Perdue dans la foule

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Ce n'est que lorsque l'on est amené à en vivre que l'on prend conscience de la souffrance qu'engendre un accident, quel qu'il soit. Et je n'ai pas échappé à la règle, bien au contraire. Je vivais dans ma petite bulle de douceur, adolescente consciente mais insouciante, souriant, riant et pleurant. J'affrontais les peines de la vie, et profitait des bonheurs qu'elle m'offrait, des peines de cœur aux après-midis ensoleillés en passant par les fous rires, les révisions de dernière minute, les goûters improvisés, les vacances au ski et les week-ends maussades et pluvieux, les discussions qu'on veut philosophiques et les longues heures passées à analyser les gestes de ce garçon là, tu sais bien, celui qui t'as regardée quand on est passé. Les messages tard le soir, les nuits blanches et les grasses mat', les profs absents et les devoirs qu'on fait la veille en catastrophe, les exams qu'on a bien bossés mais qu'on foire tellement on est stressé. Les musiques qu'on découvre, les reproches des parents, les livres qu'on dévore à la lueur de la lampe, les entraînements épuisants, suivis de gâteaux coupables, les déceptions, les p'tits riens qui font sourire, le futur qui fait peur mais qu'est-ce qu'on a hâte.

Oui de tout ça j'ai bien profité. Jeune fille en passe de devenir jeune femme, qui se questionnait sur sa place et sa fonction dans sa société de consommation dont elle était le jouet consentant. Mais il suffit d'un coup de vent pour que tout s'envole. Pour qu'une fois encore on se questionne, qu'une fois encore on remette en question ce monde dont on fait les frais, parce qu'après tout qu'est-ce que je fous là, à quoi je sers et qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire ? Qu'on se dise merde à soi-même, qu'on se répète qu'on voulait pas, qu'on pensait pas, que non on croyait pas mais que oui les faits sont là sous nos yeux et c'est déjà trop tard...




la dame en noir qui te vola ton enfanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant