Mèche améthyste, yeux anthracites

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Ce week-end allait être inoubliable. Dans le sens " Mon dieu, le frisson de la honte me parcours dès que je repense à une microseconde de ce foutu week-end maudit... ". En bref : un vrai désastre. Je me dirigeais vers le salon de coiffure qui s'occupe de mon cher appendice capillaire depuis mes plus blondes bouclettes d'enfant, Stefano Giulio, ce qui était en soi une mauvaise façon de commencer le week-end. Car, voyez-vous, je souffre de cette géniale terreur au nom barbare de aichmophobie, depuis un malheureux incident entre mon père, moi, et une tronçonneuse. Un sourire de chat de Cheshire sur mon avant-bras continue à en rire. D'ailleurs, après avoir quelque peu questionné mon meilleur ami, Wikipedia, celui-ci m'a répondu, je cite :

<< L'aichmophobie (ou achmophobie) est un type de phobie spécifique, désignant la peur morbide des objets pointus comme les crayons, les aiguilles, les couteaux, un doigt qui pointe, ou même l'extrémité pointue d'un parapluie[1]. Le terme est dérivé du grec aichmē (pointe) et phobos (peur). >>

J'adore la partie " peur morbide "... Mais bref, revenons en à notre sujet : le coiffeur. Vous imaginez bien qu'un salon de coiffure n'est pas super plaisant quand on à une peur panique des ciseaux, et que même un crayon un peu trop pointu est source de malaise. Mais comme le coiffeur me coupait les cheveux depuis mon plus jeune âge et avait connaissance de mon problème, il n'y eu aucun moment de flottement quand je mis mes lunettes à verres teintées dès mon entrée dans le salon, couvrant le monde d'un voile sombre. Je me cala confortablement dans le fauteuil en cuir et Stefano Giulio ( Stef pour les intimes ), me lava les cheveux, et commença à tailler dans mes boucles châtain afin de renouveler ma coupe habituelle.
Malheureusement, l'endroit étant assez exiguë, Rebecca, l'assistante au nez arborant plus d'anneaux qu'un boa de 10 mètres, heurta le coude de son patron. Mes lunettes protectrices glissèrent de mon nez et retombèrent sur mes genoux, me laissant nez à nez avec mon reflet, et surtout avec l'arme blanche qui se rapprochait de façon menaçante de ma tête. Alors, j'ai fait la première chose qui m'est passé par la tête.
J'ai hurlé.
Évidemment, ça a surpris Stef, qui a refermé son poing de façon instinctive, tranchant un pan entier de ma chevelure. Les lames se sont refermées à quelques centimètres de mon oreille gauche, leurs chuintements résonnant dans mon cerveau. Alors, j'ai fait la deuxième chose qui m'est passé par la tête.
Je suis partie en courant.
Et aussi, sûrement, en hurlant.

Et c'est ainsi que je me suis retrouvée sur le trottoir, les cheveux asymétriques et les yeux exorbités. Stef sortit en trombe du salon en m'adressant un signe de la main. Il m'interpella de son accent italien.

- Je suis vraiment, vraiment navré ! S'il te plait, revient pour que j'arrange ça !

Je jetai un regard fiévreux à la paire de ciseaux qu'il tenait à la main qu'il agitait. Il s'en aperçut trop tard et, sur un dernier ( dangereux ) geste d'excuse, disparu à l'intérieur du bâtiment. Je senti mes yeux s'embuer, les voitures et les réverbères se transformant en un kaléidoscope de couleurs floues. Alors, en dernier recours ( les techniques n°1 et n°2 ayant lamentablement échoués, j'ai fait la troisième chose qui me passa par la tête. )
J'ai appelé mon petit ami.
Cette méthode a évidemment tout arrangé. Oui, je sens que je me suis prise toutes les féministes à dos en disant ça, mais Chester est définitivement un kit de survie indispensable. En un rien de temps, j'étais dans sa chambre en train d'éclater de rire alors que une demi-heure plus tôt, je me tenait au bord des larmes sur le bord de la route. Je soupirai un coup afin de m'arrêter de glousser et me passai la main dans les cheveux. Évidemment, en effleurant la partie inégale, le problème principal revint en force. Façon bélier sur une porte médiévale. C'est ainsi que commença une de ces discutions de sourds que je ne parviens à avoir qu'avec mon stupide rouquin de petit ami ( sans péjoration pour les rouquins ).

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