Cendrillon_1944

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Hiver 1944.

La France est sous l'occupation nazie, il est vingt-trois heures trente-cinq, le couvre feu est tombé. Yael s'apprête à faire soit la plus belle ou la pire erreur de sa vie. Laissez moi d'abord vous racontez comment elle en est arrivée là.

A neuf ans Yael perdit sa mère emportée par une pneumonie. Son père se remaria avec une femme aux airs angéliques cachant un caractère de diable, sans parler de ses deux horribles filles. Toutes les trois étaient blondes aux yeux bleus. Le jour de ses quinze ans, son père ne rentra pas de sa réunion avec d'autres résistants. Il avait été arrêté par la Gestapo et envoyé au camp de concentration pour être juif et avoir comploté contre le Führer. Il est mort deux mois plus tard.

Yael reste donc seule avec son chagrin en compagnie de sa belle-mère. Ses filles la surnomèrent par pure méchanté Cendrillon par rapport aux cendres dans les camps où on gaze et brûle "ses semblabes" comme elles aiment tant lui rappeller. Pendant deux ans Yael subit les coups bas de la vie et s'occupa des tâches ménagères. Car sa marâtre ne l'envoiyait plus à l'école sous prétexte que cela était trop dangereux surtout si on apprenait qu'elle est juive. Cela mettrait en danger ses chères petites qui ont rejoint les jeunesses hitlériennes "grâce" à leur profil parfait.

Cendrillon, ou Yael, a maintenant dix sept ans. Et sa tristesse s'est dorénavant muttée en une peur terrible. La peur que sa belle mère ou ses filles la dénoncent à la Gestapo. Elle est soumise à tous leurs ordres. Un jour, une de ses soeur lui dit cette phrase "Rejoins la résistance. Douée comme tu es, tu mourras plus vite !". Alors c'est comme une révélation. Cendrillon l'écoute et rejoint le mouvement de résistance auquel appartenait son père.

Ce soir elle doit dérober des plans et revenir avant minuit, la voiture qui l'a emmenée ne prendra pas le rique d'attendre plus longtemps. C'est sa première mission. Deux gardes sont postés devant la porte et comme prévu ils partent à vingt-trois heures quarante. Quand on n'entend plus le son de leurs bottes sur les pavés de pierre, le signal est donné et Yael se glisse à l'intérieur du bâtiment. Elle esquive gracieusemant tous les obstacles. On a l'impression qu'elle valse avec la liberté. Puis elle arrive devant la porte et l'ouvre après une inspiration pour calmer les battements de son coeur. Elle pénètre dans la pièce, aperçoit les plans, les range précipitemment dans son sac et... Une main l'attrape brusquemment. Elle retient un cri de terreur et se tourne rapidement, pensant que jamais elle ne sera dehors avant minuit, voir dehors tout court.

C'est un soldat à peine plus âgé qu'elle. Pendant une seconde elle a presque pitié pour lui. Pauvre gars envoyé loin de chez lui pour mourir. Ils se regardent quelques instants sans savoir quoi faire. Il a les yeux bleus tirant sur le gris et des cheveux blonds avec des mêches plus foncées que beaucoup d'autres auraient préféré déteindre. Pas si aryen que ça donc... Une voix sonore parlant allemand provenant du couloir les fait sursauter. Un ennemi ne va pas tarder à entrer dans cette pièce, elle se débat mais il la tient encore plus fermement et prend un air résigné. Il ouvre une porte et court toujours en tenant la jeune fille qui essaye tant bien que mal de le suivre. Elle trébuche sur les graviers et manque de tomber plusieurs fois par terre mais le soldat n'arrête pas sa course folle, se contentent de la relever brusquement.
Ils débouchent sur une ruelle sombre et il lui lâche le poignet, lui crie "Schnell !" qu'elle traduit par "Vite !". Elle fonce sans réfléchir tête baissée, sans se retourner. Minuit quinze, elle s'arrête pour reprendre son souffle. C'est en touchant le poche de son manteau qu'elle réalise avec effroi qu'elle a laissé sa dague là bas, sa dague comportant son nom.

Pendant deux jours elle ne peut sortir de chez elle car sa belle mère et ses filles ont découvert sa petite escapade. Pendant se temps là elle ne pense pas aux plans qu'elle a dérobé mais à ce jeune soldat et son regard de pierre, qui lui avait sauvé la vie et de plus lui avait laissé les objets volés alors qu'il avait tout vu. Car elle était persuadée qu'il était dans la pièce depuis le début. Comme s'il l'attendait.

Le matin du deuxième jour, on sonne à la porte au moment où elle se trouvait dans le hall. Une de ses belles soeurs la pousse pour aller ouvrir et lance un sonore "Heil Hitler !" prouvant qu'elle est officiellement collaboratrice. Dans l'entrebaillement de la porte, un soldat allemand fixe Cendrillon. Ou plutôt lui et dans ses mains il tient la dague de Yael. Alors il fait une chose impensable, il lui sourit et se précipite vers elle, lui récitant des mots français sûrement appris par coeur : "s'enfuir-vite-résistance-tout-les deux" avec un accent allemand très prononcé. C'était la chance de sa vie. Passer des cendres à la liberté !

Et ce soir là deux âmes soeur rejoignirent les maquis.

Constellation poétiqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant