Chapitre 3 : Tristan

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-Et oh, on se réveille mon lapin.

Tristan ouvrit les yeux et la lumière lui transperça les pupilles, ses paupières se refermèrent immédiatement. Il fit tout de même signe qu'il était revenu du monde des rêves, car sa mère continuait à le secouer :

- C'est bon, je suis réveillé, chuchota-t-il.

Un froid soudain le tira de son demi-sommeil et il se redressa d'un coup. Il était trempé jusqu'aux os et Lucia se tenait debout, en face de lui, un sceau à la main et toujours le même sourire qui faisait rêver Tristan. Apparemment, on ne l'avait pas entendu.

- Ce n'est pas trop tôt que tu te réveilles, gros dormeur, il est 14h et je te rappelle que tu m'avais promis de me faire visiter le bois voisin, dit Lucia en désignant du doigt une forêt se dessinant à l'horizon.

- 14h, répéta-t-il bêtement sans comprendre se qu'il disait.

- Oui gros bêta et peux-tu me dire ce que tu fais à dormir en plein milieu du jardin, hors de la tente, je te dérangeais tant que ça ?

- Au milieu du jardin, répéta-t-il une fois de plus.

Il se souvint alors du rêve qu'il avait fait, avec cette silhouette. Rêve qui avait été très réaliste, tellement réaliste que son esprit avait créé le rêve exactement dans ce jardin. Il était sortit uriner, puis s'était fait attaqué mais avait riposter se résuma-t-il rapidement. Il se redressa donc et suivit l'odeur du dîner déjà prêt. Durant le repas, il parla de son rêve et du fait qu'il devait sans doute être somnambule, ceci justifia le fait qu'il dormait dans le jardin. Il dut tout de même s'excuser des dizaines de fois auprès de son amie qui ne croyait pas toute l'histoire. A... les filles, toutes les même se dit Tristan, même si Lucia était unique à ses yeux.

Après deux heures de marche dans la forêt, Lucia et Tristan s'arrêtèrent pour manger – les parents de Tristan les avait laissés aller seuls se promener dans le bois, ils étaient assez grands et responsables selon eux. Le goûter englouti, plein de sucres revigorants pour les deux marcheurs, Lucia décida de construire une cabane et Tristan l'accompagna une fois de plus dans ses plans. Ils récoltèrent du bois plus ou moins longs avant de les assembler. Les branches ramassés, la cabane était prête à être montée sous les ordres de la belle patronne. Lucia voulut donc une cabane à son image, parfaite, elle choisie donc de rajuster les branches trop longues. Soudain, le temps s'arrêta pour Tristan, lorsqu'il vit Lucia sortir le couteau, enfin, la dague plutôt, la même que tenait son agresseur dans ce rêve aux allures si vraies. Cela ne pouvait être une coïncidence mais son rêve ne pouvait pas non plus être vrai, surtout lorsque Tristan se rappela du saut de l'inconnu. Voyant le regard de Tristan, rivé sur la lame, Lucia lui demanda :

- A oui, au fait, j'avais oublié de te demander l'autorisation, mais est-ce que je peux utiliser ton couteau pour tailler les branches ? Ça ne te dérange pas ?

- J'aimerais bien te dire oui, mais, ce n'est pas mon couteau et j'ai peur de savoir d'où il provient...

- Arrête, tu vas me faire peur, répondit-elle en rigolant.

- Non, je te promets. Où as-tu trouvé cette dague ?

- Ben la où tu l'as laissée, par terre dans le jardin à côté de toi endormi. C'était drôle d'ailleurs, ta mère a hurlé. Elle s'était imaginé tous les pires scénarios possibles : tentation de suicide, attaque...

Et ton, père qui est arrivé tout trempé de la douche et plein de savon, pensant qu'il était arrivé malheur. J'étais plié en deux.

Mais, Tristan ne rigolait pas, il ne souriait même pas. Il était plongé dans ses pensées, examinant tout ce que pouvait signifier cette réalité qu'il avait encore du mal à accepter. Sa tête bouillonnante d'informations, il dut s'asseoir sur un tas de bois que les deux amis avaient récoltés.

- Ça va, tu commences vraiment à me filer la frousse, s'inquiéta Lucia, avec tes histoires et ta tête de cadavre.

Pas de réponse.

- Et oh, répond...

- Il faut que je te dises quelque chose..., répondit-il enfin.

- Tu commences vraiment à me faire flipper.

- Le rêve, enfin le cauchemar que j'ai fait hier, qu...que je vous est raconté ce midi, et bien il est possible que ce se soit rée....

Une flèche se planta dans le chêne, à une dizaine de centimètres de Tristan, le stoppant net dans sa révélation. Un cri rauque, comme un grognement, ou peut-être bien un râlement retentit dans l'air.

Puis, soudain, six... non sept... sept... "choses" sortirent de terre et un autre de derrière un jeune châtaigner. Ils étaient petits, comme son agresseur de la veille, mais cette fois aucun ne portait de capuchon ou de cape, laissant ainsi clairement distinguer les créatures qui se trouvaient en face des deux jeunes. Leur peau d'une couleur verdâtre rappelant celle de certains nénuphars, était couverte d'écailles, un peu comme un reptile. Seule la tête ne comportait pas de trace de ces écailles. Comme si cette peau solide ne suffisait pas à les protéger d'une quelconque menace, tous était vêtu d'une lourde armure complétée soit d'une lance, soit d'une dague, soit encore d'une arbalète. Leurs oreilles étaient allongées vers l'arrière, se finissant en une pointe comme celle des lances qui les équipaient. Enfin, ils étaient pieds nus, laissant distingués des pieds humanoïdes qui étaient grands comparés à la petite taille des agresseurs.

Tristan et Lucia n'avaient pas fait un seul mouvement, regardant, ahuris, les "nains" armés jusqu'aux dents. Ce n'est que lorsque les petits guerriers chargèrent qu'ils se décidèrent à remettre en marche leur cerveau. Ils n'échangèrent qu'un regard, un simple et rapide regard puis s'enfuirent ensemble.

Tristan courut plus vite qu'il n'avait jamais couru, le cœur battant à tout rompre. Lucia courait à sa droite et son entraînement d'athlète lui permettait de courir aussi vite que lui. Cependant, comme si le destin semblait vouloir leur mort, ils débouchèrent sur une falaise. Au-delà se trouvait un magnifique précipice de la hauteur d'un immeuble, puis, en contre-bas courait jusqu'à perte de vue une forêt verdoyante chantant sous le soleil.

Les deux adolescents s'arrêtèrent nets. Ils étaient essoufflés et la vue de Tristan se faisait brouillée. Heureusement que Lucia l'avait retenu, sinon il aurait fait un joli saut de l'ange, tout droit vers le paradis. Il regarda Lucia, comme lui, courbée en deux pour essayer de retrouver sa respiration et avant qu'ils puissent parler, un nain bondit de la forêt, juste devant Lucia. Le guerrier leva son épée haut au-dessus de sa tête, se qui ne faisait pas si haut que cela d'ailleurs. Tristan tenta de réagir mais le combattant se trouvait à deux longs mètres de lui et à peine se releva-t-il, que l'épée redescendait vers sa proie. Elle fendit l'air de sa lame fine et tranchante, noire comme la nuit, absorbant la lumière autour d'elle. Lucia regarda Tristan ; dans ses yeux ruisselait la peur, une peur animale que Tristan ressentait lui aussi. Il y avait aussi de la tristesse, qui se manifestait sous un certain bleu pluie dans les yeux de la belle adolescente mais Tristan remarque une autre chose : de l'espoir.

Quelle ironie, alors que la main de la faucheuse venant récupérer son bien s'abattait sur elle, Lucia gardait espoir.

Puis le sang gicla sur l'herbe verte.

Les PuissantsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant