Chapitre IV

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- Sélina ! Cria Mathias en courant après elle.

Elle se retourna étonnée, et ralentit le pas, sans s'arrêter. Le garçon arriva, non sans avoir transpiré, au niveau de la jeune fille. Intriguée, elle le questionna du regard.

- Pourquoi t'es partie comme une furie ? On va pas te manger, viens avec nous faire connaissance ! Dit joyeusement le garçon, moi c'est Mathias mais tout le monde m'appelle Mat'. Donc toi, c'est Sélina ?

Elle acquiesça par un simple hochement de tête, mais ne dit rien d'autre.

- Euh... Bref, tu viens ? Les filles sont sûrement parties au parc, ça va être cool !

- J'aimerais aller à l'infirmerie, d'abord. Le proviseur m'a dit d'aller la voir dès que j'ai une heure de pause, alors...

- Le directeur ? T'as déjà des emmerdes ? Dit Mat', amusé.  

Le regard mélancolique , elle lui rétorqua tristement:

- Ça ne te regarde pas. Tu ne sais rien de moi.

- Ah... Quand tu auras fini, rejoins-nous !

- Mmm...

Sans un mot de plus, elle continua son chemin, et Mathias, interloqué par l’expression si abattue qu’elle lui avait montrée, décida de l'attendre à la sortie de l'infirmerie. Il avait la ferme envie de percer sa carapace, si grosse soit-elle, et de tout faire en sorte qu'ils deviennent proches. Sélina n'eût pas le temps de s'asseoir sur un fauteuil de la salle d'attente que l'infirmière l'invita dans son bureau.

- Comment vas-tu ? Lui demanda-t-elle. Dis-moi tout.

- Ça va, rien de spécial... Un gars de ma classe veut faire ma connaissance, je pense... et puis, il y a une fille avec qui je pense devenir amie.

- Ah oui ? C'est très bien, ça... Comment le sais-tu ?

- Oh, une intuition, comme ça... répondit-elle, le plus banalement possible.

- C'est tout ce dont tu voudrais me parler ?

- Non. Je voudrais juste un peu de glace pour ma brûlure, sur la clavicule. demanda-t-elle.

Après lui avoir fournit un petit glaçon enroulé dans un gant en coton vert, elle sortit en oubliant la proposition de Mat'. Celui-ci écarquilla les yeux en s’apercevant qu'elle l'avait ignoré. Encore une fois, il se précipita 

 - Hey ! Tu m'as oublié ?

- Tu ne m'a jamais dit que tu m'attendais, se défendit-elle après avoir sursauté.

- Tu vas où ? Je peux t'accompagner ?

- Non, laisse moi. J’ai besoin d’être seule. Je vais aux toilettes.

Elle lui lança cette fois un regard énervé, presque menaçant. Scotché, le garçon aux cheveux bruns et frisés attendit un peu avant de continuer :

- Tu veux peut-être m'ignorer, mais je ne vais pas baisser les bras aussi facilement ! Dans le fond, tu ne dois pas être méchante !

- Fais comme tu veux, mais ne vas pas aux toilettes avec moi, dit-elle dans un sourire.

Elle emprunta les escaliers principaux et alla directement aux toilettes. Là-bas, elle se regarda dans un des miroirs et vit sa petite tâche écarlate. D'habitude, cette trace était presque transparente et il fallait vraiment regarder sa gorge minutieusement. Elle alla se poser sur le rebord de la fenêtre et vérifia que tous les WC étaient inoccupés . Enfin Sélina pût être elle-même : à au moins trois mètres des robinets  elle réussit à faire couler l'eau et elle s'amusa à créer des animaux marins à partir de l'eau qui jaillissait des robinets. Un dauphin plongeait d'un robinet à l'autre, un orque nageait dans l'air, une sirène se regardait dans le miroir. Tel un chef d'orchestre elle dirigeait les jets d'eau pour les transformer en créatures loufoques. Ces moments de solitude devenaient alors de véritables périodes d'épanouissement et étaient de plus en plus fréquents. Depuis maintenant six mois, ses pouvoirs s'étaient développés, juste après l'accident.

La porte vitrée s'ouvrit brusquement et deux étudiantes entrèrent en s’esclaffant. Après un retour à la réalité, la jeune fille détruisit toutes ses créations qui ne formèrent plus que de grandes flaques d'eau. Apeurée, elle regarda les deux autres filles, en espérant qu'elles n'aient rien vu.

- Qu'est-ce-qu'il y a ? T'as un problème demanda sèchement la plus massive des deux.

Sélina baissa les yeux et resta muette, croyant bien faire. Les deux filles s'approchèrent en ricanant :

- Bah alors ? On est toute seule ? Et en plus on s'amuse à inonder les toilettes ? Rugirent-elles.

- Non... c'était déjà comme ça... essaya-t-elle de s'expliquer.

- Cherche pas d'excuse ! Pour d'aussi beaux mensonges, il faut bien une petite récompense... en s'adressant à la plus petite,  surveille la porte, je ne veux personne d'autre que nous trois dans cette pièce.

Agalina [En cours]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant