6-Un kebab au sucre

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Média:  Utopia - Rilès

La pluie coulant sur mon front je poussais la lourde porte du mini-restaurant. L'entrée semblait comme noyée dans la buée. Une odeur de viande brûlée venait titiller mes narines alors que des éclats de voix et des bruits de couteaux parvenaient à mes oreilles. Je regardais autour de moi et avançais dans l'enceinte du kebab. Quelques pas furent suffisants pour que des regards curieux se posent peu à peu sur moi.

"Ben alors, y a un petit nouveau?" S'exclama un homme barbu à côté de moi. Il était adossé à la vitre,  une frite à la main. 

"Qu'est ce que tu viens faire ici?" Demanda un autre en se balançant sur sa chaise. 

"Allez c'est pas là que tu devrais être! "

Cette ambiance était loin d'être plaisante, c'est pourquoi je restais stoïque cherchant ma connaissance du regard. Les yeux perdus, je scrutais les coins de la pièce mais en vain. Devant ma tête totalement inconnue, l'un d'eux se leva et en quelques pas s'approcha de moi pour passer son bras autour de mon cou.

" Ici c'est un kebab pas un barbec ' gamin, me soufflait-il au visage son odeur d'ail.

Mon regard ne croisa même pas le sien, j'étais trop occupé à trouver le mec qui m'a fait connaître ce lieu. Mes yeux balayaient le salon quand j'entendis un rire un peu plus familier. Enfin, du moins l'avais je déjà entendu. Mon regard se posa sur cet homme qui m'avait abordé voilà moins de vingt-quatre heures. Ce dernier, plus à l'aise que moi, me scanna lentement de ses yeux noirs comme pour vérifier si j'étais bien ce "clochard " du banc avant de s'exclamer d'une voix rieuse.

"C'est bon, lâchez ce gamin, c'est un miens!" dit-il tout en saisissant fermement mon épaule.

Un mien? Comment ça un mien? Mes membres se durcirent comme si j'avais ce grave syndrome de l'homme de pierre. J'ai toujours été très fermé avec les gens, même assez froid quand ils m'étaient inconnus. Perdu, ma bouche s'entrouvrit malgré moi. 

"Comment ça je suis un des vôtres ?" demandais je en le brusquant légèrement.

Je ne voulais sérieusement pas passez pour un pantin de première. Et encore moins dans un tel lieu, là où être un "jouet" était synonyme de totale soumission.

"Si t'es là c'est que j'ai un truc qui t'intéresses. Alors je pense que d'ici vingts minutes tu auras compris..."

Je tiquais.  Hé mec, qu'est ce que tu vas faire tout seul, ici à Paris? Je me débrouillerais, me répondis je peu sûr de moi. 
Bien sûr ! Dormir sur un banc était d'un chic! Une légère frappe à la tête me sortit de ma rêverie.

Il me regarda du coin de l'œil avec un léger rictus aux lèvres. L'homme s'aventura dans un petit couloir et je tentais tant bien que mal de garder mon calme en le suivant jusqu'à la cuisine. Il contourna quelques plans de travail et ouvrit une lourde porte précédemment verrouillée. Celle cie grinça subitement. Une odeur de javel me pris au vif alors que mes yeux se posèrent sur le carrelage blanc et froid de la petite salle. Une table en bois typiquement scolaire se trouvait perpendiculairement au mur et un placard en métal occupait le petit volume restant. Les lumières des néons me paraissaient aveuglantes mais la présence de sachets suspects me faisait de l'œil. Le stress me poussait à tout regarder attentivement et mémoriser chaque instants.  Que faisais je ici bon sang? L'homme m'indiqua d'un bref signe de tête la chaise qui m'attendait et décida de s'asseoir à son bureau.
Contrairement à ce que je pensais, il n'y eu pas de long silence, il me regarda vivement dans les yeux et à peine eu-je le temps de m'en apercevoir qu'il fit résonner sa voix grave:

"Je vais déjà te poser une question. Réfléchis bien à ta réponse mais dépêche toi j'ai pas tout mon temps. 

J'acquiesçais face à son mouvement de sourcils en resserrant ma poigne sur les pans de ma veste.

REGARD D'UN CŒUROù les histoires vivent. Découvrez maintenant