Chapitre 5

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Anastasia

Ça doit faire au moins deux semaines que je ne suis pas allée à la fac. Avec Amarok, nous sommes partis à la chasse aux Chasseurs (je trouve ça plutôt drôle comme expression !). Nous en avons exterminé quatre.

Je dois avouer que me retrouver ici m'irrite légèrement. Si je le pouvais je n'irais jamais à l'université et me concentrerais simplement sur ma chasse. Mais Sophie me harcèle pour que je retourne à la fac afin que je puisse me cultiver pour comprendre le monde humain dans lequel nous évoluons. Quelle blague ! Je n'ai pas besoin d'en connaître plus sur les humains, j'ai juste besoin d'assouvir ma vengeance.

Alors que je m'approche avec Amarok du groupe de Callie et de ses acolytes Rebecca et Sarah, je remarque une nouvelle tête. Ma première pensée est :"Putain comment il est sexy ce mec !"
Merci conscience pour ton enthousiasme...
Un beau jeune homme d'environ vingt ans se tient près de Sarah. Il a des cheveux aussi noirs que le charbon, dans lesquels on aimerait passer les doigts pour discipliner ses mèches rebelles. Sa peau est légèrement bronzée. Il porte un t-shirt noir qui lui donne un air de bad-boy qui m'attire. Même depuis le milieu de la cafétéria je peux voir qu'il est super bien foutu.

N'importe quelle fille rêverait de se blottir dans ses bras. N'importe quelle fille, mais pas moi. Je ne suis pas assez bête pour me jeter dans les bras du premier inconnu que je croise et un humain qui plus est !
Pas comme Sarah apparemment. A la manière dont elle le colle, je peux affirmer que ce sera sa prochaine victime, son prochain jouet.

Alors que je ne suis plus qu'à quelques pas de lui, il lève ses yeux vers moi et plonge son regard dans le mien. Je me fige quand ses yeux noirs comme l'enfer me fixent. Je me perds immédiatement dans ses prunelles qui ne reflètent rien à part le néant d'une nuit profonde dont on ne peut échapper.

Derrière moi je sens Amarok se crisper mais il ne fait rien. On reste comme ça quelques secondes qui me paraissent une éternité. C'est Callie qui interrompt ce moment de sa belle voix chantante semblable à celle d'une sirène.

- Hum hum. Salut Anastasia, cela faisait longtemps qu'on ne t'avait vue. Comment ça va depuis la dernière fois ?

Elle ne prend même pas la peine de saluer Amarok. Ça me met d'emblée en colère contre elle. Cette fille a beau être liée avec deux loups, elle traite quand même cette race comme inférieure. Je ne comprends vraiment pas pourquoi Célian et Jacy, ses deux loups-garous, se sont attachés à elle.

- Bonjour tout le monde, fais-je en affichant un sourire hypocrite, je me porte à merveille merci.

Tout le groupe me répond en me saluant joyeusement, sauf le nouveau qui se contente de me fixer étrangement sans rien dire.
Sarah et Rebecca se lèvent même pour me faire la bise. J'intercepte un regard noir de Callie et je m'empresse de le lui rendre.
Notre relation est plutôt compliquée. Je ne peux pas la voir en portrait avec ses manières de princesse supérieure et elle, elle a peur que je ne lui vole sa place. Je suis la plus puissante sorcière du coin, sans compter notre aïeule, et elle redoute que je ne la remplace auprès de Sarah et Rebecca.

Dans notre culture, les sorcières du même âge se regroupent toujours autour de la plus puissante formant ainsi un "cercle". Mais moi je n'ai aucune envie de passer mes journées avec ces filles qui ne pensent à utiliser leurs pouvoirs que pour influencer les humains. Elles adorent jouer avec eux, les utiliser et puis les jeter lorsqu'ils sont brisés. Moi, je n'utilise ma magie que lorsque quelqu'un se met au travers de mon chemin ou m'énerve.

Mais Callie et moi sommes toutes deux des sorcières et, par conséquent, des sœurs. Même si elle m'envie, elle me respecte. Et je sais que si j'ai un gros problème, je peux compter sur elle et inversement. La communauté des sorcières est très soudée et c'est ce qui fait sa force.

Amarok se racle la gorge comme pour rappeler sa présence.

- Bonjour Callie, toi aussi tu m'as manqué ! Annonce Amarok d'une voix teintée d'ironie.

Callie lui adresse un regard méprisant et avant qu'une remarque acerbe ne sorte de sa jolie petite bouche, la sonnerie, indiquant la fin de la pause, retentit. Et heureusement pour elle, parce que ce retour a la fac me rendant d'une humeur massacrante, je n'aurais pas hésité à la remettre vite fait à sa place.

Tout le monde se lève avec paresse et commence à se diriger en riant vers différentes salles de cours. L'université est tellement petite qu'il n'y a que deux classes différentes par licence. Et nous ne sommes qu'une vingtaine par classe, contrairement aux facs bien plus grandes dont les classes sont en fait des amphithéâtres accueillants plus de six cents étudiants. Nous changeons de salle à chaque nouveau cours.

Amarok me lance un rapide "courage" avant de rejoindre ses amis loups-garous.
Une fois que tout le monde est parti, je me dirige vers mon premier cours. Je n'aime pas beaucoup la foule et voir tout ce monde se bousculer pour aller étudier me donne la migraine, c'est pourquoi je suis toujours la dernière à bouger.

Quand j'arrive, je suis un peu en retard mais je m'en fiche. Je déteste qu'on me dise quoi faire ou qu'on me fasse des remarques et mes profs savent maintenant qu'il ne faut pas me contrarier. Mme Selene, enseignante de littérature, me fait un petit sourire et me laisse prendre ma place sans commentaire. Avec elle, nous ne sommes que huit sorcières dans l'université. Deux autres sont enseignantes et la dernière sorcière est en fait la proviseur. C'est peu par rapport au nombre total de créatures surnaturelles que cette fac regroupe. De nombreux professeurs sont des loups-garous tout comme le quart des étudiants.

Alors que je me dirige vers le fond de la classe, je m'arrête un instant. Le nouveau est là, assis au dernier rang, près de la fenêtre. A MA place. Je m'approche de lui tandis que Mme Selene reprend la lecture de Roméo et Juliette.

- Excuse-moi mais tu es à MA place, commencé-je poliment.

- Je suis arrivé le premier, alors tu n'as qu'à te trouver une autre place ou venir plus tôt en classe, répond-il froidement en me lançant un regard noir et glacial.

La moutarde me monte au nez.

"Non mais il se prend pour qui cet humain ?"

Personne n'a le droit de me parler comme ça. Et surtout pas un vulgaire humain. J'en ai puni plus d'un pour moins que ça.
Mais avant que je ne puisse répliquer, Rebecca, assise deux rangs devant, me fait signe de venir à côté d'elle.
Non sans jeter un regard menaçant au nouveau, je m'assois sur la chaise vide près de la sorcière brune.

- Laisse tomber, me chuchote-t-elle, ne le laisse pas deviner ta vraie nature.

Rebecca a raison bien sûr, d'ailleurs elle a souvent raison, de nous quatre, elle est la sorcière la plus sage. Il ne faut pas que quelqu'un découvre ce que nous sommes sous peine de mettre le monde de la nuit en entier en danger. Car Aliumnos a beau être un monde empli de créatures surnaturelles, quatre-vingt-six pour cent de la population est humaine et ce, sans compter les Chasseurs qui nous traquent depuis des générations. Je ne dois donc pas laisser mes émotions me submerger si je tiens à la survie de ma race.

N'empêche, je peux toujours jeter un petit sort incognito sur M. Arrogant, il ne saura jamais que ce qui lui arrive est commandé par une sorcière.
Alors, tout bas, je murmure un sort pour le rendre malade comme un chien. Je sais, c'est assez gamin, mais au moins il ne sera pas capable de venir en cours pour un bon bout de temps, trop occupé à vomir et à se tordre de douleur sur son misérable canapé. Ainsi je n'aurai pas à supporter sa tête de M. Supérieur, aussi séduisante soit-elle.
Rebecca me jette un regard réprobateur mais ne dit rien.

Durant tout le cours je sens le regard de cet homme insupportable sur moi. Je résiste tant bien que mal à l'envie de me retourner et de le fixer à mon tour. Il mérite une bonne correction pour son manque de respect.
Je souris d'un air sadique à l'idée que dans quelques instants ma petite vengeance va se déclencher.

Aliumnos-L'EnsorceleuseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant