Chapitre 8

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Je repousse mon assiette loin de moi, la fourchette encore enfoncé à mi-longueur dans un morceau de pomme de terre baignant dans le jus d'une viande trop cuite et semblant être d'espèce bovine. Selon le menu tout du moins. Je préfère entamer le dessert, une part de tarte aux pommes. Bien que celle ci ne soit pas d'une apparence enviable, l'absence de goût permet d'avaler et d'avoir quelque chose dans l'estomac. Une fois mon piètre repas ingurgité, je me dévoue pour aller remplir le pichet d'eau, soulageant Tyler qui hésitait à y aller. Personne n'y est encore. Je profite du temps qu'il met à se remplir pour jeter un coup d'œil autour de moi, observant les visages des gens présents. Certains croisent mon regard avant de le lâcher aussitôt. Ici tout le monde essaye de se fondre dans la masse, de ne pas sortir du lot. Une fois remplit, je relâche la pression sur le bouton influant la pression de l'eau et me détourne de l'appareil. Tandis que je pars, une autre personne arrive pour prendre ma place, me frôlant la main au passage. Je lève les yeux vers la dite personne, et je croise pour la seconde fois de la journée un regard bleu ardoise qui me fixe. Une soudaine chaleur s'installe  sur la main qu'il a touché. Je repars lentement à ma place, n'excluant pas la possibilité qu'il soit en ce moment entrain de me regarder. Et au fond de moi, je crois que ça me plait.
Une fois revenu à ma place, je me sers de l'eau et garde le silence. Je m'empare du petit comprimé bleu que j'avale avec une gorgée d'eau, ensuite vient le tour du cachet blanc. Celui la est plus gros et j'ai du mal à l'avaler du premier coup. Ces deux là passé, il ne reste plus que le sachet jaune.
Une fois nos repas hétérogène avalés, nous jetons et rangeons nos plateaux à l'endroit prévu à cet effet avant de prendre le chemin menant vers l'extérieur du bâtiment. Une heure et demi de pause nous sépare de l'heure maths. Cette matière est la seule complètement obligatoire. Il paraît que résonner et faire des maths aide à structurer l'esprit, en d'autre termes nous aide à rester concentrer et diminue les risques. Il est d'ailleurs conseillé de résoudre des problèmes où équations durant une crise de démence. Mais pas seulement de folie, la sénilité aussi est aidée par cette monstrueuse matière. Qui aurait crut que Thales, Pythagore ou encore Euclide avait non seulement trouvés une manière de compter, mais également une solution pour atténuer quelques problèmes humains.
Pour aller dans la cour extérieur il nous faut passer par un des couloirs du bâtiment scolaire. Tyler ouvre grand la porte et pénètre dans le couloir éclairé d'une lumière jaunâtre. Tandis que nous avançons en parlant de tout et de rien, des éclats de voix nous parvienne. Au détour du couloir nous arrivons devant une scène assez banale. La porte d'une salle est ouverte, délivrant le spectacle d'une prof d'un certain âge et d'un élève, semblant être en différent. Nous aurions pus dépasser la salle et ne pas nous arrêter, c'est sûrement ce qu'il se serait passer dans n'importe quel autre établissement. Mais comme vous l'auriez compris, nous ne sommes pas dans n'importe quel établissement. Et quand cet élève visiblement énervé plaque la prof contre le mur, ses mains agrippées au cardigan beige de la femme et la secouant fermement, nous réagissons assez vite, sachant comment un tel incident pouvait dégénérer. Tyler  attrape le jeune homme par les épaules, tandis que je me place devant lui, de manière à le séparer de la professeure. Celle ci s'effondre le long du mur sous le choc, April se précipite vers elle pour l'écarter du garçon et vérifier qu'elle n'a rien. P.J quand à lui recule légèrement de la scène, le regard fixe. Le garçon se débat violemment et donne des coups de jambes et de bras en criant que l'on ne comprend pas, que c'est indispensable et que l'on ne se souvient pas. Tyler lui maîtrise ses bras et moi je m'occupe de ses jambes. Je dois assez mal m'y prendre car j'entends Tyler jurer, juste avant qu'une de ses jambes se libère et m'atteigne à la tempe. Sous l'impact je trébuche et me retrouve sur les fesses. Ma tête tourne et je sens une démangeaison sous le nez. J'y presse ma main avant de la retirer et de voir qu'un liquide rouge la tâche. Je me relève lentement, la pièce tremble un peu. Cette fois c'est la voix d'April que j'entends jurer, bientôt suivit d'une autre. Une voix d'homme qui jure. Je serre les poings et fais un pas en arrière. Je veux le frapper, j'en ai envie. J'ai envie qu'il ai mal un peu, qu'une autre personne que moi souffre. Mais je veux aussi courir. Fuir. Loin, loin de tout. Loin de cette voix féminine qui crie, qui crie sans cesse. Loin de tout. Loin de ce bruits incessant.
Je sens que l'on m'agrippe les bras et me les maintiennent dans le dos. Je gesticule vivement pour me libérer, jusqu'à ce que quelqu'un pose ses mains sur mes oreilles et me fixe. Je regarde ses cheveux blancs, fixe ses yeux bleus et vois ses lèvres bouger, comme si elle parlait. J'essaye de me concentrer sur ce qu'elle dit. Peu à peu je déchiffre ses mots. Regarde. Regarde.
Mon champ de vision s'agrandit peu à peu tandis que ses mains sur mes oreilles ne calment pas les cris de la fille. Si seulement elle pouvait se taire. pourquoi elle hurle encore, elle n'a plus rien à craindre.
J'aperçois la prof affalée le dos collé au mur, le jeune garçon a quand à lui disparut, et dans un coin de la pièce un autre garçon est assit, ses genoux ramenés sur sa poitrine et les mains posées sur ses oreilles, les yeux fermés. Je le reconnait. P.J. Je fais un léger signe de tête et la blanche tourne lentement son regard. Elle tressaute quand ses pupilles se posent sur son Jules. Elle se retourne vivement, jette un regard derrière moi, puis fixe mes yeux. Je fixe mes pupilles sur les siennes, essayant d'oublier ces cris. Ils régressent lentement jusqu'à s'arrêter complètement.  Je hoche lentement la tête et elle me lâche doucement, avant d'accourir vers P.J. Elle l'entoure de ses bras, pose son menton sur le sommet de son crâne et murmure des mots. Une main protectrice vient caresser les cheveux du châtain.
L'étau qui me comprime les épaules se relâche peu à peu, jusqu'à me libérer totalement. Je me tourne vers Tyler, hoche la tête lentement, et lui demande d'une voix agacée.


- pourquoi elle a autant crié la prof ? Elle est pas bien.


Absence de réponse, je le regarde déconcerté, et croise son regard gêné.


- et bien ? qu'est ce qu'il y a ? Pourquoi  tu réponds pas ?

- Alex, elle n'a pas crié, elle a eut trop peur je pense.

- bah, c'est qui alors ?

- qui quoi ?

- qui a crié Tyler, une cri de femme.

- personne n'a crié, Alex.

- Hein ?


Je ne comprends pas, bien sur que si, quelqu'un à crié. Je ne suis pas folle tout de même. enfin, pas totalement... Je crois. Mais ce cri je l'ai bien entendus, je suis sur.

Folie du souvenir Où les histoires vivent. Découvrez maintenant