Aliumnos-L'Ensorceleuse

Chapitre 2

Tristan

- C'est une sorcière j'imagine, m'avancé-je.

- Tout juste, me répond Henri. Elle commence à faire beaucoup parler d'elle en laissant des cadavres sur son passage. D'après nos derniers renseignements, elle aurait tué au moins quatre Chasseurs cette dernière semaine. Tous ont été retrouvés avec la même marque sur le torse : un "E" rouge vif entouré d'une rose blanche.

- "E" comme Ensorceleuse, marmonné-je pour moi-même.

Henri hoche la tête, l'air grave. Quatre Chasseurs tués par une sorcière en l'espace de quelques jours ? En effet il y a de quoi s'inquiéter...

- Cependant, nous manquons cruellement d'informations à son sujet, reprend mon chef de mission. Je veux donc que tu infiltres son université et que tu...

- Comment ? Le coupé-je surpris. Tu as bien dit "son université" ?

- C'est exact, cette sorcière n'est encore qu'une enfant.

Je le regarde avec de grands yeux surpris, m'attendant à ce qu'il rigole et me dise que c'est une blague.

- Tu te fiches de moi là, c'est ça ? Tenté-je comme il ne parlait plus.

- Ai-je l'air de rire ?

Il m'a répondu d'un air dur qui me laisse supposer que non, il ne rigole pas. Il est on ne peut plus sérieux.

- Mais est-elle réellement puissante ? Est-ce vraiment nécessaire que j'aille m'occuper d'elle ?

- D'après les rumeurs, oui, elle est puissante et sans pitié pour ceux qui se trouvent sur son chemin.

Je me renfrogne et attends qu'il m'en dise plus sur ma mission qui s'annonce vraiment pourrie.

- Je veux donc que tu infiltres son université en tant qu'étudiant...

Je le coupe encore.

- Attends, attends, pourquoi est-ce que je dois me faire passer pour un étudiant ?

- Si tu arrêtais de me couper toutes les deux minutes je pourrais te le dire, me reproche Henri d'un ton sec.

Oups ! Je l'ai peut-être un peu énervé.

- Le village où vit cette sorcière est peuplé de créatures surnaturelles. Alors tu imagines bien que l'université où elle étudie est un vrai nid de monstres. C'est pour ça que je ne veux pas que tu la supprimes tout de suite. Renseigne-toi, ne laisse personne deviner ton identité et quand tu auras suffisamment d'informations sur ce démon, préviens moi et j'enverrai des renforts pour l'éliminer. Mais en attendant, je ne veux pas que tu touches à une de ces créatures, ce serait bien trop dangereux, tu serais percé à jour. Et je ne peux surtout pas me passer de toi, mon garçon, ajoute-il avec un sourire, tu es bien trop précieux.

"Qu'est-ce que je disais tout à l'heure ?"Pensé-je en retenant un sourire.

- Quel est ce village ? Demandé-je curieux.

Après une seconde d'hésitation, Henri finit par me répondre.

- Benevento.

"Benevento ?"Répété-je inconsciemment dans ma tête.

- Tu veux dire le village aux loups-garous ? Celui dont personne ne s'approche à cause des trois puissantes meutes qui y règnent ?

- Exact.

- Et tu veux que moi, j'y aille ? Dois-je te rappeler que les derniers Chasseurs qui s'y sont aventurés ne sont jamais revenus ?

- C'est bien pour ça que je t'envoie. Tu es le meilleur, je sais que tu pourras te camoufler et passer inaperçu au milieu de tous ces monstres. Mais la question est : aurais-tu peur d'y aller ?

Le Chasseur me dévisage, les yeux plissés, une expression de défi sur le visage. Il n'en faut pas plus pour me décider. Henri sait comment me prendre.

- Je suis le Traqueur, fais-je méprisant, rien ne me fait peur et certainement pas une bande de loups-garous en chaleur ou une sorcière qui n'est encore qu'une gamine.

- Parfait. Tu pars demain matin.

Sur cet au revoir "déchirant" Henri me fait signe de disposer. Il faut dire qu'il n'a jamais été très expressif en ce qui concerne ses sentiments et je suis comme lui. Mais même si on ne se le dit pas, je sais que je compte beaucoup pour lui tout comme il compte beaucoup pour moi. Il est comme un père pour moi.

Après avoir quitté le bureau d'Henri, je me dirige vers la salle à manger, qui pourrait facilement accueillir une cinquantaine d'invités. Des Chasseurs sont toujours attablés et une discussion particulièrement drôle semble les animer à en juger par leurs éclats de rire tonitruants. Enfin je pense surtout que le vin rouge que j'aperçois dans leurs verres doit y être pour quelque chose. Ils me font signe de les rejoindre à grands renforts de gestes mais je décline l'offre d'un regard désintéressé. Je n'aime pas beaucoup rester en compagnie, et encore moins lorsque les gens sont ivres et moi non. Je préfère de loin la solitude.

Je m'assois sur une chaise en bois précieux et me sers une assiette de mets succulents que je m'apprête à dévorer. Mais avant que ma fourchette en argent ne s'engouffre dans ma bouche, je sens une présence féminine derrière moi. Je n'ai pas le temps de me retourner qu'une belle fille blonde m'ébouriffe les cheveux et s'assoit à côté de moi.

- Contente de te revoir en vie Tristan ! Me lance-t-elle d'un ton jovial, le sourire aux lèvres.

- Salut Mel, merci pour ton mot, lui réponds-je en lui rendant son sourire.

- Alors, qu'est-ce que te voulait notre cher Henri ? Il t'a fait un gros câlin ?

Elle rigole de sa propre blague mais je ne la suis pas.

- Il me renvoie en mission, indiqué-je avec un air sérieux.

Son rire disparaît d'un coup et elle me regarde, médusée.

- Mais- mais tu en reviens tout juste ! Il ne peut pas t'en donner une nouvelle maintenant ! C'est injuste ! Il n'a qu'à envoyer quelqu'un d'autre !

- Ce n'est pas une mission qui peut être menée par quelqu'un d'autre Mélanie, soupiré-je, ce sera plus dangereux que les missions habituelles, avec plus de créatures de la nuit. Et elles sont plus puissantes que celles que nous combattons normalement.

- Alors pourquoi est-ce que le Conseil n'envoie pas un Chasseur plus expérimenté, plus âgé ? Insiste Mélanie sans comprendre.

- Parce qu'ils ont déjà envoyé des Chasseurs plus âgés mais ils se sont fait massacrer, et pour cette mission il faut un jeune pour pouvoir approcher l'ennemi sans être remarqué.

J'aime bien Mélanie mais quand elle veut savoir quelque chose, elle ne lâche pas l'affaire, elle me questionne pendant trop longtemps et ça finit toujours par m'agacer.
Mais apparemment elle ne s'en rend jamais compte car elle revient toujours à la charge.

- Mais tu n'as que vingt ans ! Tu n'es pas encore prêt pour ce genre de mission et puis d'abord tu es censé faire quoi ? Eh ! Cria-t-elle, où vas-tu ?

Je me suis levé avec mon assiette et me dirige vers la porte, avec l'intention de manger au calme dans ma chambre afin d'échapper à son interrogatoire qui me fait perdre patience.
Alors, sans me retourner, je lui lance :

- C'est top secret.