Rapport n°10 T.cl

Rapport n°5

- Be quiet -

Toujours avec la même expression, Chittaphon arriva. A force cela devenait frustrant. Nous étions retournés à la case départ. Cinq séances misent à l'eau. Ma gloire s'éloigne. Mais je ne pense pas réellement que l'on soit au départ, nous avons reculer certes mais on dit bien « reculer pour mieux avancer. »

« Bonjour Chittaphon. »

Un jour, les réponses finiront par sortir. Je savais qu'il était difficile pour un patient de se confier dès le début. C'était une sorte de filtre qui nous bloquait sur l'expression de nos sentiments. Une distance qui se forme face à l'inconnu, une sorte de blocage. Nous sommes retenus par notre méfiance. C'était ce que je ne comprenais chez l'Homme, il avait toujours été un inconnu pour l'Homme, alors comment sommes-nous des Hommes ?

« Voudrais-tu me parler de quelque chose en particulier ? »

Le silence m'énervait de plus en plus. Si seulement il pourrait faire ne serait-ce qu'un soupir...Sur son dossier, il est pourtant inscrit qu'il parlait beaucoup à son jeune âge puis les années ont passé et le silence s'était installé. Être enfermé et suivit dès l'enfance n'était chose facile, ni même à l'adolescence. Maintenant, le voilà adulte. Pendant tout ce temps, il n'a pris une goutte d'air. Il n'a pu connaitre toutes les joies et les peines du début de vie et cela me provoque un pincement au cœur. Vivre devenait alors un calvaire, c'est pourquoi il ne vivait plus. Une idée me vint :

« Il est dit que tu aimes beaucoup la pluie. »

A ces paroles, il releva la tête, les yeux surpris mais je voyais sa joie se former.

« Si tu me parles, je te laisserai sortir. Il paraît que les jardins sont magnifiques et devines quoi, on prévoit de la pluie pendant toute la semaine. »

Il me scruta, il n'avait probablement aucune confiance en moi, ni en personne d'ailleurs. Sa confiance avait dû s'évader au fil du temps car il était assez bavard petit. Je me demandais bien ce qu'il s'était passé.

« Tu peux me faire confiance, tu le sais. »

Cela ne semblait changer. Je pense que je devrais faire preuve de moins de professionnalisme, cela installe beaucoup de distance malfaisante. Cela lui fera aussi plaisir de me montrer plus douce et amicale. Surtout que je suis plus jeune que lui et j'agis comme si c'était l'inverse.

« Je vais te parler de moi, tu veux ? Hum...de quoi pourrais-je te parler ? Tu sais ce que les gens disent de moi ? Que je suis un monstre. Ils sont bien drôles. Ils n'ont pas à dire cela. Je m'en fiche, je suis meilleure qu'eux, ils ne sont rien. »

Chittaphon ne comprenait ce que j'étais en train de faire. Il chercha la réponse dans mes yeux. Il devait sûrement avoir l'habitude de faire cela, inspecter le personnelle afin de connaître leurs intentions était chose réputée chez les patients mais cette fois, le thaïlandais ne parvenait à me déchiffrer. Cela était positif car je me différenciais des autres. Par la même occasion, je lui avais enlever cette expression froide qui m'agaçait.

Il avait penché la tête pour me comprendre mieux. Cela lui rendait un air plus mignon bien qu'il l'était déjà.

« Donc si tu me dis un mot, je te promets que je t'emmènerai dehors. Ne crois pas que je suis comme les autres, ma différence les énerve alors je continuerais d'être différente. »

Il se mit à réfléchir se mordant les lèvres par la même occasion. J'attendis et j'eus raison de ma patience.

Bilan :

En début de séance, j'avais pensé que tout était perdu. Après tout, Chittaphon est mon premier patient. Je ne m'attendais à ce genre de réaction. Lui parler de moi avait dû lui prouver que j'avais confiance en lui. Je lui ai promis de sortir s'il parlait et c'est ce qu'il a fait. Enfin essayé, il n'avait la même force que la dernière fois, la fois d'avant c'était par automatisme, là c'était par espoir. Seul un bafouillement était sortie. Je l'avais encouragé mais je savais bien qu'il lui faudra du temps. Je lui ai donc annoncé une sortie, à son plus grand bonheur.

J'avais hâte à la prochaine séance.