IV. Visite

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  Maman s'efface, laissant entrer une silhouette bien connue. Je souris. Je suis pleine de gratitude. Je n'en peux plus d'être seule. Adèle s'assied au bord du lit tandis que je me redresse, et sans un mot – parce qu'ils n'ont pas leur place ici maintenant, pas encore – elle me serre fort, fort dans ses bras, et je réponds en l'étreignant aussi fermement que me le permettent mes bras endoloris. Et on reste comme ça longtemps, longtemps et seules parce que Maman, comme Ulrich, a le sens de l'intimité et de la politesse. Je suis contente qu'elle soit là. Je suis ravie qu'elle soit là. Je suis chanceuse de l'avoir. Mais est-ce qu'elle... pleure ? Toujours sans mot dire, je me sépare de ses bras qui m'enlacent, et calmement je la prends par les épaules pour la regarder bien en face. Dois-je être triste ou choquée ? Je suis surprise c'est certain. Adèle ne pleure jamais. Jamais jamais. Mais même si je suis un peu confuse, moi je ne peux pas pleurer, même si je le voulais. Je ne pourrais pas, tout simplement parce que je ne me rends pas compte. Mon cœur ni mon esprit ne perçoivent distinctement les raisons de toutes ces larmes. Je sais, pourtant, je vois ces flashs et je ne suis pas stupide, je les interprète. Mais ça ne suffit pas. Ces flashs, ce n'est pas moi que je vois dedans, c'est encore une inconnue, une malheureuse inconnue qui cependant se rapproche à chaque instant un peu plus de moi.

Donc, j'essuie de mes pouces les larmes qui strient le visage de mon amie. Je lui souris, et je le fais sincèrement parce que je suis tellement contente, je suis si soulagée de la voir, je n'en peux plus, je n'en peux déjà plus de cette chambre vide et sombre.

Adèle renifle et c'est le signe qu'elle se reprend. Elle pose ses mains sur ses genoux, et c'est elle qui m'observe maintenant. Son regard est traversé par tant de choses à la fois... J'arrive tant bien que mal à y lire de la tristesse, de la compassion, du regret. De la culpabilité ? Non. J'ai rêvé. Mais elle ne souffle mot. Vraiment je ne la reconnais pas. Adèle aussi calme, Adèle aussi silencieuse, Adèle aussi immobile, Adèle aussi fébrile ; j'en suis presque à me demander s'il n'y a pas plus que ce que je crois derrière cette soirée. Pas maintenant Charlotte, pas maintenant, pour la troisième fois. Je verrai ça plus tard.

Et puis c'est normal, il faut voir l'état dans lequel est Maman. Ce n'est pas si étonnant que ça.

Adèle lance un regard à la ronde dans la chambre. Elle se retourne vers moi, l'air décidé. « Bon, c'est complètement la mort ici, faut que tu bouges. » Enfin, ma meilleure amie. J'ai retrouvé ma meilleure amie. « Je voudrais bien. Mais Maman est contre. Pas le droit de me lever tant que je ne me suis pas « reposée. » Elle me lance son regard spécial « parents », qui peut être traduit par « oh les vieux shnoks », voire même « oh les gros chieurs ». Le résultat est toujours le même. Je souris gentiment. Combien de fois m'a-t-elle servi ce regard en me racontant à quel point ses parents super bobos l'exaspéraient.

Pas le temps de réagir : elle se lève et se dirige vers la porte en criant « Barbaraaa ! », et je l'entends dévaler les escaliers : « Laissez Charlie se lever s'il vous plait, ça lui ferait du bien et puis j'aimerais lui changer les idées... ». C'est ma sauveuse.

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{Oulà c'est encore bien court tout ça ! Mais bon, je préfère faire trop court que trop long. ;)

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CharlotteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant