« J'en pouvais vraiment plus de...sans cesse...souffrir... »
Je fis attention de fermer la porte à clé derrière moi. Je me déchaussai et retirai mon blouson. J'entendis le son de la télévision et le bruit métallique d'une cuillère que l'on tapait contre un bol. J'esquissai un sourire puis m'approchai à pas lents de la cuisine. Ma mère était dos à moi, ses longs cheveux noirs tombaient en cascade dans son dos.
Elle s'affairait à mélanger énergiquement une préparation à gâteau. Je m'adossai contre le mur tout en la regardant cuisiner. Depuis la disparition de Deria, ma mère cherchait à me faire retrouver le sourire par tous les moyens possibles. Cuisiner mes plats préférés en était un.
Je me tendis lorsque j'entendis sa douce voix commencer à fredonner une mélodie que j'ai entendue des centaines de fois. Une berceuse qui me permettait de dormir quand j'étais petit. Je poussai un long soupir en me remémorant ces vieux souvenirs.
Ma mère dut m'entendre car elle se retourna et me lança un magnifique sourire blanc. Une peau pâle, de grands yeux gris et une fine silhouette, ma mère était la plus belle. J'abandonnai mon mur pour m'approcher d'elle. Elle me demanda, sans cesser de mélanger sa pâte.
- Comment s'est passée ta journée, mon trésor ?
- Si je ne réponds rien, ça t'ira...
Ses beaux gris se voilèrent de tristesse. Voilà ce que je ne voulais pas provoquer. De la tristesse. Je détestais la voir ainsi. Elle inspira profondément puis me posa une autre question.
- Tu as eu le temps d'y aller aujourd'hui ?
Ce fut à mon tour d'inspirer profondément. Bien sûr que j'y étais allé. Je ne manquais jamais ce jour. Je m'en rappelai encore comme si c'était hier.
Une frappe forte avait ébranlé notre porte d'entrée. Ma mère jouait avec moi dans le salon. Je n'avais alors que huit ans. Elle s'est levée pour aller ouvrir puis est revenue avec deux policiers derrière elle. Je ne comprenais pas ce qu'il se passait. Ils chuchotaient et ma mère avait l'air paniqué.
Puis, brusquement, elle a poussé un cri puis s'est écroulée sur le sol, ses deux mains recouvrant son visage. De lourds sanglots se sont ensuite fais entendre. Et moi...je n'ai rien pu faire d'autre que de la regarder avec incompréhension. Un des policiers s'est baissé puis l'a aidée à se relever. Son visage était baigné de larmes et je voyais qu'elle souffrait.
Une demi-heure après, les deux policiers étaient repartis. Ma mère pleurait encore. Elle était venue vers moi et m'avait serré contre elle. D'une voix enrouée, elle m'avait murmuré qu'elle prendrait soin de moi, pour toujours. Puis, après un long silence, elle m'avoua que mon père venait d'être tué.
Depuis ce jour, chaque semaine, j'allais sur sa tombe déposer une fleur et je restai là pendant une dizaine de minutes, toujours silencieux. Alors oui, aujourd'hui encore j'y étais allé. Je hochai lentement la tête à ma mère qui attendait la réponse.
Un petit sourire éclaira son visage. Elle abandonna son bol et vint m'enlacer. A presque dix-huit ans, je faisais une tête et demi de plus qu'elle mais j'aimais toujours autant la prendre dans mes bras...
VOUS LISEZ
Elémentaires tome 1 : Beginning
Übernatürliches"Quand j'étais petit j'avais peur du noir...parce qu'IL était là à me hanter. J'avais peur des ténèbres, de l'obscurité, de toute cette noirceur qui LE caractérisait. Aujourd'hui...ces ténèbres ne m'effraient plus. Elles font parties de moi..." Senn...