Falnaele l'acharnée

Chapitre 4 : L'ascension

Les arbres se raréfiaient peu à peu tandis que Falnaele bondissait de branche en branche vers l'est. Depuis déjà une heure, elle se déplaçait ainsi en direction des frontières d'Yseitora, chaque nouveau saut la rapprochait de Refidesza, la terre des dragons. Cette contrée de reptiles empêchait toute féline de découvrir ce qu'il existait de ce côté de Meiralys. Le pays des guerrières, coupé au sud par le territoire des géants, et au nord par la Mer Intérieure, ne laissait que l'ouest avec Tristaigle comme seule possibilité d'exploration à ses félines.

Falnaele apercevait les contours des montagnes de Kilbro se dessiner devant elle avec de plus en plus de précision, ces massifs constituaient la limite absolue à ne pas franchir pour les félines du clan Eknatel. Personne ne revenait en vie des territoires des dragons qui s'étendaient au-delà de ces sommets. La forêt laissa place à une terre de plus en plus rocailleuse, et il devenait difficile pour Falnaele de se déplacer au couvert des feuillages. La guerrière aux deux lames prit un instant pour considérer la meilleure route à suivre.

"L'effet de surprise est ma meilleure arme", estima-t-elle en se laissant pendre à une branche par sa queue, ses jambes en tailleur et bras croisés, malgré sa tête qui pointait vers le sol. "Le dragon doit surveiller notre territoire depuis les montagnes, il existe quelques plateaux qui permettent d'avoir une vue complète sur notre forêt, l'endroit idéal pour repérer des proies insouciantes entre les arbres. Si je m'approche face à la montagne hors du couvert des feuillages, il va me repérer et me régler mon compte en moins de deux. Siroele m'a accordé jusqu'à l'aube pour l'éliminer, je dois utiliser ce temps intelligemment."

Falnaele décida de bifurquer vers le nord. Dans cette direction, la forêt s'étendait pendant encore plusieurs kilomètres lui permettant ainsi d'être hors de vue de la créature, et elle pourrait contourner une partie Kilbro pour commencer son ascension dans son dos. Elle se trouverait également contre le sens du vent, ainsi son odeur n'irait pas sous les narines de son ennemi. La solution idéale pour s'approcher furtivement, et augmenter ses chances de succès. Sa route vers la victoire passait par ce très long détour.

Au bout de quelques centaines de mètres, Falnaele s'arrêta nette sur une branche, sur laquelle elle s'allongea de tout son long pour être la plus discrète possible. Ses oreilles félines captaient des sons à proximité, très différents de ceux d'animaux sauvages. Observant son environnement de ses yeux aux pupilles fendus de prédatrices, elle repéra la source des mouvements. Trois gobelins patrouillaient hors de leur tunnel, arbalètes en main. Ces immondes créatures à la peau verte, dont la puanteur atteignait déjà les narines de la guerrière malgré la distance, guettaient leurs alentours en suivant quelques traces au sol.

"Ils chassent", constata Falnaele les voyants se faire des signes de tête, en continuant de suivre les traces avec le moins de bruit possible. "Leur proie doit être assez proche s'ils ne gargouillent pas dans leur langage immonde. S'ils sont armés de leurs arbalètes... Ils doivent avoir leur poison sur eux."

La féline fit un bond silencieux vers une branche proche pour avoir une meilleure vue sur les trois créatures. Les yeux rivés sur un de leur carquois en peau duquel dépassaient leurs carreaux d'arbalète, elle aperçût quelques gouttes d'un liquide noir qui coulait négligemment au sol. Falnaele ignorait la composition de ce liquide, mais connaissait tout de ces effets. Mortels sur la plupart des créatures, le poison remplissait les poumons de la victime de pus, comme si son corps pourrissait de l'intérieur et venait se déverser dans les voies respiratoires. Inodore, le poison était un piège qui prenait la vie de plusieurs félines chaque année lorsqu'elles traquaient une proie infectée déjà infectée. Seuls les gobelins semblaient insensibles à ce poison, si bien que toute créature qu'ils atteignaient avec leurs flèches leur était réservée.