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J'ouvre les yeux ; une lumière m'éblouit. Je referme vivement les paupières, et j'attends que mes yeux s'adaptent à la luminosité.

« Kurt ? Tu es là ? » appelle une voix lointaine.

Je me redresse sur mes mains, ouvrant les paupières. Je suis dans une chambre qui m'est familière. Je ne suis pas dans l'appartement de Berlin Ouest, ni dans celui de la RDA. Je me trouve dans un pyjama bleu clair. Je connais tout ceci, mais je ne sais rien en même temps. C'est assez bizarre, je l'admets. J'enlève le drap qui recouvrait mes jambes. Je me lève et je sors de la chambre. La porte donne sur un escalier en bois.

« Kurt ! Tu es là ? »

Je ne réponds pas. Peut-être que cette dame parle à quelqu'un d'autre !

Je descends.

Malgré ma volonté d'être discret, mes pas font craquer les planches de bois. Je m'arrête, espérant que la femme ne l'entende. Pas un bruit. Je continue ma descente. Enfin, mon pied touche un carrelage froid. Je déambule toujours. Ma marche me conduit vers une porte de bois gris argenté. Je pose ma main sur la poignée, et j'entre. La femme qui appelait mon « homonyme » tout à l'heure est en fait une femme d'âge avancé, qui tricote, confortablement installée dans un fauteuil devant une cheminée qui est éteinte. Je m'approche sur la pointe des pieds, mais de nouveau, je fais du bruit.

Je m'arrête.

La femme s'arrête elle aussi.

Je retiens mon souffle et elle se lève.

Elle se retourne et...

« Kurt ! » s'écrit-elle.

Elle s'élance à mon cou et me serre fort par les épaules.

« Loué soit Dieu, tu es vivant ! »

- Je l'ai toujours été, dis-je simplement.

Elle se dégage et me tient par les épaules.

« Tu n'a quasiment pas changé... Tu es toujours aussi beau... »

Comme pour accompagner ses paroles, elle passe ses doigts fragiles sur ma joue, et une larme coule sur la sienne. À ce moment, tout me revient. Cette dame qui tricotait quand je suis descendu...

« Grand-mère ! »

Cette fois-ci, ce fut à mon tour de sauter dans ses bras. Elle pose alors son menton au creux de mon épaule et elle m'embrasse. Elle est ma grand-mère et elle l'a toujours été. Je suis dans la maison de mes grands-parents ! Mais...

« Où est grand-père ? »

Son visage se peint d'une tristesse incommensurable.

« Kurt... Ton grand-père est décédé il y a deux ans... »

Nous passons tout le reste de la journée à parler de mes années d'absence. Je lui dis que je ne savais plus ce qui s'était passé durant cette période, mensonge qui me laisserait le temps de comprendre la raison de mon voyage.

Au Pied du MurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant