Chapitre 5

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 Le week-end passa trop vite au goût de Cassie. Elle eut l'impression d'avoir fermé les yeux seulement cinq minutes et pourtant son réveil sonnait déjà le début d'une nouvelle semaine. Elle soupira, le visage enfouit dans son oreiller, et décida de ne pas se lever et de ne pas se rendre au lycée. Elle n'en avait ni le courage ni l'envie. Malheureusement pour elle, Charles s'était douté que la jeune fille ne voudrait pas aller en cours ce matin et avait mis son réveil à la même heure qu'elle pour pouvoir vérifier qu'elle y irait bien. Elle avait déjà fait une erreur, pas question qu'elle n'aille pas en cours par dessus le marché !

- Debout Cassie ! » S'exclama-t-il en entrant dans la chambre.
Cassie sursauta et se retourna dans son lit. Elle le regarda avec étonnement puis grogna sans retenue.
- Je ne me sens pas bien. Je ferais mieux de rester à l'appartement aujourd'hui ... » Grommela la jeune fille en se recouchant.
- Il n'en n'est pas question ! Tu vas te lever et aller en cours, maintenant ! » Répliqua immédiatement Charles en lui tirant la couette.

Cassie fut parcourue d'un frisson désagréable et se leva en jetant son coussin dans le ventre de son cousin. Elle passa à côté de lui sans lui accorder un regard et se rendit dans la salle de bain. Elle le détestait ! Il n'avait donc aucune pitié ? Tout le monde au lycée allait la regarder de travers et se moquer d'elle. C'était la fille stupide qui était rentrée dans la maison du fou et l'avait poignardé. Aussi folle que lui cette fille !

En soupirant, elle fit couler de l'eau froide et s'aspergea le visage. Elle avait besoin de se donner du courage. Elle brossa ses cheveux mais les laissa lâche pour pouvoir se cacher derrière. Elle regarda son maquillage posé sur l'étagère près du lavabo puis renonça. Se maquiller ne changerait rien à ce qu'elle avait fait. Les gens la jugeront de toute façon. Sa plus grande chance de survie était de passer inaperçue, d'être invisible, comme avant. Même si cette fois-ci, il y avait peu de chance qu'on ne la repère pas dans les couloirs ...

Cassie termina de se préparer et quitta l'appartement sans un mot pour son cousin. Ce dernier rejoignit Alessandro dans leur chambre pour finir sa nuit. Cassie était tentée de ne pas se rendre au lycée et de se promener toute la journée dans les rues de San Francisco. Mais elle savait qu'elle ne pourrait pas, le lycée appellerait son cousin pour lui dire qu'elle ne s'était pas rendue en cours et elle empirerait son cas.

Alors, à contre cœur, elle marcha jusqu'à son lycée. Elle accéléra lorsqu'elle arriva à l'entrée du bâtiment et monta à toute vitesse pour se réfugier dans sa salle encore vide. Elle tenta de lire mais n'y parvint pas. Elle avait bien trop peur, elle redoutait le moment où ses camarades rentreraient dans la salle. Son ventre était serré si bien qu'elle avait envie de vomir et du mal à respirer. Elle n'avait qu'une envie : fuir ! Elle sursauta lorsque la porte de la salle s'ouvrit soudainement puis soupira en voyant que ce n'était que Élias qui entrait et non la classe entière. Elle avait oublié qu'il arrivait toujours en avance lui aussi. A son plus grand étonnement, Élias la fixa et s'approcha d'elle.

- C'est moi qui ai appelé la police vendredi soir. » Déclara-t-il seulement.
Cassie le regarda, bouche bée. Elle ne savait pas quoi répondre à cette déclaration soudaine. Elle finit par bégayer un merci à peine audible et Élias se détourna d'elle pour s'asseoir à sa place.
- Tu as eu de la chance, tu aurais pu mourir ce soir là à cause de ces garces ! » Fit-il remarquer avant que la porte ne s'ouvre sur leur professeur.

Les autres élèves entrèrent derrière lui. Tous fixèrent Cassie en riant et en chuchotant et la jeune fille fut tentée de fuir mais Blaise entra au même moment. Il la fixa avec une pitié compatissante, comme les autres fois, puis reprit sa place devant elle. Cassie se fit violence pour rester assise sur sa chaise et se concentra sur lui. Sa façon de retirer son bonnet, de passer sa main dans ses cheveux, de jouer avec son stylo ou les pans de sa chemise à carreaux. Petit à petit, Cassie réussit à oublier les idiots qui se moquaient toujours d'elle. C'était comme s'il n'y avait plus que Blaise dans la salle et c'est grâce à lui, sans qu'il le sache, qu'elle réussit à tenir tout au long de la journée.

Le soir, lorsqu'elle quitta le lycée, elle s'arrêta un instant dans la rue, devant le bâtiment, pour regarder encore Blaise. Il était en train de parler avec des amis, son skateboard sous le bras, son bonnet fidèle à son poste. Elle le trouva plus beau que jamais. Soudain, l'un des amis de Blaise la repéra et la montra du doigt. Cassie revint brutalement à la réalité, se redressa et fit un pas pour s'enfuir mais c'était déjà trop tard. Tout le groupe de garçons s'était retourné sur elle, dont Blaise, bien sûr. Elle vit les lèvres de l'un deux bouger et tous se mirent à rire. Cassie pencha la tête en avant de façon à ce que ses cheveux recouvrent son visage et cachent sa honte. Soudain, elle entendit deux filles qui passaient à côté d'elle prononcer son prénom et les paroles qui le suivirent glaça le sang de la jeune fille.

- Elle a tué un homme quand même ! » S'exclama l'une d'elle en lui lançant un regard de travers.
- Elle l'a poignardé ! » Corrigea gentiment l'autre.
- Mais tu n'es pas au courant ? Il est mort ce matin à l'hôpital ! » Déclara la première si fort que tout le monde pu l'entendre.

Cette fois-ci ce ne fut pas seulement les regards des garçons qu'elle dut supporter mais ceux de la vingtaine d'élèves qui attendaient leur bus, ainsi que le silence terriblement gênant. Cassie regarda la fille qui venait de lui annoncer indirectement la terrible nouvelle et suffoqua. Il ne pouvait pas être mort ?! Elle n'avait pas tué un homme ?! C'était seulement pour se défendre mais étrangement cela ne l'aidait pas à se sentir mieux.

Soudain, elle eut la nausée. Les conversations et les chuchotements autour d'elle reprirent et Cassie s'élança dans la rue. Elle eut tout juste le temps de voir que Blaise était en colère et qu'il soupirait avant qu'elle ne tourne dans une ruelle pour se cacher. Une fois à l'abri des regards et des moqueries, Cassie se laissa tomber à même le sol. L'instant d'après, elle vomissait dans la rue, des larmes plein les yeux. Elle appela sa mère qui lui manquait tant, en vain. Elle n'était plus là, elle était morte, elle aussi. Cassie aurait fait n'importe quoi pour pouvoir la revoir, lui parler, même si elle n'était que translucide, comme ces derniers jours, lorsqu'elle était en danger ... en danger, c'était ça ! Sa mère lui apparaissait lorsqu'elle était en danger ! Peut-être qu'il suffisait de se mettre en danger pour pouvoir parler avec sa mère !

Cassie se redressa et attrapa un mouchoir dans son sac puis une bouteille d'eau pour se rincer la bouche. Ensuite, elle s'arrêta dans une boulangerie pour s'acheter quelque chose à manger puis pris le tram pour se rendre à la maison de l'homme qu'elle avait assassiné. Elle marcha durant plusieurs minutes avant de voir la lugubre maison se dresser devant elle. Elle la regarda, prit une grande inspiration et avança.  

C A S S I EOù les histoires vivent. Découvrez maintenant