Chapitre 2 ◊ Fièvre

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Hier, dès mon réveil, pour la première fois depuis de nombreux mois, je ne m'étais réveillé ni en sursaut, ni plein de sueur, les draps me collant à la peau, et donc sans l'image de mon plus gros cauchemar imprégné dans les rétines. Je ne m'étais également pas levé avec la bile aux lèvres, avec ce malaise qui me tordait les entrailles, le poids de la culpabilité qui me dévorait de l'intérieur, à l'instar des démons de mes nuits, démons de mon passé.

Non, hier, j'avais rêvé d'un tunnel, un tunnel différent de ceux auxquels j'étais habitué: pour la première fois, une lumière était apparue au bout de ce tunnel, et elle était accessible. Sur ce fond de lumière, une silhouette s'était découpée: celle d'une cavalière juchée sur sa monture, dont les cheveux orangés se confondaient avec la source de lumière invisible. Et dans cette vision, j'avais vu comme un appel sourd, un appel muet... et j'étais calé dans le domaine.

Ainsi, hier, je m'étais réveillé avec cette image en tête, et ce genre de... besoin pressant. De quoi? Je n'en avais pas vraiment idée en fait. J'étais comme pris d'une sorte de fièvre. J'avais alors tourné en rond dans ma maison toute la journée et, quand enfin 18h approchait, je m'étais tout de suite précipité vers ma bécane, roulant à travers champs pour regagner la fameuse écurie. Et, alors que j'avais pris place sous mon arbre comme les deux jours précédents, la jeune fille était apparue avec son cheval. Maud avec Knight. Dès cet instant, mon étrange fièvre s'était comme apaisée. Pour la première fois depuis mon réveil, j'étais serein.

Quand, plus tard, je m'étais glissé dans mes draps, j'avais compris. Ma fièvre, c'était celle du cheval.

Certes, l'expression "fièvre de cheval" est assez répandue, et désigne une très forte fièvre. Or, dans mon cas, elle était à prendre sous un autre sens: le cheval semblait être à la fois la cause et le remède à ma fièvre.

Cette nuit, un martèlement de sabots, lent et hypnotique, m'avait accompagné tout au long de mon sommeil, comme pour confirmer cette maladie étrange. Plus étrange encore, cette "maladie" me faisait le plus grand bien, elle semblait répondre à toutes mes prières: elle me forçait à aller vers un autre monde, elle était comme la corde qui me permettrait de sortir de ce gros trou de désespoir et d'indifférence dans lequel je me terrai depuis longtemps. Depuis bien trop longtemps. Cette fièvre, c'était celle de la lumière au bout du tunnel, celle de l'espoir que peut-être ma vie allait pouvoir prendre un nouveau tournant, comme je l'avais si souvent souhaité.

Dès mon réveil, expédiant rapidement petit-déjeuner et toilette, j'enfourchai ma moto et m'élançai à toute allure à travers la ville. Mes quelques jours d'exploration m'avaient plutôt bien permis de me repérer dans ce nouvel univers, ainsi je trouvai ce que je cherchai sans trop de mal: la bibliothèque.

Toujours pressé par cette délicieuse fièvre, je garai mon engin et m'engouffrai dans le bâtiment tel une bourrasque, sous le regard désapprobateur de la bibliothécaire. Quand je reviens quelques minutes plus tard, les bras surchargés de documentation diverse et variée sur le cheval et l'équitation (des livres, des revues, des vidéos...), ce même regard se fit à ce moment surpris, et il y avait de quoi! Après moult efforts, je réussis à faire rentrer ce condensé de savoir dans mon sac, et m'empressai de retourner chez moi — dans ma chambre impersonnelle.

Sitôt la porte de cette dernière refermée, j'étalai tous ces nouveaux documents sur mon lit, et les fixai alors en me demandant par où est-ce que j'allais bien pouvoir commencer...

À 17h15, une introduction à l'équitation, film explicatif et un magazine équestre plus tard, l'alarme programmée sur mon téléphone me tira de l'atmosphère studieuse dans laquelle je m'étais profondément plongé. Ni une ni deux, des brides de savoir en attente d'être acquises grouillant toujours dans mon crâne, je me mis en direction de l'écurie, une fois de plus.

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