L'Esprit Angélique _ Terminée _

14

Une fois seule, Laureline commença à paniquer. Elle avait menti en disant qu'elle savait comment sauver le jeune homme. Elle cherchait juste à gagner du temps. Quand elle se pencha pour chercher son pouls, elle ne le trouva pas, ce qui fit accentuer sa panique.

- Kilian accroche-toi, je t'en supplie ! dit-elle désespérément.

Sans réfléchir, elle commença à invoquer les quatre éléments. Elle les sentit se battre en elle, ne demandant qu'à se libérer. Mais elle devait réussir à les unir parfaitement pour former le Tout.

Joignant ses mains poisseuses de sang à celles de Kilian, la jeune fille ferma les yeux très fort en laissant l'énergie affluer vers son ami. Ses pouvoirs lui picotèrent les mains et les illuminèrent d'une lumière blanche. Laureline retint son souffle. Elle se sentit confiante tandis que la douce lueur illuminait ses doigts.

Malheureusement, sa joie fut de courte durée. La lumière faiblissait de plus en plus, et Laureline força ses pouvoirs à redoubler d'intensité, en vain.

- Non, pas ça ! s'affola-t-elle.

Ses pouvoirs semblèrent l'avoir abandonné. Les larmes lui montant aux yeux, Laureline sut que sa toute dernière chance reposait sur Bastien. Elle savait que le jeune homme était avec une poignée d'autres élèves en cours de langue étrangère, mais se mit à espérer qu'il allait quand même sortir de la classe pour l'aider. Elle l'appela donc mentalement et attendit.

****

- Quelqu'un peut-il me conjuguer entièrement le verbe « rêver » ? demanda le prof d'allemand en balayant la classe de son regard perçant.

Bastien, au fond de la salle, mourait d'envie de partir en courant. Depuis le début de l'heure, il avait eu l'impression d'être mentalement et physiquement avec Laureline, et commençait à s'en inquiéter. Les phases entre chaque sentiment ou émotion qu'elle avait éprouvé avaient été brutales et rapides. Mais rien ne l'avait préparé à la violente décharge débordant de désespoir qui secoua tout son corps, manquant de le faire tomber de sa chaise.

« Bastien, j'ai besoin de toi ! Il faut qu'on unisse nos pouvoirs. Je t'en supplie, c'est urgent ! »

« J'arrive », répondit-il, et sans perdre une seconde il leva la main en sautillant presque d'impatience. Le prof, plein d'espoir, l'encouragea d'un signe de tête.

- Est-ce que je peux sortir ?

Le prof eut grand mal à cacher sa déception tandis que les élèves gloussèrent discrètement.

- J'ai posé une question, répondit-il sèchement en fusillant Bastien du regard.

- Oui, moi aussi, rétorqua le jeune homme, provoquant de nouveaux rires moins dissimulés.

Voyant le prof croiser les bras, indifférent, Bastien décida de sortir le grand jeu :

- Si je ne sors pas maintenant, c'est le verbe « vomir » qu'il faudra conjuguer. Je pense que je vais en inspirer plus d'un.

L'expression du prof changea radicalement : il devint subitement pâle, et balbutia :

- Euh, très bien sors. Mais je veux que quelqu'un t'accompagne.

- Je n'ai besoin de personne pour aller gerber, fit Bastien, agacé. Mais merci quand même.

- Oui, bon, vas-y, le pressa son prof. Et dépêche-toi. Euh, non, prends ton temps, surtout...

Bastien sortit rapidement et s'éloigna le plus possible de sa salle de classe. Arrivant au bout du couloir, sans se douter qu'il était à l'opposé de l'endroit où était Laureline, il s'appuya contre le mur et inspira profondément. Rose l'avait aidé à unir les quatre éléments la veille, mais il n'avait pas osé le refaire seul. C'était le moment de tester ses pouvoirs, d'autant qu'il n'avait plus le temps de chercher Laureline, même s'il l'appelait par la pensée.