Deaf (h.s)

Deux

Sooner rather than later, but maybe not

Je m'asseyais paresseusement sur le siège, le même bavardage autour de moi. Je tenais un livre d'une main et un café dans l'autre. Le trajet en train était d'environ 20 minutes, et tous les jours j'apportais un livre et un café. Le même rituel : lire une page, boire une gorgée, lire une page, boire, lire, boire et ainsi de suite. C'était un emploi du temps bien ennuyeux, pas d'enthousiasme ni d'excitation.

Je m'asseyais dans le même siège, ou pratiquement le même, tous les matins, et pareil pour le soir. Il n'y avait aucun changement dans ma routine.

Jusqu'au jour où un nouvel homme fît son entrée le train. Il s'asseyait toujours près de moi, un livre dans ses mains. Il avait de longs cheveux bruns, légèrement bouclé, était très grand et mince. Il avait un goût intéressant envers la mode, portant des chemises à fleurs avec quelques boutons détachés et des jeans serrés déchirés. Ses chaussures étaient d'un tout autre genre : lustrées et semblaient coûter cher. Il m'intrigait

Les jours passaient, et je ne lui avais toujours pas adressé la parole. Il semblait toujours absorbé par son livre, comme si rien autour de lui ne le préoccupait. Il sortait toujours deux arrêts avant moi, près de Daily Planet.

Je ne l'avais jamais vu ou entendu parler et j'avais supposé que c'était parce qu'il n'avait personne avec qui discuter. Il ne sourcillait jamais lorsque quelqu'un parlait trop fort ou quand le train faisait un arrêt dans un bruit perçant. C'était bizarre, normalement presque tout le monde réagissait à ces bruits. C'était devenu un rituel quotidien pour moi, le fixer dans le train. Je le regardait lire et, de temps en temps, lever le regard, me laissant voir ses yeux. Il étaient d'un magnifique vert. Je ne pense pas qu'il remarquait que je le fixait.

Quelques jours étaient passés, et nous n'avions toujours pas parlé. Je commençais à devenir impatiente, Je pensais qu'il essaierait de venir me parler. Peut-être était-il timide ? Je ne sais pas, j'étais mauvaise dans l'analyse des comportements et des manières chez les gens. Dans tous les cas, Il fallait que j'aille parler à cet homme. C'était en haut de ma liste des choses à faire avant de mourir.

Les jours devenaient des mois, et j'avais une obsession grandissante envers lui. Je pouvais retracer sa routine du matin toute entière et j'avais appris certaines choses sur lui. Il vivait sur Broad Street, près d'un petit snack-bar. Je ne le stalkais pas, mais un soir j'avais manqué mon arrêt et je l'avais vu y descendre. J'avais aussi appris une chose très importante : Il était sourd.

Cette information m'avait vraiment surprise, mais elle m'a encore plus donnée envie de le connaître. Je l'avait déjà vu dire de petites phrases, mais qui avaient du sens. Il disait « Pardon » et « Excusez-moi ». C'était un événement majeure pour notre relation, notre pathétique relation qui n'allait que dans un sens.

Cela faisait quatre mois depuis que je l'avais vu pour la première fois et mes parents commençaient à se demander si j'allais m'acheter une voiture, un jour. Je continuais de prendre le train pour aller et rentrer du travail, Je ne le ratais jamais.

J'étais très attachée à ce jeune homme, ses séduisants yeux verts et son bon goût pour la mode. Je voulais désespéramment lui parler, mais je ne connaissais pas le langage des signes et je ne savais pas si il pouvait lire sur les lèvres.

Je le saurais tôt ou tard.

Peut-être.