. Je ne le demande pas uniquement pour moi.
J'espère que tout ça sera encore d'actualité quand j'ouvrirai à nouveau les yeux.

Je sais que c'est possible.

Axelle (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant