Les pouvoirs d'Alice, tome 1. - Souvenirs

8 - Mauvaise idée

- Ah, ben c'est pas trop tôt !

Jenny se tenait droite comme un bâton, pleine de confiance en elle et d'excitation. Elle tenait une serviette à la main et portait des lunettes de soleil Paula.

- Wah, elles sont trop belles tes lunettes ! je m'extasie.

- Oh, je les ai achetées y'a à peu près une semaine, à 70€. Bonne affaire pour une telle marque ! Mais bon, on n'est pas venues ici pour parler shopping !

Je la suivis jusqu'à la rivière. L'endroit était désert, on serait tranquilles.

- Et voilàààààà ! C'est pas génial, comme endroit ?

J'observai autour de moi. Il n'y avait pas un chat, un immense et magnifique arbre nous faisait de l'ombre et quelques oiseaux chantaient. Il faisait très bon.

- Tu comptes rester longtemps plantée là comme une idiote ? me demande-t-elle d'un ton sarcastique.

Elle était déjà dans l'eau.

Cette phrase lancée sur un petit ton de défi, je me dépêche de retirer mon t-shirt, mon pantalon, mon chapeau et mes sandales et me jette dans l'eau.

Effectivement, j'avais raison.

ELLE EST GELÉE !!!!

J'ouvris très grand la bouche, pour montrer à Jenny que j'avais vraiment très froid.

Elle ricana:

- Oh, allez, me dis pas que t'as froid ! Elle est super bonne !

Ouais ouais, bah non, elle est pas super bonne ! Parfois je me demande comment elle fait, franchement...

Jenny nagea jusqu'à un gros rocher au milieu de la rivière. Elle l'escalada et me lança:

- Attrape-moi si tu peux !

Oh, elle va payer de m'avoir sous-estimée !

Je soupire un bon coup et me lance vers le rocher. Complètement gelée, je commence à grelotter.

- Allez, un peu de nerds ! dit Jenny en tapant sur ses cuisses.

- Oui, c'est bon, j'arrive !

Je n'aime pas trop quand elle me parle comme ça. Je trouve ça un poil méprisant. Mais bon, je n'ose pas le dire, parce qu'après on va se disputer et je n'en ai aucune envie.

Une fois arrivée, je lance:

- Alors, c'est qui la mauviette ?

Jenny plissa les yeux puis ria jaune.

- Ok, tu veux jouer à ça. Bah on va jouer à ça.

Je n'aime pas ce ton. Je le sens mal.

- Je te propose de...

D'un coup, sans que je m'y attende du tout, je vis la tête de Jenny se baisser. Je regardai vers le bas et remarqua ses pieds en train de dévier vers la droite !

Je tentai de la rattraper, mais, ma main encore mouillée, son bras me glissa entre les doigts.

- JENNY !!!

C'est comme si le temps se ralentissait, tout d'un coup. Je vis Jenny plisser les yeux par réflexe, puis sa tête, en un bruit sourd, se fracassa sur le rocher.

- JENNY !!!!!!! je hurle encore.

Je m'agenouille à côté d'elle et tente de la réveiller en la secouant de toutes mes forces.

- Jenny, Jenny, je t'en supplie, dis-moi quelque chose !!!

Sans réponse, mes yeux s'emplirent de larmes. Sans réfléchir, je plonge dans la rivière pour rejoindre la berge. Sachant que la vie de ma meilleure amie en dépendait, j'allais à toute vitesse. J'ouvris son sac de chez Jennifer, fouilla entre le gloss et la crème solaire et trouvai son téléphone. Je le brandis, et, maladroitement, il tomba dans la rivière.

- NON !!!!

Avant que je puisse faire quoi que ce soit, le téléphone partit dans le courant, me laissant seule, en maillot de bain, trempée, sur la berge, avec ma meilleure amie inconsciente.

Les larmes que j'essayais de contenir depuis quelques secondes décidèrent de dévaler mes joues à toute allure. Ma bouche se mit à trembler et je hurlai:

- AU SECOOOOOUUUUURS, tout en sanglotant.

Puis je me dis que je ne pouvais pas rester là sans rien faire. Je devais sauver Jenny. Je pris une longue inspiration puis me souvins de mon pouvoir. Je cherchai alors autour de moi quelque chose qui pourrait me servir pour remonter le temps. Mes vêtements, des lunettes de soleil, un sac, des arbres... Un arbre ! Celui que j'avais observé, que j'avais trouvé très joli. Je n'étais pas sûre que ça marcherait, mais j'essayai quand même: je me concentrai...

Deux fenêtres apparurent devant moi. Sur l'une d'elle, on observait une jeune fille, sûrement moi, et son père, se tenant la main, en train de regarder les feuilles de cet arbre tomber. Sur l'autre, je me vis en train de l'observer aussi, mais cette fois j'étais plus grande et portait un chapeau. Si j'écoutais bien, je pouvais même entendre un peu le chant des oiseaux. C'était ça, j'en étais sûre. Je tapotai dessus avec ma main, puis le monde s'effaça.