On Top Of The World.

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- 20 Juillet 2006   

Cela faisait déjà trois jours que je rejoignais mon amie sur la plage où on jouait avec Shadow pendant des heures. Au cours de nos journées remplies de fou-rires et de découvertes, elle m'avait appris à parler en langage des signes, du moins quelques mots comme « Bonjour », « Comment ça va ? », « Je vais bien et toi ? », « J'ai envie d'une glace à la fraise » et « Passe-moi le ballon », éventuellement. On s'amusait bien ensemble, on était heureux, on profitait de chaque moment passé ensemble comme on l'aurait fait d'un cadeau. J'aimais la voir rire. Pas l'entendre, puisque c'était impossible, mais le spectacle de son petit corps plié en deux alors qu'elle essuyait ses larmes après un fou-rire était le plus beau que j'aie jamais vu. Elle me traînait partout dans la station balnéaire, me montrait du bout des doigts des monuments que je ne connaissais pas encore et je lui payais une glace à la fraise, parce qu'elle adorait ça et surtout parce qu'elle m'embrassait sur la joue à chaque fois. Je ne comprenais pas vraiment cette obsession pour ce parfum en particulier mais je ne voulais pas lui proposer quelque chose d'autre. Elle semblait tellement heureuse avec son cône dans les mains que je ne voulais pas lui gâcher son petit bonheur. Elle était tellement jolie avec sa glace que je ne pouvais pas faire autrement que de lui sourire. Une fois elle s'en mis sur le bout du nez et j'avais explosé de rire avant de lui jeter une serviette en papier à la figure. Elle avait rougi avant de me tirer la langue et s'était essuyé la figure puis m'avait relancer la serviette sale à la tête. C'était comme ça entre nous. On se vannait, on s'envoyait des choses en pleine face, on riait, on courrait partout et Shadow nous suivait à la trace, aboyant joyeusement quand elle lui laissait le bout de son cône à manger. C'était une routine plaisante que de me lever le matin, attendre que Greg ait fini de me préparer mon petit-déjeuner et de filer sur la plage. Je retrouvais ma famille dans la soirée et je leur racontais ce que j'avais fait. Papa ne m'en voulait pas de les déserter, il disait qu'il en profitait pour se reposer et Greg avait trouvé une bande de potes avec qui il sortait dans la journée puis dans la nuit. Tout était si simple ici, le soleil brillait toute la journée, je me baladais en bermuda avec une paire de Vans et je ne me souciais pratiquement pas de ce à quoi je ressemblais. J'essayais tout de même de rester présentable pour ne pas faire honte à ma nouvelle amie mais elle semblait se ficher comme de l'an 40 de mon look. Pourtant, elle était toujours très jolie, elle, avec ses longs cheveux bruns qu'elle nouait en une queue de cheval ou qu'elle tressait pour éviter de les avoir dans les yeux. Elle portait souvent un vieux short en jean tout usé et effiloché au bout et un débardeur à volants avec, comme moi, une paire de baskets basses, des Converses blanches qui avait vécu mais qu'elle adorait, visiblement.

Nous avions rendez-vous sur la plage, tous les matins, à dix heures et demies. On se retrouvait avec le sourire aux lèvres, j'étais d'ailleurs toujours le premier arrivé, remarquai-je au troisième jour. On mangeait sur la jetée ce que nos parents nous avaient laissé pour pique-niquer ou bien on rentrait chez nous pour nous retrouver plus tard. Greg pensait que j'étais amoureux. Moi je pensais que j'étais heureux et que j'aimais passer du temps avec elle, que j'aurais voulu rester avec elle pour toujours.

Ce matin-là, elle n'était pas au rendez-vous. J'ai passé une heure à l'attendre sur la plage, à gratter le sable, à lancer un bout de bois, à chercher des coquillages et à faire des allers-retours entre notre lieu de rencontre et l'entrée de la plage. J'avais peur qu'il lui soit arrivé quelque chose. On ne sait jamais, elle aurait pu trébucher sur la route, se blesser, ou bien se faire enlever. Des tas de scénarios effrayants me passaient en tête.

C'est dangereux de s'attacher à quelqu'un quand on sait qu'on va finir par quitter cette personne. A chaque fois que j'y pensais, j'avais cette drôle de douleur qui me transperçait le cœur et qui me tordait le ventre. Je ne voulais pas partir d'ici, je voulais rester avec elle, je voulais qu'elle reste avec moi, je voulais qu'on reste ensemble, je voulais rester heureux. Je broyais du noir à ne pas la voir arriver. Elle avait une bonne heure de retard, ça n'était encore jamais arrivé. Avait-elle oublié notre rendez-vous ? Ou bien elle ne voulait plus me voir ?

You Are My Snowflake.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant