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Jeudi / Vendredi 29 octobre

LEO

Au sous-sol de sa maison, dans la semi-obscurité et entre plusieurs piles de livres poussiéreux, de tas de vêtements sales et de devoirs éparpillés; Léo était bien au chaud dans sa couette et à l'abri derrière ses écrans. Il ne put retenir un grand rire sadique quand il vit les images que lui transmettaient en direct les télévisions locales qui couvraient le match Lemon-Denver. Elles lui prouvaient que toutes ses manigances s'étaient déroulées exactement comme prévu : le match qui avait si bien commencé s'était interrompu, c'était la pagaille et la confusion, et tout le monde était en train de partir... Dire que cela n'avait demandé à Léo qu'un simple piratage du système d'alimentation électrique du stade.

"Ces connards de l'équipe de foot ont enfin payé", pensa fièrement l'adolescent. Et il ne tarda pas à raconter son exploit à lui même. Il avait pris cette habitude, de se raconter des choses à lui-même, sous différents points de vues. Sa mère prétendait qu'il était fou, mais après tout, sa petite soeur avait elle aussi des amis imaginaires ! Certes, elle n'avait que sept ans.

Il s'endormit une heure plus tard sur le sol de sa chambre au sous-sol. Son vieux parquet dégageait une odeur de sapin, comme un parfum ambré apaisant qui lui avait permis de trouver le sommeil facilement...

- Léo ! Léo ! cria Awen, toute heureuse, en entrant dans la chambre de son frère au petit matin.

- Mmh...

- Maman dit qu'il faut que tu ailles acheter du pain !

L'adolescent fit un effort pour ouvrir les yeux et il consulta l'heure sur sa vielle montre à cadran. Elle affichait presque dix heures du matin. Alors il dit à sa soeur que c'était d'accord, et la petite fille en salopette quitta la pièce en chantant.

Léo se rémoméra ensuite "l'exploit" de la nuit dernière, et il alluma son ordinateur pour consulter les infos locales sur internet. Il tomba sur un article provenant du journal local, le New Hale Time, alors il cliqua sur le lien. Les premières lignes donnaient le contexte, des choses que Léo savait déjà. Mais la première phrase du deuxième paragraphe pétrifia littéralement l'adolescent : "Lors de la panne, le capitaine de l'équipe, Ewen Spencer a été bléssé. Il a été transféré à l'hopital durant la nuit. Son père, le ministre des finances, Hugo Spencer donnera peut-être de ses nouvelles dans la journée."

Jamais Léo ne s'était attaché à une personne, à l'exeption de sa famille.

Jamais il n'avait connu le poids des remords.

De la culpabilité.

Ça le prenait d'un coup, sans savoir pourquoi.

Ça lui faisait l'effet d'acide qui lui brûlait les entrailles, le consumant peu à peu de l'intérieur.

Son but avait été de faire du mal, parce qu'il n'aimait pas ces gens. Mais pourquoi il se sentait si coupable ? Parce que c'était Ewen ? Parce que ce garçon l'avait défendu la veille ? Mais Ewen était son strict opposé, et ce n'était pas un goût commun pour les stylos vert menthe qui changerait quoi que ce soit. Jamais Ewen ne voudrait d'un garçon comme lui...

Alors il monta sur son vélo mais ne prit pas le chemin de la boulangerie. Non, car il allait à l'hôpital. Il mourrait d'envie de voir les cheveux aux reflets aubrun-noix-des-champs du fils Spencer, et la ligne de son menton qui lui inspirait les longues routes du Nevada et les glaciers de Suède occidentale. Et aussi parce qu'il devait aller le voir, c'était une fatalité inexplicable.

Il laissa son vélo sur un portique prévu à cet effet et il pénétra dans l'imposant hôpital par la grande entrée principale, et une femme à l'accueil lui indiqua la chambre du fameux adolescent. Deux étages plus haut et trois minutes plus tard, Léo Will Miller se trouvait devant la porte de la chambre 211. Le bâtant, les gonds et la poignée étaient absolument identiques à toutes les portes de l'hôpital. Mais la personne qui se trouvait dans la pièce avait, elle, beaucoup plus d'importance que n'importe qui d'autre. Car Ewen Spencer était unique.

UN AMOUR IMPROBABLE [lewen]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant