Chapitre 3

278 30 1
                                    

Anastasia

- On recommence Ana ? Me propose Amarok avec un sourire charmeur.

- Tu n'es pas fatigué ? Moi, je suis épuisée, me plains-je.

- Allez, ne fais pas ta mauviette et lance moi ce nouveau sort, que l'on n'y passe pas la nuit, grommelle mon meilleur ami sans pour autant s'empêcher de sourire face à mon manque d'enthousiasme.

Poussant un soupir exagéré, je me concentre et visualise les poings et les pieds de mon partenaire. Une fois que je sens mon pouvoir prêt à être lâché, je l'expulse de mon corps et le dirige vers Amarok. Immédiatement ses poings et ses pieds se retrouvent ficelés par une force invisible l'empêchant de faire le moindre geste. Mon ami tombe lourdement au sol et ne peut retenir un "ouille" qui me fait exploser de rire tant la situation est risible. Puis j'utilise la télékinésie afin de le relever et de l'approcher de moi. Je repousse quelques mèches brunes de son visage et lui fais un bisou sur la joue avant de relâcher la force invisible que j'exerçais sur ses poings et ses pieds. Grognant, il se masse les poignets et me lance un regard noir, ce qui accentue mon fou rire.

- Ce n'est pas drôle.

- Oh si, crois-moi !

Je lui décoche un regard espiègle et il finit par me sourire aussi.

- Bon, je crois que je maîtrise complètement ce sort maintenant, déclaré-je en lui faisant un clin d'œil, alors à ton tour de m'épater, louveteau !

J'ai encore droit à un regard noir suite à ce petit surnom. C'est dingue, les loups-garous ne supportent pas qu'on les appelle "louveteau" alors que moi, je trouve ça mignon !

Pendant qu'Amarok se prépare à se transformer en loup, je ne peux m'empêcher de le regarder alors qu'il se débarrasse de son t-shirt et de son survêtement rouge. Amarok est plus grand que moi. Du haut de mon mètre soixante-cinq, je lui arrive tout juste au menton. Ce dernier est recouvert par une fine barbe rasée court qui donne au loup-garou cet air viril dont les femmes raffolent. Quelques mèches de ses cheveux châtain clair tombent devant ses iris jaunes qui captivent le regard et inspirent le respect. Son torse musclé suscite un sentiment de sécurité. Il est le parfait cliché de l'homme que les femmes humaines rêvent d'épouser. Malheureusement pour elles c'est un loup-garou, et lui et moi sommes liés.

Comme à chaque fois que je vois Amarok torse nu, j'admire ses magnifiques abdominaux et ses muscles saillants. Surprenant mon regard, le loup lève un sourcil tandis qu'un fin sourire provocateur se dessine sur ses lèvres. Gênée, je détourne les yeux et me plonge dans la contemplation des arbres qui entourent notre clairière.

Amarok et moi, nous nous sommes toujours entraînés dans cette clairière, car c'est ici que nous nous sommes rencontrés pour la première fois.
Je m'en souviens comme si c'était hier.
C'était environ deux ans après la mort de ma mère. J'avais alors sept ans et mes pouvoirs s'étaient déjà révélés, sois un an plus tôt que la normale pour une sorcière. Je m'étais isolée dans la forêt afin de pratiquer la magie et remplir au plus vite l'objectif que je m'étais fixé à la mort de ma mère : devenir forte afin de pouvoir la venger.

J'ai soudainement entendu un cri d'enfant et la curiosité l'emportant sur la peur, je me suis précipitée vers l'endroit d'où était parti ce son. J'ai alors découvert un homme recouvert d'une longue cape noire et d'une capuche, visant avec un pistolet un petit garçon terrifié. J'ai tout de suite reconnu un Chasseur, comme ceux qui avaient tué ma mère, et mon sang n'a fait qu'un tour. La colère m'a envahie, j'ai couru vers cet homme et, alors qu'il appuyait sur la détente de son arme, je me suis placée devant le petit garçon et sans vraiment savoir ce que je faisais, j'ai levé les bras pour arrêter la balle qui a stoppé à quelques centimètres de moi. Et avant que le Chasseur ne puisse réagir, j'ai lâché contre lui, toute la colère et la haine qui m'habitaient. La balle a fait demi-tour et s'est nichée dans le cœur du Chasseur, le faisant tomber à genoux et lâcher son arme. J'ai pu apercevoir son visage ahuri, ses yeux écarquillés de surprise.

- Qu-qu'est-ce que.... A-t-il chuchoté en me regardant.

Puis il est tombé sur le sol, raide mort.
Ce fut le premier Chasseur d'une longue liste, que j'ai tué. Mais je fus fort déçue en voyant que ce n'était pas un de ceux qui avaient assassiné ma mère.
Je n'ai ressenti aucun regret, juste un sentiment de justice. Et puis, j'avais sauvé la vie de ce jeune garçon, Amarok, ce qui me rendait fière. Après ça, nous ne nous sommes plus quittés. Nous étions toujours fourrés ensemble, il me suivait partout où j'allais.
C'est donc tout naturellement que, le jour de ses treize ans, jour de sa première transformation en loup, il a choisi de devenir Mon loup, faisant de moi Sa sorcière.

Quelque chose de doux m'arrache à mes souvenirs et me fait revenir à la réalité. Un magnifique loup brun aux pupilles jaunes se tient devant moi, sa truffe me chatouillant la jambe. Amarok fait d'énormes progrès, il est maintenant capable de se transformer comme bon lui semble. Et ce n'est pourtant pas chose facile, cela demande de nombreuses années d'entraînement avant qu'un loup-garou ne puisse se transformer à sa guise !

- On forme une équipe du tonnerre ! Lui dis-je avec un franc sourire, en caressant tendrement sa douce fourrure.

Après trente minutes d'exercices supplémentaires, je rentre finalement chez moi. Éreintée, je pousse la porte d'entrée du petit manoir qui me sert de maison. C'est un beau manoir ancien, en pierres grises.

Quand je passe le seuil, je me retiens de monter tout de suite le bel escalier en bois sculpté qui monte à l'étage pour me reposer. Je pénètre plutôt dans la cuisine qui se trouve juste à côté du hall d'entrée.
J'y trouve Sophie en train de préparer le dîner. Sophie est ma grand-tante et, à la mort de ma mère, c'est elle qui s'est occupée de moi. C'est une vieille sorcière qui doit avoir environ quatre-vingt-dix ans. Mais malgré son âge avancé, elle reste très belle avec ses longs cheveux blonds et ses yeux verts perçants. C'est d'ailleurs la seule ressemblance qu'elle a avec ma mère.
Sophie est l'aïeule de Benevento, c'est elle la plus vieille sorcière de notre village, celle que l'on vient consulter en cas de problème ou simplement pour quémander de bons conseils. Elle est respectée de tous et connaît un nombre incalculable de choses. Je suis donc bien chanceuse de partager sa maison.
Elle m'a appris les bases de la sorcellerie (j'ai ensuite acquis tout ce que je sais seule, avec des grimoires de magie). Je dois beaucoup à cette femme, même si elle n'a jamais pu remplacer le vide dans mon cœur qui s'est installé quand ma mère s'est éteinte.

- Bonsoir mon enfant, m'accueille la vieille sorcière avec un beau sourire.

- Bonsoir Sophie, la salué-je à mon tour en le lui rendant.

- Ton entraînement s'est bien passé ?

- Oui très bien, Amarok et moi progressons vite.

Un sourire fier s'étend sur le visage de l'aïeule. Elle me caresse maternellement la joue tout en me regardant avec une tendresse infinie.

- Ta mère serait fière de toi ma fille.

Une petite douleur m'écorche le cœur à l'évocation de ma mère. Elle me manque tellement !
Je mange vite le ragoût d'agneau préparé par Sophie et me dirige vers ma chambre.

- Tu vas déjà te coucher ? Me demande ma grand-tante, surprise.

- Oui, demain je vais en cours.

Aliumnos-L'EnsorceleuseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant