Chapitre 1 : Il était une fois la guerre ...

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C'était un 22 mars 1923, mes parents étaient les plus heureux du monde. Un petit bébé a pointé le bout de son nez comme un bourgeon de fleur au printemps. Ce bébé, n'était autre que moi : Cécile. Cécile Durand. Ma mère, Blandine Durand était de taille moyenne, cheveux châtains courts alors que mon père, Émile Durand, était très costaud et grand. Il était très impressionnant et gare à celui qui osait l'attaquer ! J'avais également un frère, Arnaud, qui était de sept ans mon aîné.

     Tout allez bien, je grandissais normalement. J'allais à l'école, heureuse de retrouver mes amis et de pouvoir assouvir ma soif d'apprentissage. A la sortie de l'école, j'allais jouer aux billes avec mes deux meilleurs amis : Augustine et Paul, c'était un des moments de mon enfance que je préférais. C'est sûr que ce n'était pas avec mon horrible professeur, Madame Iniqui, que j'allais garder les meilleurs souvenirs ! Je m'en rappelle très bien ! Dès que l'on était distrait ou que l'on ne satisfaisait pas ses attentes, elle prenait sa règle et s'approchait de notre table. Elle nous fixait de ses yeux méprisants et nous forçait à fermer notre main sur la table : "clac !" Et un coup de règle qui nous faisait souffrir pendant une bonne semaine ! Puis, tel un diable, elle s'en allait ricanant de méchanceté... Oh non, je ne l'oublierai jamais !

     Mais l'école était obligatoire jusqu'à quatorze ans et à la fin de ma scolarité, je dus travailler en tant que serveuse au bar du coin que tenait mes parents. Je détestais ça ! Entre les personnes impatientes qui me réclamaient tout le temps et les ivrognes qui voulaient me mettre le grappin dessus ; c'était pire que les cours de Mme Iniqui ! Bien entendu, il y avait les clients habituels avec qui nous rigolions bien. Et tout cela pendant qu'Arnaud et mon père faisaient la cuisine. Ma mère servait avec moi et heureusement ! Elle m'aidait à me contrôler : avec mon caractère bien trempé, je m'énervais assez facilement contre certains clients qui me poussaient à bout et c'était assez problématique...

     Puis arriva ce fameux mois de septembre 1939 où nous entendions de plus en plus parler de la guerre, autant par la radio que par la bouche de nos clients, ce qui n'était pas pour me rassurer... Les gens du village n'avaient que ce mot à la bouche. Et pourtant ils vivaient comme si de rien n'était, comme si la guerre n'était pas à nos portes. Cette façon de voir les choses m'a toujours fasciné : comment peut-on vivre normalement alors que nous pouvions basculer à tout moment dans un conflit aussi dévastateur que la Grande guerre ?

Dix mois après le début de la guerre, l'armée française est battue en moins de six semaines causant la débâcle de cette dernière. Puis l'armistice fut signé le 22 juin 1940 mettant mon père dans une telle colère noire que je ne le reconnaissais même plus... Notre bar devenait de plus en plus vide : beaucoup d'habitants étaient paniqués. Nous regardions des gens faire leur valise et partir : une rumeur courait que les Allemands se rapprochaient dangereusement de notre petit village... Qu'allions-nous devenir ? Mon père nous avait interdit de partir : " Un patriote français ne quitte jamais son poste, vous m'entendez ?!" nous répétait-il sans cesse.

Puis arriva le jour où notre bar reprit, en quelque sorte, vie : il était rempli d'officiers allemands. Et ce fut ainsi pendant les jours qui suivirent... Nous pouvions aussi voir des défilés de soldats ennemis dans les rues : tous aux mêmes pas avec les mêmes gestes mais aucun d'eux ne se ressemblaient physiquement. Mon père m'a formellement interdit de parler, ni même de sourire à un de ces germanistes : " C'est l'un d'eux qui a emprisonné ton frère, tu comprends ?" me chuchotaient-ils en les regardant passer , " ne leur fait pas confiance où ils te poignarderont à la première occasion ."

Alexander ou Alexandre ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant