Anima

Chapitre 2, Partie 1

La pièce était lumineuse et spacieuse. En son centre, trônait une table ovale en ébène pouvant accueillir au moins 12 personnes. Les trois membres de jury étaient assis les uns à côté des autres. L'homme à la moustache s'installa sur une chaise libre près d'eux. Il semblait être le plus jeune et le plus décontracté des quatre. Cependant, l'expression de son visage informa Nyméria qu'il prenait son rôle d'examinateur très au sérieux. Ses oreilles de loup s'agitaient distraitement sur sa longue chevelure noire ramenée en une queue de cheval basse. Il portait un tee-shirt rouge clair et un bermuda blanc.

- Installe-toi, dit-il en montrant la place libre, seule en face des adultes.

Suivant ces instructions, l'étudiante s'assit sur la chaise en bois noir.

Le plus âgé prit la parole :

- Bonjour Nyméria. Je suis Monsieur Sophon. Je travaille ici en tant qu'érudit. A ma gauche se trouve le Professeur Naraco qui va t'enseigner l'histoire. A ma droite, il s'agit de Madame Starost, l'infirmière de l'école. Le jeune homme qui t'a fait entrer est Monsieur Undo, ton professeur de sport.

- Bonjour, les salua-t-elle poliment.

Après avoir détaillé la nouvelle arrivante, Naraco il prit une plume et noircit une feuille de parchemin encore vierge, sans dire un mot. Il portait une tunique noire. Cette dernière tranchait avec la pâleur de sa peau. Son crâne rasé, faisaient ressortir ses deux petits yeux orangés. Une paire d'ailes grises aux reflets argentés reposait paresseusement dans son dos.

- Comment te sens-tu Nyméria ? demanda Sophon.

Le doyen semblait être un homme sage, calme et avisé. Il portait une tunique blanche fluide avec des broderies dorées. Ses mains noueuses étaient à peine visibles au bout de ses longues manches immaculées. Le bas de son visage était recouvert d'une moustache et d'une longue barbe qui disparaissait sous la table. Une paire de lunettes rondes dorées reposait sur son nez aquilin. Ses yeux ambrés inspectaient la jeune femme. Des oreilles de renard rousses à la pointe blanche dépassaient de ses cheveux ivoire. Six queues de la même couleur dansaient dans son dos. Nyméria comprit que Sophon était un hybride humain-phyrox.

Cet animal est un renard particulier : en effet, il développe une queue supplémentaire pour chaque siècle vécu jusqu'à ce qu'il possède neuf queues. A ce moment-là, sa fourrure devient alors blanche et il possède la capacité de voir et d'entendre tous ce qui arrive n'importe où dans le monde. Il détient également une sagesse infinie. Le phyrox, fort dans le domaine de l'illusion, est prédisposé à la magie. Il est aussi capable de faire du feu en frottant ses queues les unes contre les autres.

- Nerveuse, lui répondit Nyméria honnêtement.

- Bien, bien... continua Sophon. Tout d'abord, je tiens à te dire que tous ce qui ce passe dans cette pièce est strictement confidentiel. Tu ne peux pas parler de notre conversation ni du déroulement de l'entretien aux personnes qui ne l'ont pas encore passé. Nous sommes ici pour découvrir quel est la nature de ton hybridation. Dans ce but, nous allons te poser une série de question. Mais avant cela, j'aimerais donc que Madame Starost t'examine. Est-ce que ça te pose un problème ?

- Non Monsieur.

Nyméria se leva pendant que l'infirmière s'approchait d'elle. Starost était une petite femme rondouillarde aux cheveux grisonnants. Les traits de son visage inspiraient la douceur. Ses yeux marron clairs fixaient avec tendresse la jeune femme pendant qu'elle lui souriait. Elle faisait beaucoup penser à Madame Michou. Nyméria eu un léger pincement au cœur à l'évocation de ce souvenir.

Après l'avoir mesuré et pesé, l'infirmière prit son pouls et vérifia si elle avait une queue, des ailes ou des oreilles particulières. Etant plus grande qu'elle, Starost lui demanda de s'assoir afin qu'elle puisse examiner son visage.

- Portes-tu des lentilles de couleurs ?

- Non. Mes yeux sont vairons au naturel, annonça-t-elle, légèrement agacée par sa question.

- Tes canines ont-elles toujours été aussi longues ?

- Oui.

- Puis-je te faire une prise de sang ?

- Oui. Par contre, vous devriez prendre une seringue plus résistante, ajouta Nyméria en la voyant avec une petite aiguille à la main. J'ai la peau dure et plutôt épaisse.

Après avoir suivi son conseil, elle s'approcha afin d'effectuer le prélèvement. L'infirmière eu effectivement un peu de mal à transpercer sa peau mais, elle réussit et mit son sang dans un flacon. Starost prit une goutte du liquide rouge et la versa dans un pot de tulipes mauves qu'Undo avait déposé sur la table, devant les examinateurs. Ces derniers observèrent la plante, visiblement mal en point, attentifs au moindre changement. Cependant, les secondes passèrent sans qu'il y ait le moindre résultat. Naraco renifla et nota l'expérience sur le parchemin, déjà bien rempli. L'infirmière rangea son matériel et regagna sa place.

- Intéressant..., murmura Sophon. Merci pour ta coopération jeune fille. L'examen médical est terminé. On va pouvoir continuer. Tu es prête ?

- Oui.

- Très bien. Réponds à mes questions le plus précisément possible. Peux-tu respirer sous l'eau ?

- Non.

- As-tu déjà eu une conversation avec un animal ?

- Non.

Une boule de lumière grise apparu juste devant la jeune femme. Elle semblait flotter dans les airs.

- Qu'est-ce que c'est ? demanda Nyméria, curieuse.

- Un de nos mages a lancé un sort sur la pièce afin de savoir lorsqu'un élève nous ment. Nous ne l'utilisons seulement lors des entretiens. Le noir signifie que tu mens et que tu le sais. Le gris nous apprend que ta réponse n'est pas véridique mais que tu ne pensais pas mentir. Donc, je répète et cette fois, réfléchis bien. As-tu déjà eu une conversation avec un animal ?

La jeune femme mit quelques minutes à répondre, fouillant dans ses souvenirs.

- Ce n'était pas vraiment une conversation, mais une fois j'ai pu empêcher une vipère de mordre un des élèves de ma classe.

- Comment ?

- J'ai attiré son attention et je l'ai fixé. Puis, c'était comme si elle avait lu dans mes pensées et elle est partit. C'était très instinctif.

- Tu peux faire ça juste avec les serpents ?

- Je pense que ça fonctionne avec tous les reptiles.

- Bien. Une dernière question. As-tu un, ou plusieurs, de tes sens plus développé que la normale ? Si oui, donne-moi un exemple pour chacun d'entre eux.

- Tous mes sens sont beaucoup plus développés. Par exemple, je peux sentir le cœur d'un lézard battre en effleurant son dos. Je sais exactement ce qu'il y a dans un plat en prenant une petite bouchée. Je suis capable de suivre la piste d'un animal sur plusieurs kilomètres et plus longtemps que des chiens de chasses ou des loups. J'entends en ce moment même le petit ruisseau traverser Argos. Tout à l'heure, en attendant mon tour dans le couloir, j'ai pu voir des dauphins s'amuser avec des sirènes et des tritons au large, dans l'océan.

Pendant plusieurs minutes, aucun des examinateurs présents dans la salle ne bougea. C'est à peine s'ils osaient respirer. Le professeur d'histoire était effaré, l'infirmière écarquillait ses yeux, choquée, et le doyen lui, paraissait au bord de la crise cardiaque.