Chapitre II - The impossible

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  Quand ma mère a su pour ma blessure elle était dans tous ses états. Elle voulait des excuses de la part de la personne qui m'avait fait ça mais j'ai réussi à la raisonner. Heureusement pour moi. Je n'ose pas imaginer ce que ces filles me feraient si je leur causais le moindre soucis.


Un nouveau jour commence, et pour la première fois depuis très longtemps je suis en retard à cause de mon bus. Lorsque j'arrive au lycée j'ai déjà quinze minutes de retard donc je suis obligée de passer par le bureau de vie scolaire. Archie est juste devant moi et présente son carnet au surveillant. Je vois que le surveillant est un peu agacé. Il dit à Archie : « Tu t'es déjà fait virer de ton ancien lycée, essaie de ne pas te faire remarquer dès ton deuxième jour. ». Archie ne répond pas, il tourne les talons et s'en va. Il a l'air énervé. Bonjour la bonne humeur, si je n'avais pas de problèmes aux lycées comme lui -mise à part pour son comportement de cancre qui à mon avis aime avoir le dernier mot- je serais toujours heureuse d'être au lycée. Enfin je pense. On dirait qu'il subit la vie au vue de son air renfrogné. Il doit être de mauvaise humeur parce qu'il voulait rester au lit ce matin, quoique moi aussi je voulais rester avec Eddy. Nous avons parlé de beaucoup de choses cette nuit. On était sur une plage de sable blanc, le vent faisait voler mes cheveux qui chatouillaient mes épaules. On a parlé de voyages pendant que ma main caressait le sable chaud. J'aimerais voyager, sans avoir d'attaches, pouvoir aller n'importe où quand je veux. Me balader un jour à Brighton Pier puis m'allonger dans la neige du Canada le jour d'après. Faire des rencontres, s'attacher, se manquer puis se revoir et simplement profiter de ces instants qui nous réunissent.

La journée se passe, sans surprise j'ai eu le droit à des coups bas de la part de mes anciennes amies alors que je les vois se moquer de moi je repense à ce qu'Archie m'a dit hier. Je ne pense pas qu'il parlait simplement de ma balle. À mon avis il se fiche de savoir comment va mon arcade aujourd'hui, si j'arrive à hausser le sourcil ou à le froncer. Mais comment être plus forte ? J'ai l'impression que je me suis mise dans un trou profond et qu'à chaque fois que j'essaie d'en sortir on rebouche de plus en plus le trou si bien qu'il m'est impossible de faire quoi que ce soit. Si seulement j'avais quelqu'un à qui parler. Je sais que j'ai Eddy, mais Eddy n'est pas là quand me fait du mal. Eddy n'est là que quand tout va bien. J'aimerais pouvoir parler à quelqu'un de la réalité.
À la fin des cours je me dirige vers la salle d'étude pour travailler. Ma mère me force un peu la main pour que j'y aille après les cours, comme si la journée n'était pas assez fatigante. Sur le chemin j'aperçois Archie qui plaque une jeune fille contre un mur. Il faut toujours que je me mette dans des situations gênantes. Je ne sais pas trop où regarder. J'imagine qu'Archie doit avoir du succès auprès des filles. Son regard croise le mien quand ils s'embrassent alors que je m'étais jurée de ne plus les regarder pour ne pas créer une situation embarrassante. Raté !
Je détourne directement les yeux, j'ai l'impression d'être une voyeuse. Je jette un dernier coup d'œil à Archie et j'aperçois qu'un sourire se dessine sur ses lèvres. Il a vraiment un grain. Déjà pour embrasser une fille, que dis-je, pour pratiquement s'envoyer en l'air avec cette fille au milieu de la cour. Leurs baisers n'avaient vraiment rien de chastes. Oh non, je suis vraiment une voyeuse... J'arrive enfin à la porte de la salle d'étude qui est détachée du bâtiment du lycée pour mettre les élèves dans le « confort absolu et augmenter leur concentration et donc leurs capacités scolaires [...] » ou quelque chose dans le genre.
Je m'installe à une table vide un peu en retrait des autres tables et je commence à travailler alors qu'il est seize heures. J'arrive facilement à me concentrer et quand je sors il est dix-huit heures trente et je suis morte de fatigue.

Je rentre chez moi à pieds, c'est mon moment de repos. J'écoute Walking with a Ghost de Kadebostany puis j'arrive à la maison. Ma mère me demande si tout s'est bien passé à l'école. Je lui dis que oui et ensuite je change de sujet en disant que je suis fatiguée et que je vais m'allonger. Elle entre quelques minutes plus tard avec une tasse de thé bien chaud.

- Je sais que tu travailles beaucoup en ce moment et je suis fière de toi. N'oublie pas que si tu fais ça c'est pour avoir un bon avenir...


Je connais le discours de ma mère par cœur. Elle me le répète depuis que j'ai l'âge d'aller à l'école. Elle va me dire que les femmes ont moins de chances de se faire reconnaître dans le monde du travail encore aujourd'hui et que je dois être parfaite pour ne laisser le choix à personne de me faire bien payer et d'être bien placée. Je ne l'écoute presque plus et à la fin de son discours je me suis déjà endormie.

- Je ne comprends pas pourquoi on nous bassine avec notre futur. Est-ce qu'à dix-sept, dix-huit ans on est censé savoir ce qu'on veut faire pour le reste de notre vie ? Est-ce qu'on est censé à notre âge se dire : « C'est comme ça que va se passer ma vie plus tard et pas autrement. » Je suis désolée mais pour moi ça ne se passera pas comme ça. Je veux avoir le choix encore plus tard, je veux me tromper et me dire que j'ai fait des erreurs dans ma vie. Mais des erreurs qui m'apprendront des choses, qui me donneront de l'expérience. Et non je ne veux pas être parfaite ! Je veux apprendre des choses même à quatre-vingt ans.
- Je pense que ta mère s'inquiète pour toi et qu'elle veut être vraiment sûre que tout aille bien pour toi quand elle ne sera plus là pour le vérifier d'elle-même. Mais je suis content que tu réagisses comme ça, je pense que tu es dans la norme ahah. À cet âge personne ne peut réellement se projeter dans l'avenir de manière concrète, tout simplement parce que nous sommes trop occupés par notre présent, par les traquas de la vie quotidienne en tant qu'adolescent.


Eddy est toujours là pour me rassurer, c'est réellement la seule personne à qui je peux parler sans crainte d'être jugée. Nous décidons de profiter du reste de la nuit et de ce merveilleux paysage que mes rêves nous offrent. Nous sommes sous des cerisiers en fleurs, dans l'herbe la plus verte que je n'ai jamais vue. Adossés au tronc, Eddy me parle de musique, sûrement un de mes sujets préféré. La musique me rend libre, en quelque sorte. Disons que quand j'écoute de la musique je ne suis plus la même. J'oublie mes craintes, je suis dans une bulle où personne ne peut entrer à part moi. Nous parlons tous les deux de la sensation que nous offre la musique. Je ne vois pas le temps passer en compagnie d'Eddy, sûrement parce qu'il me fait tout oublier grâce à son sens de la conversation. Il interrompt notre discussion puis me dit qu'il est tant de se quitter. Je déteste ce moment, j'aimerais rester avec lui pour parler toute la journée et qu'on ne se quitte jamais. Il me serre dans ses bras, je sens son léger parfum, il sent le linge propre. Je ne veux pas...

Le réveil n'a pas le temps de sonner que je l'ai déjà éteint. Je reste assise à me demander ce que la journée me réserve. Je me lève et j'ouvre la fenêtre avant d'aller directement sous la douche. C'est tous les jours la même choses, quoique mes camarades innovent dans les coups bas qu'elles me font. Mais pour moi ça revient tout le temps au même. Je vais au lycée, on m'humilie, je travaille, je rentre et je dors pour voir Eddy plus longtemps. Le lendemain je me réveille et j'ai peur de ce qui va se passer. Et ça recommence. Je pars de chez moi, il fait assez froid dehors alors j'ai du mettre un gros pull et des bottes. Je mets mon casque comme tous les matins et j'écoute Clap your hands de Parov Stelar pour me donner un peu de courage.
J'arrive au lycée quand la cloche sonne et je vais en cours de mathématiques, la matière que j'aime le moins. Je m'assieds à ma table toujours vide. Les élèves rentrent tous, me regardant avec dégoût, comme d'habitude. Rien ne change, toutes mes journées sont les mêmes.
Archie rentre en dernier, à la limite du retard. Il s'assied à côté de moi, pourquoi ? Je suis un peu nerveuse. Je n'ose pas vraiment le regarder, tandis que personne dans la classe ne se gêne pour lui adresser un regard de surprise extrême. En même temps je peux les comprendre. Personne ne s'assoit à côté de moi depuis un long moment. Le professeur interrompt ce moment gênant par un raclement de gorge. Le cours commence.

- Alors madame la voyeuse, c'est maintenant que tu n'oses plus me regarder ? Pourtant hier ça ne te gênait pas tant que ça non ? Dit-il avec un air amusé.

Je ne sais vraiment plus où me mettre, j'avais complètement oublié ce moment. Finalement tous les jours ne se ressemblent peut-être pas tant que ça. Je tourne la tête longtemps vers lui, me pinçant la lèvre inférieure de mes dents. Il se lève et retourne à sa place, comme si de rien n'était. C'est quoi son problème ? Son but c'est de me mettre mal à l'aise ?
Je lève les yeux vers le tableau pour faire comme si de rien n'était mais je suis encore rouge et tendue sur ma chaise. Les autres me regardent. Tout se lit sur leurs visages, ils se demandent ce qu'il m'a dit, s'ils doivent lui aussi l'exclure ou pas. Mais on dirait bien qu'Archie est indifférent à ces regards puisqu'il dort tranquillement sur sa table. Le cours se termine, je me prépare à recevoir un interrogatoire de la part des filles de ma classe qui ont des cœurs dans les yeux quand elles le voient. Et ça ne loupe pas, à peine je suis sortie de la salle qu'une fille du nom d'Emily vient me parler avec un air méprisant. Elle est accompagnée de ses amies.

- On peut savoir ce que t'as dit Archie ? Vous vous connaissez tous les deux ?
- Il t'a dragué ? Intervient une autre fille derrière Emily.
- Tu parles, qui voudrait la draguer ? Dit Emily en riant, comme si elle avait dit la plus grosse bêtise possible.

Prends sur toi... Elles veulent te blesser... Montre que ça ne t'atteint pas !
Elles forment un cercle autour de moi.


- Je...

Soudain elles s'enfuient en courant. Je me retourne, elles courent voir Archie qui sort en retard du cours, sûrement parce que le professeur a du lui faire la morale vu qu'il dort en cours.
Je les entends glousser et parler à Archie avec une voix mielleuse. Pendant qu'elles tentent une approche tout sauf discrète, Archie qui semble venir de se réveiller répond à peine puis part avec comme seul signe d'au revoir un mouvement très bref de la main. Emily semble déçue qu'il ne soit pas directement sous son charme.
Je profite de leur débat sur la signification de son au revoir pour m'éclipser. J'ai eu chaud !
Il faut que je prépare une excuse pour si elles reviennent me demander. Leur dire la vérité est tout simplement trop barbant et elles penseront que je mens. Mentir pour ne pas croire que je mens, je deviens complètement folle. De toute façon je ne veux pas qu'il se fasse persécuter.

Je me rends en géographie, nous parlons de Londres comme étant une ville mondiale. J'aimerais aller à Londres, je n'habite qu'à quelques heures de Londres mais je n'y suis jamais allée. Je regarde la carte de l'Angleterre juste en face de moi et je m'imagine faire le tour de l'Angleterre en passant par Hastings, Dover et tout le reste de la carte. J'en oublie même le cours, il va falloir que je rattrape encore mon retard en salle d'étude. La journée se passe, comme d'habitude j'ai des remarques blessantes. J'essaie de ne pas les écouter pour sortir du lycée moins blessée mais c'est impossible, je les entends dire des choses horribles sur moi en m'insultant. Je sors des cours et vais directement en salle d'étude pour rattraper ce que j'ai manqué en géographie. Je me concentre un maximum.

Soudain je pense à Eddy et mon cœur palpite. Aimer quelqu'un qui n'existe pas c'est encore pire que d'aimer quelqu'un qui ne vous aime pas. La nuit je l'aime en secret, riant sous son regard, le matin je pleure son absence.   

~Musique de fin de chapitre~ 

Find me in your dreamsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant