Chapitre #5

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Une atroce douleur fait surface. Ma tête tourbillonne en tous sens, me donnant la nausée. Mon univers de vagues déchaînées se ferme devant moi. Le coup raisonne fort dans mon crâne comme si le monde venait de s'écrouler sur ma tête. Le mal me brûle le cerveau et contamine le reste de mon corps. Je tombe à terre, pétrifiée.
L'océan se vide de toute son eau laissant derrière lui l'aridité. Le ciel s'enfuit emportant avec lui, les nuages noirs, gris et blancs. Les étoiles restent avec moi. Elles sont les seules à tourner en rond aussi vite qu'une toupille. Je n'arrive même plus à les repérer d'ailleurs. La moindre réflexion me déchire la tête. J'ai la mystérieuse impression que l'on vient de me l'arracher. Comme dit si bien la Rene de coeur dans le conte fantastique d'Alice, "qu'on me coupe la tête". La douleur pourrait s'évader peut être, et tout rentrerait dans l'ordre. Les rêves flotteraient à l'éternité et jamais je ne pourrais les quitter.
Mon bateau ... cet havre de paix ... flottant sur des eaux tantôt sereines, tantôt tourmentées ....

Les coups retentissent encore plus fort et plus douloureux. Me frappe t-on ? Cherche-t-on à ouvrir mon crâne pour percer le mystère de mes rêves ? Je ne laisserais personne puiser comme on jette un filet, à l'essence de moi même.
Je me battrais jusqu'au bout s'il le faut ! J'attaquerais ce maudit corbeau pour lui montrer qu'il faut plus que l'impossible pour vaincre les rêves.
Mes jambes m'ont lâchée, tout comme mes bras, mes pieds et mon cerveau. L'épine s'enfonce dans ma tête et le mal s'intensifie. Le sang s'échappe de ces tuyaux, reliés et emmêlés, ceux qui cherchent juste à aller au coeur afin de le nourrir. Serait-ce une hémorragie interne? M'amènera-t-elle à ma disparition et à ma mort?

Quelque chose ou....quelqu'un me touche le bras, comme pour m'aider, ou bien pour m'embarquer. J'ai la chair de poule rien qu'à l'idée de découvrir le corbeau encore plus noir et terrifiant que cinq minutes auparavant.
Soudain, une main caresse délicatement mon bras m'apportant ainsi, toute la chaleur nécessaire pour me remettre sur pieds. C'est en ouvrant les yeux, que je remarque avec horreur que cette personne, c'est lui.
Il est penché sur moi.
Trois couleurs se mélangent dans ses pupilles. C'est un dégradé, passant du marron au jaune, du jaune au vert, puis du vert au bleu.
Mon regard glisse jusqu'à ses lèvres. Elles sont gercées et ouvertes. Un peu de sang jaillit de celles-ci d'ailleurs. Ce liquide rouge s'enfuit de cet inconnu, affrontant ainsi le froid hivernal.
Mes pupilles sont dilatées, mon coeur raisonne dans ma poitrine, à croire que le sang ne circule pas assez vite dans mes veines. La peur contrôle mon corps. Il est impossible de maîtriser une pareille force. Nos regard restent croisés, dans cette rue enfoncée dans le noir presque complet. Seuls nos yeux brillent à la lumière des lampadaires. Il est fort, je suis faible, il est dominant, je suis soumise. Son regard si réel et dévastateur ne cesse de me fixer. C'est comme s'il m'avait vaincu à cet instant. Or ce n'est pas le cas. Ce ne sont que de ridicules hypothèses qui ne servent à rien ici. Des mots percent mes oreilles soudainement. J'écoute.

-Tu as foncé droit dans le lampadaire. Est-ce que ça va ?
Il s'écarte de mon corps pour me libérer, me laisser respirer..
Son timbre de voix est grave, obscure et mystérieux. Je dois m'enfuir, me tirer de là le plus vite possible. Sinon.....
Les mots sont des traitres et ne m'obéissent plus.
Je voudrais bouger, m'envoler tel un oiseau dans le ciel, me laisser ainsi emporter par le vent glacial.
Ses yeux dérobent tous mes secrets. C'est l'impression que j'ai lorsque je le regarde. Je ne peux plus bouger. La frustration et l'anxiété m'en empêche.

-Je comprend ton choix; Affirme-t-il
Hein?!
Il se penche à nouveau, supprimant le dangereux espace qui nous séparait jusqu'à maintenant. Ses mains me prennent dans ses bras afin de me soulever. Il me porte, me transporte, me supporte, m'apporte debout sur terre. Je l'observe me déposer là, sur le macadam encore humide par la saison. Je ne vois aucun sourire hélas sur la pâleur de son visage. Quelle est cette créature? Ma curiosité emporte sur tout sentiment. Je reste debout, plantée devant ce garçon qui me paraît effrayant à première vue. Mais ensuite?
Quel démon le hante?

-Je ne comprends pas, de quel choix parles-tu? Qu-qui es-tu? Tu t'es offert la permission de me toucher, tu t'es t'es invité dans cette discussion et tu m'as curieusement rencontrée....pourquoi?..
Mon coeur se serre. Mes jambes ne tremblent plus pourtant. Il me fixe, là, au centre du quartier, au dessous des sombres nuages et au dessus du vieux macadam.

-Tu viens du nord? Sa tête se penche légèrement vers sa droite, puis ses sourcils rebondissent comme de petits ballons.

-Heu, non, pas particulièrement. Pourquoi? Nord ou Sud, cela ne change en rien la maturité des personnes de toutes façons.
Réalité.

-Tu n'as pas faux...Mais ce n'est pas de cela que je veux parler.
Un petit sourire se trace sur son visage si terrifiant dans le noir.
Les personnes du nord sont à ce que j'ai pus entendre, les plus curieuses . Or, il se peut qu'une demoiselle m'ait infligée trop de questions à l'instant même. On ne m'avait donc pas mentis.

Mes noisettes attaquent sa personne pour trouver un indice qui me prouverais qui il est vraiment.

-Tu te trompes. On t'as roulé dans la farine; Dis-je, du ton le plus neutre qui soit.
Son sourire devient naturel  en un éclair. Se moquerais-t-il de moi? Ou serais-je encore en train de planer quelque part?

-ZACK!!
Une voix de femme retentit soudainement. Elle est triste. Elle est la pauvre petite voix, perdue au milieu des sanglots. Elle a l'air désespérée. Qui est-ce?
Le sourire du garçon s'efface, laissant place à une tristesse, sombre et douloureuse, profonde et mystérieuse. Quel guêpe l'a donc piquée? Le dard s'est-il enterré dans sa peau, l'infectant ainsi d'une pure tristesse?
Je m'approche légèrement. Qu'ai-je fait de ma peur... Ou plutôt, par où s'est elle enfuie?
Ses yeux s'échappent des miens pour regarder cette maison blanche, juste à côté de nous. Sûrement de là qu'elle règne. Sûrement de là qu'elle perce les murs harmonieux de la maison, cette petite voix.
Je touche le poignet du corbeau. Je sans sa froideur, son glaçon de tristesse. Son regard se pose alors sur moi mais son attitude ne change pas. Il est inquiet, trop, beaucoup trop pour vivre parmi nous sur Terre. C'est sûrement pour cela que je l'ai lâché. Je rentre, je saute les poubelles, les rues et les lampadaires pour retrouver le seul être qui, ici, rejette mon ambition. Le seul être que je ne peux plus supporter dans ma bulle réelle. Celui que j'ai besoin de voir pour remplir mon esprit d'injures et mon coeur de haine. Je veux voir rouge de partout. Je veux que mes veines éclatent de rage.
Le pire là dedans, c'est que je n'est aucune idée du pourquoi du comment. Le hasard définit nos émotions....
Cette réalité,  nous la trouvons ici, dans cet oubli, creusé par les hommes, que je nomme les abysses de la Terre....

~DIVING~Où les histoires vivent. Découvrez maintenant