Chapitre 2 : En famille

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A la nuit tombée, Falnaele décida d'enfin rentrer chez elle auprès de sa famille. Ne souhaitant pas alerter sa fille sur la situation, elle prit le temps nécessaire pour retrouver son calme après son échange avec Elanora. La guerrière aux deux lames en profita pour considérer les différentes options qui s'offraient encore à elle.

Il était bien entendu hors de question d'accepter la sentence. Elle se retenait de se ronger les ongles jusqu'au sang à la seule idée d'envoyer son époux à la mort. Essayer de convaincre les membres de la tribu d'affronter le dragon semblait être valide. Ou au minimum, de ne pas s'occuper de lui, et de le laisser tranquille quitte à vivre sur les réserves une semaine ou deux sans entrer sur le territoire de chasse. Falnaele hocha la tête négativement. Cet argument serait facilement réfuté, l'agressivité du dragon ne permettait pas d'assurer la sécurité des Eknatel en ignorant le problème.

A moins de demander le droit à la danse. Cette tradition féline permettait à une guerrière d'affronter les membres de sa communauté en duel, afin de les forcer à suivre sa propre décision. Cette méthode, basée sur la violence et non sur la raison, rappelait les origines brutales de son peuple de prédatrice assoiffée de sang. Considérant sa position dans l'assemblée, Falnaele abandonna cette possibilité. Il lui faudrait dans son cas affronter toutes les guerrières du clan une par une, et est-ce qu'elle pourrait seulement affronter Elanora après leur discussion ? Ce serait une véritable trahison envers son ainée.

— Dommage... fit Falnaele tout haut alors qu'elle portait une main au menton pour réfléchir à d'autres solutions, tout en faisant rouler sur son doigt l'alliance qu'elle portait à la main gauche, signe de son mariage humain. Notre clan entier ne ferait pourtant qu'une bouchée d'un dragon blessé, cette chasse serait si palpitante. Et me voilà à considérer des options déshonorantes comme la fuite...

Ce serait son dernier recours. Et encore, fuir pour aller où ? Les clans de félines n'acceptent pas les membres d'autres tribus. Sans aucun soutien, Yseitora serait une terre bien trop dangereuse. Le pays ne permettait pas à une famille isolée de survivre avec une enfant aussi jeune que Falnara. Aussi prometteuse sois sa fille, ils finiraient tous les trois par périr. Se rendre jusqu'à Tristaigle serait tout aussi ardu, la frontière humaine se trouvant à l'ouest d'Yseitora. Le clan Eknatel vivant à l'extrême est du territoire, les dangers d'un tel voyage seraient bien trop nombreux. Falnaele se souvint être passée à deux doigts de la mort lorsqu'elle partit en quête d'un mâle de Tristaigle il y a dix ans de cela.

Et quand bien même ils parviendraient à atteindre la contrée humaine... Celle-ci pourrait encore être secouée par les guerres entre ses différents duchés. Falnaele aimait l'humanité, ses coutumes, ses traditions et leur façon de vivre. Malheureusement, les humains se déchiraient entre eux bien trop souvent, et leurs nombreux affrontements placés sous le signe de la cruauté. Si par miracle sa famille arrivait en période de paix... Elle serait bien mal accueillie.

Des villages en reconstructions n'auraient pas besoin d'étrangères d'une autre race à nourrir avec leurs maigres ressources. La guerrière aux deux lames savait l'inutilité de négocier avec les humains sur ce point. Tolérant avec leurs voisins, ils se recentraient bien vite sur leur propre communauté lorsque les temps devenaient durs. Bien que toutes les félines naissent d'un père humain, les Tristaiglons préféreraient aider un gobelin vivant à l'orée de leur village plutôt que des vagabonds. C'est cette propension à ne voir que ce qui est proche d'eux qui les conduisaient à ces guerres fratricides...

Se rapprochant de sa demeure, les pensées de Falnaele furent interrompues par le bruit du métal qui s'entrechoque. De courts fracas, suivis d'une pause plus longue, à un rythme régulier. Cette cadence ne lui laissait pas le moindre doute, il s'agissait des lames de deux épées qui se percutaient. Ses yeux de félines percèrent l'obscurité de la nuit naissante, pour découvrir la source de ce vacarme retentissant à présent à travers toute la forêt.

Falnaele l'acharnéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant