Il était déjà deux heures du matin. Pour clôturer cette nuit de folie, April m'emmena dans la grande roue où heureusement les handicapés comme ils m'appellent sont autorisés à monter avec une autre personne. On s'est retrouvé dans une cabine et on a commencé notre ascension vers le ciel et les étoiles.
Je ne pouvais m'empêcher de me plaquer contre la fenêtre pour mieux apercevoir les lumières de la ville. April a rigolé gentiment devant mon air ébahi.
- Alors comment as-tu trouvé ma "surprise" ?
Mon enthousiasme m'a trahi et j'ai raconté tout ce que j'avais adoré jusqu'à ce que je n'ai plus rien à dire. Elle a continué à sourire doucement en m'écoutant, comme une grande soeur face à sa cadette.
Jamais on ne m'avait regardé avec autant de tendresse. Ma mère me regardait avec dégoût et parfois même avec haine. Je n'étais qu'un échec. Et à chacune de mes rechutes, elle me le rappelait comme pour me torturer psychologiquement. April me souris à nouveau.
- Je suis contente que ça te plaise autant ! J'avais peur que tu trouves ça trop banal, que tu t'ennuies. Mais je ne t'ai jamais vu aussi heureuse depuis que je t'ai rencontré.
J'ai à nouveau contemplé le ciel étoilé, émue, et me suis écriée au bout d'une minute.
- Regarde une étoile filante !
Elle m'a répondu empressée.
- Vite fait un voeux !
Quel est mon souhait ? J'ai pensé très fort comme si ma détermination pouvait atteindre ce fragment fragile de l'univers qui disparaît dans le lointain, comme si mon voeux pouvait atteindre cette étoile fusant vers l'infini. "Je veux vivre."
C'est à ce moment que m'est revenu en mémoire l'accident d'hier. Et mes camarades et leurs dires. Je me suis tournée vers April et elle a froncé les sourcils en voyant que ma joie s'était volatilisé avec cette étoile. Je ne sais pas pourquoi mais quand j'ai parlé ma voix a pris la même sonorité que celle d'un enfant venant de se faire disputer. Une toute petite voix.
- April est ce que tu te sens obligé de venir car... tu as pitié de moi ?
Elle m'a regardé un instant surprise. Je m'attendais à ce qu'elle baisse les yeux et gênée qu'elle avoue que oui c'était la raison de sa venue tous les jours, mais elle m'a fixé dans les yeux sans ciller.
- Je croyais te l'avoir dit, Eve, je suis ta famille. Ce qui fait de moi ta grande soeur. Et entre famille on se sert les coudes et on n'abandonne pas un membre parce qu'elle n'a pas une roue de secours et qu'elle a crevé. C'est un peu bizarrement formulé mais tu comprends sans doute le rapport.
J'ai hoché la tête affirmativement tandis qu'une douce chaleur se répandait dans mon corps : je ne serais plus seule jusqu'à la fin. La vie m'a tellement déçu que je m'attends toujours au pire et que je donne rarement voir jamais ma confiance à qui que ce soit. Mais ce n'est pas le cas avec April. Elle a repris plus légère.
- D'ailleurs j'ai eu une idée tu vas écrire à tes parents pour leur dire tout ce que tu as sur le coeur. Comme ça ce sera fixé. Ils connaîtront ton ressenti face à cette éloignement et ça te permettra de te soulager un peu de ta rancoeur. J'ai un bon ami qui un jour m'a dit...
Elle pris une voix plus grave et masculine.
- Écrire, April, ça permet d'organiser tout ce qu'il y a là dedans.
Elle me tapota sur la tête et je rigolai en lui demandant l'âge de son "ami".
- Je te jure que ce n'est ni un vieux sage ni un moine occulte. Il a lui aussi dix-sept ans. Il m'aide dans mes recherches. Je te le présenterais un de ces quatre.
J'ai faussement rigolé. Je venais de me rappeler que malgré que j'allais mourir la vie allait continuer, April continuerait à avancer en cherchant son amour perdu, mes parents se remettront de ma mort et fonderont sûrement une nouvelle famille avec mes futurs frères et soeurs que je ne connaîtrais pas. Et la Terre continura de tourner et Monsieur Temps continura à voler le temps des autres.
Comme un enchantement qui prend fin, le tour fut terminé et on est retourné les deux pieds sur terre. April s'arrêta devant une boutique où une vieille prédisait soit disant l'avenir. Elle me proposa de me payer mon tour mais j'ai refusé. Je n'y croyais pas vraiment et je ne voulais pas qu'on me donne de faux espoir. Et si c'était pour m'annoncer que je mourrais dans une semaine je n'avais pas besoin de l'entendre me rappeler, ni d'ailleurs qu'April soit en même temps au courant.
Un léger malaise me prit tandis qu'on attendait dans la file. Comme un mauvais pressentiment à venir. J'ai rangé cette inquiétude dans un des tiroirs de mon esprit et ai tenté de me relaxer. Mais une fois de plus j'ai oublié que mon monde ne peut pas être tout rose. Après la prédiction des plus favorables pour April je fus prise d'une quinte de toux qui m'arracha la gorge par sa violence.
Je n'arrivais pas à la stopper et ma trachée était en feu, irritée et coincée par les muqueuses qui s'y étaient agglomérés, la pollution de la ville n'avait fait qu'empirer mon cas, déjà peu glorieux. April a tenté de m'aider tandis que je me pliais en deux et que des larmes de souffrance me montaient aux yeux.
Mais elle ne pouvait rien faire et elle s'en rendit compte. Elle a saisi son téléphone et à composer le numéro des pompiers puis des urgences. Elle ne cessait de me répéter de rester avec elle mais je me sentais glisser lentement et inexorablement vers l'inconscience. Et c'est sous ses cris presque hystérique que le gouffre m'a englouti.
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Hello tout le monde,
J'ai enfin fini mon stage de Jeunes Sapeurs Pompiers et je l'ai réussie parfaitement 🎉🎊.
Je suis tellement contente, désolée de ne pas avoir pu poster j'étais trop fatiguée le soir...😅Mais je suis de retour avec ce chapitre un peu triste de cette histoire. L'histoire d'Eve, cette fillette qui malgré sa maturité précoce, a su un peu retrouver sa joie. Merci beaucoup à ceux qui suivent cette histoire qui traduit le quotidien de milliers, de millions même de jeunes dans le monde.
Tchüss !!!
La Bluedraak qui fête sa réussite à son stage 😉
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Eve ou l'histoire de ma mort
Ficção AdolescenteEve a dix ans, elle aimerait être comme tout le monde, souriante et insouciante. Mais elle ne peux pas et ne le pourra jamais. Car Eve est malade. Et sa maladie la force à rester cloîtré à l'hôpital dans son lit. Il ne lui reste qu'un mois pour déco...